Elections législatives

Analyse

S'il s'agit d'une sévère défaite de la droite, il y a aussi une victoire cachée du Front National, qui devient maître du 2ème tour. La gauche et les écologistes ne sont pas majoritaires dans le pays, c'est une situation électorale d'une grande fragilité. Les Grenoblois ont suivi les évolutions nationales avec deux exceptions : le FN progresse moins et les écologistes diminuent moins.

Nationalement

Le changement de majorité s'est joué à peu de choses, et ce sont les électeurs du FN qui ont fait la décision. L'électorat du FN s'affermit de plus en plus. Dans les triangulaires où ses candidats se maintenaient, il diminue entre les deux tours (de 22,8 à 17,6%) mais reste à un niveau très fort, ceci dans un contexte de vote utile exacerbé. C'est inquiétant pour l'avenir.

Le PS récupère après sa chute impressionnante de 1993, au détriment de la droite et des écologistes.

Les écologistes et alternatifs payent lourdement leurs divisions : il faut se rappeler qu'en 93 ils avaient atteint un niveau très élevé de plus de 11%. Il y a des sanctions qui peuvent être salutaires. Ce courant maintien un impact électoral important là où il y a action unitaire et un travail concret de longue date, comme à Grenoble. Les Verts compensent leur faible score électoral (3,66%) par l'élection de députés et un poste de ministre. A gauche il n'y a pas d'espace ouvert pour l'instant pour une autre gauche ou une gauche alternative. L'apparition nationale du courant écologiste et alternatif devrait se restructurer et se simplifier dans les mois à venir. De ce point de vue, nous ne pouvons que nous féliciter de l'échec de B. Lalonde (1,74%) et de A. Waechter (0,73%).

Dans l'agglomération

Si on calque les évolutions nationales entre 93 et 97 sur les cinq circonscriptions qui touchent l'agglomération, il y a une démonstration très claire qu'il s'agit d'un scrutin national, et qu'il n'y a pas eu d'effet mairie pour le PS à Grenoble -contrairement à ce qu'ont affirmé des analyses rapides et superficielles. Par contre il y a un fort effet Biessy et Migaud : G. Biessy renforce son implantation dans la 2ème circonscription au détriment du PS ; D. Migaud progresse de 4,5 points au dessus de l'évolution nationale au détriment de la droite (certes le candidat de droite ne faisait pas le poids, mais dans la 3ème circonscription M. Destot n'arrive pas à profiter de la même faiblesse).

 

 Votes  nationaux

 1ère  circon.

 2ème   circon.

   réel 93  réel 97  simulé  réel 97  simulé  réel 97
 extr. gauche  1,80  2,20  1,90  2,00  3,20  3,70
 PCF   9,10  9,90  4,80  4,90  21,60  27,90
 PS + div G  20,00  28,60  30,30  29,40  30,00  22,90
 écologistes   11,10  6,30  8,10  10,30  7,90  7,80
 droite  44,10  36,20  39,90  41,60  20,40  21,70
 FN  12,70  15,10  14,60  11,50  16,20  15,90
 Elus     

 R.Cazenave  RPR

 G.Biessy  PCF

 

 3ème circon.

 4ème  circon.

 5ème   circon.

   simulé  réel 97  simulé  réel 97  simulé  réel 97
 extr. gauche  4,10  3,80  2,60  2,70  3,80  4,10
 PCF   10,50  11,70  8,70 8,50  10,00  13,20
 PS + div G  35,20  34,70  36,60 41,50  28,10  26,00
 écologistes  8,50  9,10 6,90 6,60  8,10  7,90
 droite  25,10  25,70  30,40  25,40  34,80  34,60
 FN  15,90  14,80  14,30  15,10  14,80  14,00
 Elus

  M.Destot  PS

 D.Migaud  PS

 F.Brotte  PS

Les résultats de l'Entente des écologistes et alternatifs dans l'agglomération sont positifs :

