Etats Généraux et Généreux des associations, une belle réussite

Publié le 26 septembre 2013

EGGADurant une semaine, du 17 au 22 septembre, les Etats Généraux et Généreux des Associations (EGGA) se sont déroulés avec de nombreuses implications d’associations agissant sur divers secteurs thématiques et géographiques dans la ville. Cette réussite provient de la mobilisation des associations et de la forte implication du Président de l’ODTI (Claude Jacquier) qui a été la cheville ouvrière de cette manifestation. Il était prévu d’élaborer des cahiers de l’espérance. Une première version a été rédigée le 22 septembre, qui pourra évoluer dans les semaines qui viennent, la version finale devrait intervenir vers la fin octobre. Ces cahiers de l’espérance seront utilisés durant les prochaines campagnes électorales (municipales et européennes) pour que les candidats se positionnent sur les questions soulevées dans ces cahiers. Nous éditons la version préliminaire de ces cahiers, car ils constituent une mine très riche de réflexions et ce qui permettra a qui le veut de les compléter.

Cahiers de l’Espérance Associative

Les Cahiers de l’Espérance Associative signifient, tout d’abord, la volonté de promouvoir les fondements du fait associatif codifiés par les textes législatifs et constitutionnels. Il s’agit d’être vigilant face aux attaques dont il n’a pas manqué d’être l’objet au fil du temps et qui ne manqueront pas de s’exacerber dans le futur pour peu que les logiques régressives, à l’œuvre partout, l’emportent.

Pour les associations, il s’agit moins de se positionner vis-à-vis d’instances de pouvoir prescriptrices (Union européenne, Etat, voire collectivités territoriales –option principalement retenue par le Collectif des Associations Citoyennes au niveau national) que d’afficher leur volonté de poursuivre l’œuvre séculaire déjà accomplie par les femmes et les hommes au quotidien, une œuvre qui a débouché sur la loi de 1901, un texte remarquable d’efficacité dans sa forme et dans son contenu. Comptant sur leurs propres ressources, énergies de leurs initiatives, les associations doivent continuer à entreprendre en coproduisant avec leurs adhérents les biens et services qui leur sont nécessaires et qui seront mieux adaptés à l’écosystème dont nous avons hérité. Ce faisant, avec leurs adhérents, elles sont en mesure de concevoir de nouvelles formes de solidarité basées sur la coopération. Elles sont capable d’inventer de nouvelles manières de créer à l’heure où ce que d’aucuns continuent d’appeler crise s’avère être une profonde mutation des rapports sociaux, économiques, environnementaux, culturels et politiques à l’échelle planétaire.

Les Cahiers de l’Espérance Associative doivent être un manifeste de ce qu’il conviendrait de mettre sur pied, ensemble, pour rendre plus utiles et conviviales les activités que les associations construisent avec leurs adhérents. Rappelons ici qu’une association est un contrat de droit privé qui garantit aux créateurs et à leurs membres, y compris des mineurs, la liberté, de choisir le but de l’association, de se regrouper sans autorisation préalable, de déclarer ou non sa création et de s’organiser comme ils l’entendent. La dynamique de l’association dépend tout d’abord d’elle-même, pas d’un pouvoir exogène dispensateur de ressources.

Ces Cahiers de l’Espérance Associative ne sont qu’une ébauche, après plusieurs réunions en forum, corrections et amendements au cours des Etats Généraux et Généreux des Associations qui se sont déroulés du 17 au 22 septembre 2013 dans la Région RUrbaine Grenobloise. Le contenu des propositions, leur nombre, leur classement et leur hiérarchie ne sont en rien définitifs. Ce texte est destiné à vivre et à être retravaillé par les associations, amendé par chacune d’elles au cours des mois à venir avant les échéances électorales municipales et européennes. Nombreuses sont encore les pages blanches à remplir.

