Lutte contre les discriminations : ce qu’on ne veut, ne sait ou n’ose pas voir, dire et surtout écrire !

Publié le 24 avril 2015

logo MétroIntéressant séminaire portant sur la lutte contre les discriminations mardi 14 avril 2015 à la Métropole dans le cadre de la Politique de la Ville. Intervention d’une sociologue, Christelle Hamel de l’INED (Institut national d’études démographiques) qui a porté essentiellement sur la question de la racialisation des violences sexuelles, à savoir comment la société et surtout les institutions font de ces violences, trop peu sanctionnées par les tribunaux, des pratiques imputables à certaines populations, à certaines cultures et à certaines religions. Les statistiques font bien évidemment défaut en la matière, notamment en raison de l’interdiction en France de l’ethnicisation des statistiques, mais cela n’empêche pas la prolifération de tels propos ou des propos analogues. Suivez mon regard : « L’Arabe est violent et violeur ! Le musulman a tous les droits et il bat sa femme ! ». Les discriminations (violence des hommes vis-à-vis des femmes) se doublent donc d’une discrimination de type raciale (la violence des hommes arabes ou musulmans par exemple). On pourrait même dire que l’absence de telles données encourage de tel propos, voire «légitime» un discours complotiste : on veut nous cacher quelque chose.

Les quelques enquêtes sérieuses, disponibles, malheureusement très limitées, montrent que ces crimes et délits ne sont pas le fait d’une catégorie particulière de la population, généralement la plus stigmatisée (la stratégie du bouc émissaire), mais qu’ils sont particulièrement bien répartis dans la société qu’il s’agisse de l’origine géographique des populations ou des catégories sociales. Les stéréotypes existent, ils ont la vie dure et ils se propagent généralement comme une trainée de poudre en temps de grande régression éthique et politique, notamment dans les zones les moins urbanisées, à la campagne, là où on trouve le moins d’étrangers et où l’extrémisme de droite raciste fait ses meilleurs scores aux élections. N’était-ce pas dans ce monde rural, et n’est-ce pas encore là que les crimes de sang, les violences corporelles, les violences sexuelles et surtout les incestes sont les plus fréquents en valeur relative, et cela commis exclusivement par de bons « Gaulois » issus de la « terre qui ne ment pas ».

Trois aspects essentiels auraient sans doute dû être abordés plus résolument lors de ce séminaire (ce n’est que partie remise) en réponse à quelques questions un peu iconoclastes de participants :

  1. La plupart de ces crimes et de ces délits n’ont pas pour scène privilégiée, l’espace public ou l’espace social, mais bien l’espace privé, la sphère domestique. C’est derrière la porte palière des maisons et des appartements, dans le secret des alcôves, que se produisent l’essentiel de ces actes comme d’ailleurs la plupart des crimes de sang recensés. Ils sont l’œuvre non pas d’inconnus mais généralement de proches familiaux et de gens du voisinage. Ils ne se produisent pas dans l’espace couvert par les forces de l’ordre (droit sacré du privatif, du « privé » de liberté de la civilisation romaine, domaine des femmes, des enfants et des esclaves), ni par leurs succédanés, les caméra-vidéos. Peut-être sera-t-il possible de le faire un jour avec les nouvelles technologies et les nouveaux textes sur le renseignement en installant des puces dans tous les espaces domestiques… et dans les organes sexuels ? Le transhumanisme est à notre porte !
  2. Deuxième aspect, quelle est la fabrique de ces stéréotypes et de ces représentations qui forment l’opinion dont sont ensuite esclaves les élu-es et les candidat-es aux élections. Trop facile d’imputer tout cela aux médias même s’ils ont une importante part de responsabilité. Il existe des appareils idéologiques dont font partie aussi les gens d’études et de recherches, souvent orientés par les financements, cartographiant à leur manière la réalité. Pourquoi s’intéresser à tel ou tel objet d’étude et pas à un autre ? Pourquoi problématiser ainsi une situation… et pas autrement ? Le changement de paradigme n’est pas la pratique la plus courante pour une recherche académique soumise aux routines du politiquement correct, aux plans de carrière et aux financements.
  3.  Troisième aspect qu’il faudrait surtout explorer. Parmi les fabricants de ces représentations à l’origine de la plupart des discriminations, il y a les institutions (publiques et privées) et de leurs « fonctionnaires » qui obéissant aux injonctions, dans une sorte de « banalisation du mal » comme disait Hannah Arendt, « ne savent même plus ce qu’ils font ». Doit-on les pardonner ? Généralement les études et recherches se concentrent sur les publics discriminés (les faits jugés, des enquêtes sur le sentiment d’être discriminé) ce qui est tout à fait utile et nécessaire, mais bien insuffisant. Rares sont les travaux qui portent sur les institutions qui discriminent et notamment sur les institutions de la République, au-dessus des lois, en contradiction avec la déclaration des droits de l’homme et de la femme. Faudrait-il pour cela avoir « le courage » de déposer plainte contre elles et de faire des recours pour qu’une jurisprudence soit établie. Qui le fait dans la région rurbaine grenobloise et en France ? Quelles sont les associations qui prennent le risque d’aider les discriminé-es à poursuivre leur discriminateurs ? Peu selon nos estimations, mais le concours est ouvert !

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