Les conséquences de la pollution atmosphérique : 4 rapports simultanés !

Publié le 2 novembre 2018

Le Commissariat général au développement durable du ministère de l’écologie vient de rendre public le 26 octobre, le bilan de la qualité de l’air extérieur en France en 2017. En effet, la loi impose à l’État de publier chaque année un rapport portant sur la situation et l’évolution de la qualité de l’air sur son territoire ainsi que ses effets sur la santé et l’environnement.

Au même moment, l’Autorité environnementale rend un avis critique sur le plan de protection de l’atmosphère de la vallée de l’Arve, l’Agence européenne pour l’environnement publie un rapport sur la pollution atmosphérique en Europe et l’OMS indique que plus de 90% des enfants dans le monde respirent chaque jour un air pollué et que cela a des conséquences sanitaires très graves.

Le bilan national montre qu’entre 2000 et 2017 la situation s’est améliorée, mais ce n’est pas suffisant puisque la France ne respecte pas les normes européennes pour les NOx, les particules fines (PM10) et l’ozone (O3). La métropole grenobloise faisant partie des agglomérations qui ne respectent pas les normes pour le NO2 et les PM10.

« Le non-respect des normes réglementaires de qualité de l’air pour la protection de la santé définies au niveau européen concerne principalement trois polluants : le NO2, les PM10 et l’O3. Sur la période 2000-2017, le nombre d’agglomérations ne respectant pas, chaque année, les normes en NO2 a diminué. Il est de 12 en 2017 contre 24 en 2000, avec un pic à 37 en 2003. Les grandes agglomérations (de plus de 250 000 habitants), et dans une moindre mesure celles de taille moyenne (50 000 à 250 000 habitants), sont les plus concernées par ces dépassements de normes, majoritairement sur des stations situées à proximité du trafic routier. Pour les PM10, les agglomérations les plus touchées par le non-respect des normes sont également celles de tailles moyenne et grande. Les stations de mesure impliquées se situent à proximité du trafic routier et en fond urbain. Sur la période 2007-2017, le nombre d’agglomérations concernées a diminué grâce à la baisse des émissions suite aux plans d’action mis en place. Si les concentrations moyennes d’O3 n’évoluent pas à la baisse, le nombre d’agglomérations avec des dépassements de normes a en revanche diminué sur la période 2000-2017. Contrairement au NO2 et aux PM10, les agglomérations les plus touchées sont celles de moyenne et de petite taille (de moins de 50 000 habitants). »

Le bilan rappelle les contentieux européens portant sur la qualité de l’air ; la France a été rattrapée par la patrouille à propos de la concentration excessive des PM10 et du NO2. Grenoble faisant partie des agglomérations pointées du doigt.

« De 2009 à 2011, la France a reçu plusieurs avertissements de la Commission européenne (mise en demeure, avis motivé, saisine de la Cour de justice de l’Union européenne) pour le non-respect des normes réglementaires de qualité de l’air pour la protection de la santé humaine, fixées pour les PM10. En février 2013, la Commission européenne a adressé à la France une mise en demeure complémentaire et a élargi ses griefs contre elle. Désormais, il est reproché à la France de ne pas se conformer aux niveaux réglementaires de concentrations de particules dans l’air et de ne pas mettre en place des plans d’action répondant aux ambitions de la directive. La France a reçu un avis motivé en avril 2015 pour 10 zones : Douai-Béthune-Valenciennes, Grenoble, Lyon, Marseille, la Martinique, Nice, Paris, Toulon, la zone urbaine régionale de Provence-Alpes-Côte d’Azur et la zone urbaine régionale de Rhône-Alpes.