Ecrivez à eggagrenoble.2013@gmail.com

  1. La liberté d’association est «sacrée», c’est-à-dire inviolable. Pour les associations, la loi de 1901, amendée au fil du temps, apparaît comme un texte essentiel qu’il convient de protéger de toutes les atteintes des pouvoirs en place. Les logiques économico-financières et les dérives bureaucratiques visent à banaliser la nature des associations (en faire des entreprises comme les autres soumises aux seules lois de la concurrence) alors que la loi de 1901 a été sanctuarisée par la Constitution. La liberté de s’associer est en France un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR). Ce principe est le premier des onze identifiés dans ce que l’on appelle le bloc de constitutionnalité. Il s’impose à toutes les autres dispositions législatives.
  2. L’engagement démocratique au cœur du projet associatif. L’association est l’unité de base de la vie démocratique. Autant que les partis, les associations concourent à l’élaboration de la décision collective. Tous les résidents d’une communauté-territoire, femmes et hommes, adultes et mineurs, Français et étrangers, toutes et tous ont le droit et, pourquoi pas, le devoir de s’assembler pour trouver des réponses adaptées à leurs besoins individuels et collectifs dans le respect des lois de la République. Rappelons que «La loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société. Tout ce qui n’est pas défendu par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas». note 1 Les associations ont pour objectif de favoriser le développement de cet engagement, garant d’un «pouvoir d’agir» sur le devenir de nos sociétés. Les associations ne peuvent plus se contenter de procédures d’information, de concertation et de participation sur des projets élaborés par des technostructures. Elles doivent être considérées comme des interlocuteurs, voire des contre-pouvoirs, avec lesquels les autorités doivent négocier dans un cadre défini et partagé. Sur des projets d’intérêt général, les associations ont la possibilité de saisir les instances politiques délibératives et exécutives.
  3. Exigence d’égalité femmes-hommes dans toutes les instances associatives. La thématique du genre (rapports sociaux femmes-hommes) est trop peu prise en compte dans la société française. On sait pourtant que cette exigence conditionne la réussite des politiques publiques comme celle des stratégies des entreprises privées. Ce critère de parité et d’égalité femmes-hommes doit être utillisé dans l’instruction et l’évaluation des projets associatifs.
  4. Exigence de mise en œuvre de pratiques non discriminatoires au sein des associations et vis-à-vis des publics accueillis. Toutes les institutions, publiques et privées, fonctionnent sur des rapports asymétriques d’où découlent nécessairement des pratiques discriminatoires. Les associations n’échappent pas à cette règle et la vigilance doit être absolument de mise en leur sein.
  5. Ouverture des associations aux diasporas qui composent la Région RUrbaine Grenobloise et à qui, celle-ci doit avant tout son dynamisme et son génie : exode rural, rapatriés des colonies, immigrés européens, africains et ceux en provenance de tous les autres contrées de la planète. Ces diasporas sont un facteur de notre richesse associative et, mieux que les instances officielles, elles ont été, et sont plus que jamais, au cœur du développement, ici et là-bas : compétences, qualifications, transferts monétaires privés bien supérieurs à l’aide publique au développement (APD) et aux investissements directs étrangers (IDE). Les associations doivent faire vivre et valoriser cette belle notion d’hôte. Toutes et tous, nous sommes, tout à la fois, hôte-accueillant et hôte-accueilli.
  6. Exigence d’initiatives et d’innovations. Les associations se créent pour répondre à des besoins non couverts par la famille, le secteur public ou le secteur marchand. Souvent, elles le font en innovant radicalement. Le risque est grand cependant qu’elles cèdent à l’institutionnalisation bureaucratique paralysante. Conserver le souffle créatif originel est une exigence. Cela passe par le renouvellement des cadres bénévoles et salariés, l’évaluation et un conseil de perfectionnement des associations.
  7. De la capacité d’objecter ! Sans aller jusqu’à un droit à la «désobéissance civile» (référence à Thoreau note 2), face aux menaces multiples qui pèsent sur le devenir de la planète, menaces qui trouvent aussi leur origine en tout un chacun, les associations doivent défendre le droit de s’opposer aux pouvoirs établis et de recourir contre les décisions des autorités (démocratie interpellative). Les associations ont «le droit de demander compte à tout agent public de son administration». note 3
