Vers du logement social « bas de gamme », suite

Publié le 10 juin 2010

Nous indiquions récemment que l’adjoint à l’action sociale (Olivier Noblecourt) avait déclaré lors d’une intervention à l’université qu’il était favorable à mettre en place des logements sociaux peu chers (donc abandonnant la qualité actuelle notamment au niveau thermique) pour en multiplier le nombre. Estimant que nous déformions ses propos il nous écrit :

« Sur la forme, je m’étonne que vous publiez une information sans vérification : il est probable que les propos rapportés aient été mal interprétés ou mal compris alors qu’il aurait été très simple de vérifier.

Sur le fond, je ne défends en aucun cas le « logement social bas de gamme » et je considère que ses normes de qualité doivent être les mêmes que pour le parc privé. Par contre, je mets en garde, comme beaucoup d’acteurs sociaux, face à l’inflation des normes, qui renchérissent considérablement le coût des logements… et amènent les bailleurs sociaux à limiter leur production neuve.  Je considère que le parc public, qui est d’une qualité thermique bien supérieure au parc privé, ne doit pas porter seul l’émergence de nouvelles normes de construction et que nous devons en permanence chercher à concilier l’intérêt social et l’impératif écologique. Ainsi, je suis défavorable aux mesures normatives qui aboutissent à des prix augmentés de 10, 15 ou 20%, sachant qu’au final, c’est toujours le locataire qui paie. A force d’opérations exemplaires qui ne sont accessibles qu’à la partie la moins fragile des locataires sociaux et aux plus riches dans l’accession libre, nous risquons d’aggraver une tendance inquiétante des grandes villes : celle de n’être accessibles qu’aux plus riches ou aux plus pauvres,  poussant la classe moyenne à accentuer l’étalement urbain et la périurbanisation. Les enjeux sociaux de la mutation écologique en cours, à laquelle j’adhère pleinement, sont suffisamment complexes pour mériter d’autres débats que la caricature proposée par votre article ».

O. Noblecourt confirme ce que nous indiquions, puisqu’il se dit défavorable aux normes actuelles sur la qualité thermique des nouveaux bâtiments, qui impliquent des coûts de construction un peu plus chers. Mais il faut savoir si on veut vraiment limiter au maximum les dépenses d’énergie dans le bâtiment, sachant que c’est un des points importants pour diminuer les gaz à effet de serre et les charges locatives. Il est urgent de mettre en place des filières industrielles et artisanales qui acquièrent la compétence pour réaliser ces chantiers,et il y a là une responsabilité publique évidente pour aider à cette mise en place. Les marchés publics sont les leviers les plus efficaces pour le faire, et les normes l’imposent.

Nous sommes en désaccord profond avec l’adjoint, qui pense qu’il faut adapter le coût de construction des logements sociaux aux moyens des ménages, c’est une logique qui mènera inexorablement au logement bas de gamme que nous dénonçons. Pour nous il doit y avoir une solidarité nationale et locale qui subventionne correctement le logement social de qualité. Ceci suppose une volonté politique que n’a pas eu la gauche lorsqu’elle était au Gouvernement, où elle n’a pas réformé la fiscalité locale ni nationale.

Nous pensons qu’il est plus utile, plus de gauche et plus écologique d’aider à la mise en place de filières nouvelles pour la construction et la rénovation des immeubles (qui créent des emplois non délocalisables) que de dépenser des centaines de millions d’euros d’argent public, par exemple dans le développement des nanotechnologies, politique pilotée par le Gouvernement de droite et soutenue de fait par les votes de l’adjoint à l’action sociale.

Nous maintenons donc nos critiques, et attendons de voir dans les actes comment va se comporter la majorité municipale sur ce sujet.

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4 commentaires sur “Vers du logement social « bas de gamme », suite”

  1. Pascal Lefort dit :

    Bonjour,
    la polémique concernant le logement social me semble très dogmatique et un peu bobo.
    Oui, il semblerait que l’avalanche de normes qui pleuvent actuellement sur la construction de logements profite davantage au lobby du BTP qu’aux gestionnaires et occupants de ces logements. Oui, il semble qu’on puisse construire hors normes des logements agréables à vivre et économes en énergie. Oui enfin, l’augmentation constante des coûts du M2 construit contribue aux profits des leaders de la construction et réduit les capacités de livraison des acteurs du logement social; ce qui, à Grenoble, est particulièrement critique. Non je n’ai pas voté Destot au premier tour des municipales.
    Dans l’espoir de pouvoir poursuivre un débat constructif et ouvert avec l’écologie de gauche.
    Fraternellement.

    • admin dit :

      Et une fois tout cela posé, concrètement, qu’elle est votre position ?

      • admin dit :

        Il y a quelque chose de contradictoire dans les propos d’O. Noblecourt, Adjoint à la politique sociale. Il n’est pas défavorable aux normes actuelles, par contre il se disait défavorable aux mesures normatives qui aboutissent à des prix augmentant de 10 % à 20 %… Cela devient un peu trop subtil pour nous.
        Pourquoi des gens aux revenus modestes n’auraient-ils pas le droit de vivre dans des logements de bonne qualité et respectant les normes HQE ? Pourquoi cela ne devrait-il être accessible qu’à certaines catégories de revenus ? Il n’est pas impossible d’injecter plus d’argent public dans le logement social pour compenser les surcoûts, à condition que les politiques suivies à la Ville, à la Métro et au Conseil général ne gaspillent pas cet argent public dans des opérations qui ne sont pas pour nous d’intérêt général : études sur la rocade nord, stade des Alpes loué à des privés à des prix cassés, subventions à Nano 2012, la liste est malheureusement très très longue. Faire de la politique, c’est faire des choix : la majorité droite-gauche actuelle privilégie les dépenses de prestiges et les projets d’un autre âge, au détriment de la politique écologique et sociale.
        Nous sommes donc intéressés de savoir ce que va voter l’Adjoint à la politique sociale, lundi 14 juin au conseil municipal, sur les études à relancer sur une rocade nord qui ne fera qu’augmenter le trafic automobile, alors que cet argent pourrait servir à améliorer la qualité de vie de nombre de nos concitoyens.

  2. Olivier Noblecourt dit :

    Merci encore une fois de ne pas caricaturer ma position : je ne suis pas défavorable aux « normes actuelles » et encore moins à l’émergence d’une filière de construction verte. Je considère simplement que c’est n’est pas au logement social d’en porter seul la charge, avec comme conséquence la baisse de la production en volume (et les besoins sont criants) et des prix de sortie qui rendent le logement social inaccessible aux exclus (par exemple les sortants d’hébergement). Il me semble que la réflexion sur les normes doit tenir compte de leur impact social et qu’une position dogmatique de « y a qu’à subventionner » ne règle rien : les questions se posent ici et maintenant. Enfin, un peu d’humilité et de prudence sur l’impact réel des normes thermiques seraient bienvenues : la production neuve ne concerne que 1% du parc chaque année et les conséquences sur les « bas de quittance » pour les locataires sont encore mal démontrées. C’est un débat complexe qui à mon avis s’accommode mal de la recherche de la polémique, d’autant que je n’ai pas souvenir de désaccord avec les élus écolos sur ces questions dans les différentes instances où nous travaillons ensemble…