Là où il y a plus de propriétaires il y aurait moins d’emploi !!!

Publié le 26 avril 2018

Une étude, parue le 19 avril, un peu paradoxale de l’INSEE indiquerait une certaine corrélation entre la densité de propriétaires sur un territoire et le taux de chômage, elle s’intitule sous forme d’interrogation : « Plus de propriétaires depuis cinquante ans : des effets secondaires défavorables à l’emploi ? »

« Si le statut de propriétaire est généralement associé à une meilleure situation sur le marché du travail, une augmentation de la densité de propriétaires au niveau local va pourtant de pair avec une hausse du taux de chômage. Ce paradoxe, mis en évidence dans de nombreux travaux, est examiné ici pour la France, où la propriété s’est considérablement développée depuis cinquante ans. Il peut se comprendre comme la résultante de deux effets. D’une part, les propriétaires sont effectivement moins souvent au chômage que les locataires : une plus forte densité de propriétaires joue dès lors mécaniquement à la baisse sur le taux de chômage. D’autre part, une forte densité de propriétaires peut engendrer des tensions sur le marché du logement : ces tensions sont susceptibles de compliquer la recherche d’emploi des chômeurs, par exemple en limitant leurs opportunités de trouver un logement à proximité des offres d’emploi. Les données des recensements successifs de la population entre 1968 et 2011 permettent d’estimer l’ampleur de ces effets pour la France. Il en ressort que le second effet l’emporte sur le premier : en particulier, une hausse de 10 points de la densité de propriétaires au niveau local serait associée à des frictions sur le marché du travail accroissant d’environ 1,3 point le taux de chômage local. La résultante des deux effets serait néanmoins d’ampleur modérée, à hauteur de 0,6 point sur le chômage local. »

  • « Quels mécanismes sous-jacents ?

Pour expliquer le lien positif entre densité de propriétaires et taux de chômage, on pourrait faire l’hypothèse que les propriétaires risquent davantage d’être au chômage que les locataires ; la relation agrégée ne ferait que refléter cet état de fait individuel, par effet de composition (cf. infra). On peut effectivement imaginer que les propriétaires soient restreints dans leur recherche d’emploi en raison de coûts spécifiques en cas de déménagement (par exemple, le paiement de droits de mutation à titre onéreux s’ils viennent à vendre leur logement ou l’imposition des loyers perçus s’ils le louent). Mais de nombreuses analyses empiriques montrent que le risque de chômage est moindre pour les propriétaires : au-delà du fait qu’être propriétaire peut traduire une meilleure situation, les propriétaires peuvent aussi avoir un goût plus élevé pour la stabilité, qu’elle soit résidentielle ou professionnelle (Munch et al., 2006) ou le besoin de rembourser régulièrement un emprunt hypothécaire (Laamanen, 2013). Un paradoxe existe donc entre ce qui s’observe aux niveaux individuel et agrégé, ce qui appelle une autre explication : le manque de mobilité des propriétaires génèrerait une externalité négative. Oswald (1999) suggère ainsi que la moindre mobilité des propriétaires réduirait la fluidité du parc de logement dans les zones où ils sont plus nombreux, affectant l’ensemble des chômeurs qui chercheraient à s’y établir pour un nouvel emploi : « [une] difficulté n’est pas que les chômeurs soient eux-mêmes propriétaires ; elle est que les hommes et femmes au chômage ne peuvent déménager aux bons endroits. Des taux élevés de propriétaires limitent l’accessibilité des jeunes aux zones où ils pourraient trouver un emploi. »

Voir l’étude ici.

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