  8. Du bon usage de la crise dans le renouveau associatif et sociétal. Dans la crise présente le risque est grand de voir toutes les difficultés reportées sur les associations : l’association est la variable d’ajustement du secteur public et du secteur marchand. Les associations ont la capacité de mieux s’adapter aux mutations en cours. A l’interaction de multiples dynamiques socio-économiques portées par les bénévoles, les volontaires et les salariés, les retraités, les stagiaires, les apprentis, les personnes en contrat de professionnalisation, les personnes en service civique, elles marient différentes formes d’économies (marchande, redistribution, domestique, sociale, solidaire et communautaire, braconnage). Les associations sont proactives, porteuses du temps long tout en étant particulièrement réactives et efficaces dans le court terme. Ce sont des laboratoires de l’innovation sociale, économique, environnementale, culturelle et politique, les seuls peut-être capables de repenser et d’assurer la transition de nos sociétés vers un réel développement soutenable communautaire.
  9. Nécessité de promouvoir la diversité des pratiques. Chaque association est singulière, émanation de ses fondateurs initiaux et de ses adhérents. Elle vise à répondre à leurs besoins propres. Le regroupement de ces associations ne peut résulter que de leur volonté et de leur intérêt bien compris. Nul n’a le pouvoir de leur imposer ce qu’elles ne souhaitent pas.
  10. Nécessité de solidarités entre associations. Les associations reconnaissent la nécessité de ne s’enfermer, ni dans leurs identités, ni dans leur mission. Elles doivent organiser des relations de solidarités entre elles de manière générale ou sur des objets précis. Dans la concurrence pour l’accès aux ressources rares, les associations doivent renforcer les logiques coopératives et collaboratives sur un territoire, notamment entre ville et campagne, entre urbain et rural, jusqu’ici abusivement opposés, et où doivent renaître des circuits courts de solidarité. Cette coopération entre associations vise aussi à favoriser le partage d’informations (fracture numérique, Internet, écrit-oral).
  11. Les associations au cœur du développement soutenable de la région RUrbaine Grenobloise. Les associations doivent initier, conduire ou s’inscrire dans des projets de développement soutenable au sein des communautés-territoires de la grande région grenobloise. Par la nature de leurs pratiques, par la diversité de leurs missions et par les solidarités dont elles sont porteuses, les associations sont les actrices essentielles de la transition vers des sociétés plus sobres, plus efficaces en matière de consommation d’énergies renouvelables et de pollutions (objectif 2020 «3 x 20», objectif 2050 «facteur 4»).
  12. De l’autonomie de fonctionnement des associations. Les associations ne peuvent pas être l’instrument d’un pouvoir exogène, quel qu’il soit, politique, économique, religieux, etc. Elles doivent réunir les moyens et les ressources nécessaires en temps de travail et en valeur monétaire pour définir et mettre en œuvre leurs projets. Les associations doivent mobiliser toute la palette des ressources : contributions en nature et en argent, cotisations, dons et legs, fonds publics (aides, marchés et subventions), ressources marchandes, levées de fonds («fundraising», «crowdfunding»), sponsorat et mécénat, mobilisation de l’épargne «tontine et micro-crédits», prêts inter-associatifs, garanties bancaires, ristournes fournisseurs, dotation en fonds propres et reconstitution de fond de roulement, mutuelle associative, etc.
  13. Vers un équilibre dynamique entre bénévoles, volontaires et salariés. Les associations doivent favoriser en leur sein la mixité souvent conflictuelle des statuts de bénévoles, de volontaires et de salariés (certains de leurs intérêts, sans être opposés sont disjoints). Chaque salarié doit pouvoir accomplir un temps de bénévolat au sein de l’association. Chaque bénévole doit pouvoir être indemnisé. Les responsabilités professionnelles, civiles et pénales doit être clairement établie entre bénévoles et volontaires. Les rapports président-directeur d’association doivent être absolument repensés dans le respect de la déontologie associative.
