Rencontre avec le Chêne Vert et le groupe de réflexion Do-Co

L'avenir des domiciles collectifs

La politique gérontologique grenobloise a toujours privilégié le maintien à domicile : permettre, autant que possible à chaque personne âgée de vivre et vieillir " chez-elle ", dans son domicile, dans son quartier et son réseau de relations, éviter le dépaysement et le déracinement qui créent toujours un traumatisme.

Une innovation grenobloise

Depuis 1980 a été expérimentée et réalisée à Grenoble une modalité originale et innovante de maintien à domicile pour la personne âgée fragilisée par une perte d'autonomie. Il s'agit de lui offrir un nouveau domicile en lui permettant de louer un appartement dans un " collectif de domiciles " situé dans le quartier.

Cet appartement est entouré du même réseau de service à domicile : restauration, aides ménagères, auxiliaires de vie, infirmières, médecins, etc. Il bénéficie d'un service de garde et de surveillance 24h/24.

Il facilite la présence et la participation active et responsable des parents, amis et voisins. Cette formule, qui respecte l'indépendance, la liberté et la personnalité des locataires âgés, offre une grande souplesse d'adaptation aux besoins et aux situations.

Les domiciles collectifs ("Do-Co") grenoblois ont inspiré en France beaucoup de réalisations similaires. A Grenoble, ils accueillent, dans les six unités encore existantes, environ 70 personnes, âgées en moyenne de 84 ans à leur arrivée dans cet autre " chez-elles ".

Un avenir très incertain

Les familles et les associations (Chêne Vert et les unions de quartier) concernées par les "Do-Co" sont très préoccupées par un certain nombre de problèmes.

Problème de statut

Les domiciles collectifs ont un handicap très lourd, lié au fait qu'ils n'entrent pas dans les normes, dans les classifications administratives officielles. Ils ne sont pas des " établissements " au sens de la loi du 30-06-75. Ils n'ont en fait aucun statut particulier reconnu.

Il est très dur de vivre quand on est " hors normes ", et les autorités ou administrations tentent régulièrement de " faire rentrer dans les rangs ". Ce fut le cas en 1991, quand le président du conseil général décida d'assimiler les "Do-Co" aux foyers-logements afin de permettre l'attribution de l'aide sociale départementale.

C'est le cas actuellement, alors qu'élus et fonctionnaires du CCAS 1 (en parfait accord avec les fonctionnaires de la DDISS 2) estiment que les "Do-Co" doivent devenir de véritables " établissements " (au sens de la loi de 1975).

Les familles et associations concernées pensent au contraire qu'il faut respecter l'originalité des Do-Co et négocier une évolution de la législation, et une adaptation de la réglementation (par exemple en limitant aux lieux collectifs des Do-Co la mise aux normes de sécurité imposée par la loi de 1975).

Problèmes financiers

Pour 1996, le bilan établi par le CCAS, qui gère les Do-Co, fait ressortir un déficit de 2 M.F. Les divers frais à la charge des personnes âgées sont en général au-dessus de 10 000 F par mois.

Les aspects financiers pèsent toujours dans les choix et les orientations. Il faut par exemple savoir que la prestation spécifique dépendance (PSD) que verse le conseil général, est d'environ 2 500 F par mois si la personne est dans un établissement, et qu'elle peut atteindre jusqu'à 5 600 F si elle est à domicile !

Les familles et associations s'engagent

L'audit, réalisé en 1997, pour clarifier les données d'une politique gérontologique grenobloise, précisait : " pour les domiciles collectifs, il faut sortir de l'entre-deux à savoir un lieu de vie collective ou un domicile personnel de substitution. [...] Il s'agit ensuite de définir un fonctionnement adapté ".

Les familles et associations confirment leur choix de la deuxième perspective. Elles ont élaboré et présenté au CCAS un "projet de restructuration" du budget des Do-Co, avec une gestion associative dans laquelle le CCAS pourrait être partie prenante.

Le lourd problème n'est pas d'abord juridique administratif ou financier : il est politique. Les élus de Grenoble et du département sont-ils prêts à promouvoir et soutenir des formes originales d'action gérontologique ? Comme par exemple : des logements adaptés dans la ZAC Berthelot, des établissements spécifiques pour maladies d'Alzheimer, maintien à domicile grâce aux Do-Co, etc.

Les familles et associations posent cette question, et continuent d'espérer

J. C. Le 23-10-98

Chêne Vert : association des familles des usagers des Do-Co. 5 rue Antoine Polotti, 38400 St Martin d'Hères.

Groupe de réflexion Do-Co : il se compose de membres de la commission sociale du Comité de liaison des unions de quartier-CLUQ, de membres de Chêne Vert, et de bénévoles d'autres horizons. CLUQ, 6 rue du 4 Septembre,38000 Grenoble, tél.04-76-87-64-67.

Lire aussi notre conférence de presse du 2 décembre 1998


1 CCAS : centre communal d'action sociale
2 DDISS : Direction départementale de l'information sanitaire et sociale