Par ailleurs, les normes européennes de qualité de l’air pour la protection de la santé humaine concernant le NO2 sont entrées en vigueur en 2010 et sont dépassées chaque année dans plusieurs agglomérations. En février 2017, la France a reçu un avis motivé de la part de la Commission européenne relatif aux dépassements des normes de qualité de l’air en NO2 et insuffisance des plans d’action en visant 13 zones et agglomérations : Clermont-Ferrand, Grenoble, Lyon, Marseille, Montpellier, Nice, Paris, Reims, Saint-Étienne, Strasbourg, Toulon, Toulouse, et la Vallée de l’Arve. En mai 2018, la Commission européenne a annoncé sa décision de saisir la Cour de justice de l’Union européenne.

Au niveau français, dans sa décision du 12 juillet 2017, le Conseil d’État a enjoint à l’État de prendre, d’ici le 31 mars 2018, toutes les mesures nécessaires pour que soient respectées les normes de la qualité de l’air dans le délai le plus court possible. »

Le 24 octobre, l’Autorité environnementale (Ae) a rendu un avis critique sur le second plan de protection de l’atmosphère (PPA2) de la vallée de l’Arve (Haute-Savoie).

« L’évaluation environnementale du PPA2 est un document très synthétique, qui rappelle le contexte particulier de la vallée de l’Arve et donne une appréciation essentiellement qualitative et globalement positive des mesures proposées, avec très peu de données chiffrées. Elle ne permet donc pas d’apprécier correctement l’impact quantitatif et réel du PPA2 par rapport à son enjeu essentiel… l’Ae recommande de mieux justifier pourquoi des objectifs plus ambitieux, tels que les objectifs de l’OMS préconisé par la Cour des comptes européenne, n’ont pas été retenus, qui seraient de nature à permettre d’atteindre un gain d’espérance de vie plus important pour les habitants du territoire ».

Le 29 octobre l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) édite un rapport qui souligne que la pollution atmosphérique reste trop élevée dans l’ensemble de l’Europe :

« Malgré de lentes améliorations, la pollution atmosphérique dépasse toujours les limites établies par l’Union européenne et les lignes directrices de l’Organisation mondiale de la santé, selon des données et informations récentes publiées par l’Agence européenne pour l’environnement (AEE). La pollution atmosphérique continue de représenter un danger pour la santé humaine et l’environnement…

Autres conclusions essentielles

Particules : Pour les PM2,5 (particules d’un diamètre de 2,5 micromètres ou moins), le pourcentage de la population urbaine de l’UE exposée à ces particules était de 6 % en 2016, contre 7 % l’année précédente. Mais environ 74 % de la population urbaine de l’UE a été exposée à des concentrations supérieures aux limites fixées par les lignes directrices de l’OMS, qui sont plus strictes. On estimait à 422 000 le nombre de décès prématurés causés par l’exposition aux particules PM2,5 dans 41 pays européens en 2015.

Dioxyde d’azote : La valeur limite annuelle pour le NO2 continue d’être largement dépassée dans l’ensemble de l’Europe. En 2016, 7 % de la population urbaine de l’UE vivait dans des zones où les concentrations étaient supérieures à la valeur limite annuelle fixée par l’UE et les lignes directrices de l’OMS, contre 9 % en 2015. L’exposition au NO2 a provoqué quelque 79 000 décès prématurés dans 41 pays européens en 2015.

Ozone troposphérique : Environ 12 % de la population urbaine de l’UE a été exposée à des concentration de O3 supérieures à la valeur cible de l’UE en 2016, ce qui représente une diminution considérable par rapport à 2015 (- 30 %). Ce pourcentage reste néanmoins supérieur aux 7 % enregistrés en 2014. Environ 98 % des citadins ont été exposés à des concentrations supérieures aux limites établies par les lignes directrices de l’OMS, qui sont plus strictes. L’exposition à l’ozone a provoqué quelque 17 700 décès prématurés dans 41 pays européens en 2015. »

Un rapport de l’OMS le 29 octobre tire un véritable signal d’alarme sur les conséquences de la pollution atmosphérique sur la santé des enfants, elle estime qu’en 2016, 600 000 enfants sont décédés d’infections aiguës des voies respiratoires inférieures dues à la pollution de l’air.

