Le Conseil constitutionnel censure un article de la loi « anti-casseurs »

Publié le 5 avril 2019

Par sa décision n° 2019-780 DC du 4 avril 2019, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur certaines dispositions de la loi visant à renforcer et garantir le maintien de l’ordre public lors des manifestations, dont il avait été saisi par le Président de la République, par plus de soixante députés et par plus de soixante sénateurs.

« Saisi de certaines dispositions de la loi dite « anti-casseurs », le Conseil constitutionnel valide celles permettant en cas de manifestations certains contrôles et fouilles sur réquisition judiciaire (article 2) ainsi que la répression pénale de la dissimulation volontaire du visage (article 6) mais il censure, faute de garanties suffisantes, celles relatives au prononcé d’interdictions administratives individuelles de manifester (article 3)…

Le Conseil constitutionnel a notamment relevé que la menace d’une particulière gravité pour l’ordre public nécessaire au prononcé de l’interdiction de manifester devait résulter, selon les dispositions contestées, soit d’un « acte violent » soit d’« agissements » commis à l’occasion de manifestations au cours desquelles ont eu lieu des atteintes graves à l’intégrité physique des personnes ou des dommages importants aux biens. Ainsi, le législateur n’a pas imposé que le comportement en cause présente nécessairement un lien avec les atteintes graves à l’intégrité physique ou les dommages importants aux biens ayant eu lieu à l’occasion de cette manifestation. Il n’a pas davantage imposé que la manifestation visée par l’interdiction soit susceptible de donner lieu à de tels atteintes ou dommages. En outre, l’interdiction peut être prononcée sur le fondement de tout agissement, que celui-ci ait ou non un lien avec la commission de violences. Enfin, tout comportement, quelle que soit son ancienneté, peut justifier le prononcé d’une interdiction de manifester. Dès lors, les dispositions contestées laissent à l’autorité administrative une latitude excessive dans l’appréciation des motifs susceptibles de justifier l’interdiction… 

Enfin, les dispositions contestées permettent à l’autorité administrative d’interdire à une personne, dans certaines hypothèses, de participer à toute manifestation sur la voie publique sur l’ensemble du territoire national pendant une durée d’un mois.

Il résulte de tout ce qui précède que, compte tenu de la portée de l’interdiction contestée, des motifs susceptibles de la justifier et des conditions de sa contestation, le législateur a porté au droit d’expression collective des idées et des opinions une atteinte qui n’est pas adaptée, nécessaire et proportionnée. Par conséquent, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs, l’article 3 est contraire à la Constitution. »

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