  14. Du statut des associations et des élus associatifs. Le fonctionnement démocratique des associations doit faire l’objet de la plus grande attention (assez des associations faux-nez des administrations !). Afin de permettre l’expression de toutes les composantes au sein des instances délibératives et exécutives, les associations doivent veiller à ce que les divers intérêts en leur sein puissent s’exprimer (par exemple, un deuxième collège des salariés à voix consultative). Les élus associatifs doivent bénéficier d’heures de délégations prises sur le temps de travail afin de remplir correctement leur mandat (en référence au statut des élus politiques et syndicaux).
  15. Vers de nouveaux outils collectifs au service des associations. Les associations souffrent souvent d’un défaut de compétences dans les domaines techniques. La création d’outils appropriés s’impose : conseil juridique, conseil économique et financier, aide au montage de dossiers, aide au montage de projets, etc. Des initiatives ont été prises, ici et là, par exemple, la région Rhône Alpes avec SAVARA (structure d’appui à la vie associative en Rhône Alpes). Ces outils doivent être maitrisés par les associations.
  16. De la formation des cadres associatifs bénévoles, volontaires et salariés. Les formations universitaires et professionnelles sont insuffisantes en quantité et en qualité contrairement à ce qui existe ailleurs, notamment dans le monde anglophone. En partenariat avec l’université, des filières de formation doivent voir le jour correspondant à la spécificité associative. Les moyens alloués à la formation des bénévoles et des responsables associatifs sont dérisoires (voir la minceur du Fond pour le développement de la Vie Associative FDVA) alors que les fonds disponibles pour la formation professionnelle sont considérables et gaspillés en pure perte. Pourquoi ne pas créer une ENA, une Ecole Nouvelle pour les Associations !
  17. Echange, mobilisation et transfert de compétences. Favoriser et renforcer l’échange la mobilité et le transfert de personnels des entreprises (publiques et privées) vers les associations. Mise à disposition des associations, sur des périodes limitées, de personnel de grandes et petites entreprises ou du secteur public. Comme cela se fait ailleurs, l’engagement bénévole et volontaire devrait être intégré positivement dans l’évaluation des carrières du personnel des entreprises et de la fonction publique. Un temps minime de service (20% du temps ?) devrait être instauré. Création d’une bourse ouverte d’échange des compétences.
  18. Création d’un système efficace d’information sur la vie associative. Les associations souffrent d’une trop grande confidentialité de leurs activités selon le principe le bruit ne fait pas de bien et le bien ne fait pas de bruit. Il n’existe pas de bourse d’échange des compétences Grâce aux nouvelles technologies, il est possible de créer de nouvelles opportunités : annuaires, journal électronique, blog, réseaux sociaux dédiés, radio, TV, mobilisation de ces compétences et de ces ressources autour de projets.
  19. Création d’une carte de bénévole dans la Région Rurbaine Grenobloise. Cette carte permettrait à tout bénévole actif d’accéder à tarif préférentiel ou gratuitement aux services publics et marchands. On peut faire référence ici à l’extension aux bénévoles et aux volontaires des Plans de Déplacement d’Entreprise ou d’Administration –PDE/PDA.
  20. Créer un conseil associatif de la Région Rurbaine Grenobloise ouvert à toutes et à tous (nationaux, résidents étrangers communautaires et résidents étrangers non-communautaires) pour faciliter les échanges de savoir, de savoir-faire et de savoir être sur les projets associatif. Cette instance pourrait être appelée la Coopérative des Hôtes Associatifs pour une Région RUrbaine Enviée (CHARRUE), un outil indispensable pour ménager, aménager et manager cette communauté-territoire singulière en ses vallées et ses montagnes, ses villes et ses campagnes, si interdépendantes et si métissées. Ne mettons pas la charrue avant les bœufs ! Aux associations de donner le ton !

————–

Note 1- Article 5 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789, repris par le projet d’Olympe de Gouges «Déclaration des Droits de la Femme et de la Citoyenne» de 1791. Cet article est constamment bafoué par la pratique politico-administrative française qui renverse la formulation «Tout ce qui n’est pas interdit est autorisé» en «Tout ce qui n’est pas autorisé est interdit». Origine du mal français ?

Note 2- THOREAU Henry David (2007, La Désobéissance civile [« Civil Disobedience »], Le Passager Clandestin, 2007 (1re éd. 1849), 75 p

Note 3- Article 15 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Idem dans la Déclaration d’Olympe de Gouges. 

Mots-clefs :

Le commentaires sont fermés.