A Grenoble

Il n'y a pas eu d'effet mairie au premier ni au 2ème tours. La gauche et les écologistes font à Grenoble 55,43% au 2ème tour, alors qu'aux municipales ils atteignaient 54,1 et aux présidentielles 52,3. En utilisant l'évolution des votes nationaux entre les présidentielles et les législatives au 2ème tour, le vote pour la gauche et les écologistes aurait dû atteindre 56,3% : il y a donc un léger déficit. M. Destot se contente de suivre l'évolution nationale (avec pourtant un candidat de droite inconnu), par contre A. Deschamps fait moins bien, mais avec un candidat de droite de poids (R. Cazenave).

La gauche

La gauche traditionnelle PS+PC+MDC 1 retrouve les voix des listes Destot et GO aux municipales : 38% aux législatives contre 37,5% aux municipales. C'est très stable et -encore une fois- il n'y a pas d'effet mairie. La leçon politique est que l'électorat de GO a choisi de manière claire et massive le vote pour le PS : la question de son espace politique est donc posée. Le PC maintien ses positions, le MDC fait un score très faible, l'extrême gauche (dominée par LO 2) progresse un peu.

La majorité municipale

Au 1er tour, la gauche et les écologistes (toutes tendances confondues) font 49% alors qu'aux municipales ils faisaient 49,5%. Ceci démontre que l'électorat des divers écologistes aux législatives faisait partie de l'électorat de l'ADES aux municipales (puisque le vote Destot+GO se retrouve sur la gauche traditionnelle). Le courant écologiste dépasse 10% sur la ville, ce qui est un résultat très positif dans un contexte de fort vote utile dominé par le vote national. Dans les cantons 1, 2 et 4 les écologistes font 10,5% au lieu de 11,6% aux municipales. Dans les cantons 3, 5 et 6 la baisse est de 2,5 points par rapport aux municipales, car le fait que les candidats n'étaient pas des élus a permis au PS de "mordre" mieux.

Au 2ème tour, dans certains quartiers, il y a une nette progression de la majorité municipale par rapport au deuxième tour des municipales. Par exemple tout le secteur Abbaye Teisseire fait progresser la majorité municipale de 5% (bravo Bernard Macret).

L'extrême-droite

Le FN augmente moins à Grenoble qu'au niveau national entre 93 et 97. Malheureusement il frôle ou dépasse les 20% dans certains quartiers de Grenoble : Taillefer 2 et 3, Teisseire 2, Malherbe 3, Eaux Claires 1 et 2, Beauvert, A. Abry, Houille Blanche 1. Dans ces quartiers il augmente en moyenne de plus de 2 points par rapport à 93.

Par contre il fait moins de 8% à Vieux Temple 3, Ile Verte 2, St Laurent, Jardin de Ville 2, Berlioz 2, Baladins 2, Arlequin 1 et 2. Il diminue en moyenne de 1,6 points par rapport à 93.

Au 2ème tour, les électeurs du FN ne se sont pas abstenus de manière significative, car il n'y a pas de corrélation entre la variation de participation entre les deux tours et le vote FN au 1er.

Par contre il est clair qu'au 2ème tour une partie du FN vote massivement à droite et une autre massivement à gauche, en fonction de la sociologie politique du quartier.

Conclusions

Nationalement il faut insister sur la grande fragilité électorale de la nouvelle majorité. Le FN est en embuscade et il profitera des moindres erreurs commises.

Témoin à Grenoble où il continue malheureusement son implantation dans les quartiers populaires. Plus généralement, il n'y a ni sanction ni félicitations de la majorité municipale, le seul effet mairie visible c'est le bon score des écologistes et alternatifs par rapport au recul national. L'ADES reste l'élément indispensable pour faire une majorité et maintenir le pluralisme dans l'institution municipale.

V. C.


1 MDC : mouvement des citoyens
2 LO : Lutte ouvrière