Voici les principales conclusions de ce rapport :

  • « La pollution de l’air affecte le développement neurologique, conduisant à des résultats plus faibles aux tests cognitifs, et a des conséquences négatives sur le développement mental et moteur.
  • La pollution de l’air endommage les fonctions pulmonaires des enfants, même à des taux d’exposition faibles.
  • À l’échelle mondiale, 93% des enfants de moins de 15 ans dans le monde sont exposés à des niveaux de particules fines dans l’air ambiant (PM2,5) supérieurs aux niveaux préconisés par les lignes directrices de l’OMS sur la qualité de l’air, parmi lesquels 630 millions d’enfants de moins de cinq ans, et 1,8 milliard d’enfants de moins de 15 ans.
  • Dans les pays à revenu faible et intermédiaire du monde entier, 98% des enfants de moins de cinq ans sont exposés à des niveaux de particules fines dans l’air ambiant (PM2,5) supérieurs aux niveaux préconisés par les lignes directrices de l’OMS sur la qualité de l’air. Par comparaison, dans les pays à revenu élevé, 52% des enfants sont exposés à des niveaux supérieurs aux niveaux recommandés par l’OMS.
  • Plus de 40% de la population mondiale – dont 1 milliard d’enfants de moins de 15 ans – est exposée à des niveaux élevés de pollution de l’air à l’intérieur des habitations, essentiellement dus aux techniques et combustibles polluants utilisés pour cuisiner.
  • Environ 600 000 décès chez des enfants de moins de 15 ans ont été attribués aux effets conjoints de la pollution de l’air ambiant et de l’air à l’intérieur des habitations en 2016.
  • Cumulées, la pollution de l’air intérieur due à la cuisson des aliments et la pollution de l’air ambiant (extérieur) causent plus de 50% des infections aiguës des voies respiratoires inférieures chez les enfants de moins de cinq ans dans les pays à revenu faible et intermédiaire.
  • La pollution de l’air est l’une des principales menaces pour la santé de l’enfant, responsable de près d’un décès sur 10 chez les enfants de moins de cinq ans.

La Première Conférence mondiale de l’OMS sur la pollution de l’air et la santé, qui débute à Genève le mardi 30 octobre, sera l’occasion pour les leaders mondiaux ; les ministres de la santé, de l’énergie et de l’environnement ; les maires ; les chefs des organisations intergouvernementales ; et les scientifiques, entre autres, de s’engager à agir contre cette grave menace pour la santé, qui écourte les vies de près de 7 millions de personnes chaque année. Il faut agir, notamment de la façon suivante :     

  • Le secteur de la santé doit prendre des mesures pour informer, éduquer, fournir des ressources aux professionnels de la santé, et s’engager dans l’élaboration de politiques intersectorielles.
  • Des politiques doivent être mises en œuvre pour réduire la pollution de l’air : tous les pays doivent s’efforcer de respecter les recommandations mondiales de l’OMS en matière de qualité de l’air pour améliorer la santé et la sécurité des enfants. Pour y parvenir, les gouvernements doivent adopter des mesures telles que la réduction de la dépendance excessive à l’égard des combustibles fossiles dans le bouquet énergétique mondial, en investissant pour améliorer l’efficacité énergétique et en facilitant l’adoption des énergies renouvelables. Une meilleure gestion des déchets peut réduire le volume des déchets brûlés dans les communautés et par conséquent réduire la pollution de l’air au sein de celles-ci. L’usage exclusif de techniques et de combustibles non polluants pour la cuisine, le chauffage et l’éclairage dans les habitations peut considérablement améliorer la qualité de l’air au sein des foyers et dans les communautés qu’ils forment.
  • Des mesures doivent être prises pour réduire au minimum l’exposition des enfants à la pollution de l’air : les écoles et les crèches doivent être situées loin des principales sources de pollution de l’air telles que les routes à fort trafic, les usines ou les centrales énergétiques. »

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