Accident du Drac

Effets pervers

Souvenez-vous : le 4 décembre 1995, 6 enfants et leur accompagnatrice, en sortie pédagogique, furent noyés suite à un violent lâché d'eau d'EDF au barrage de Notre-Dame-de-Commiers.

Le procès de juin dernier avait été accablant pour EDF, et le procureur avait requis deux ans de prison avec sursis et 50 F d'amende pour trois cadres de cette entreprise. Il avait également réclamé des peines de prison avec sursis pour l'institutrice et deux responsables de l'Education nationale, ainsi qu'une amende de 100.000 F pour la Ville.

Le tribunal correctionnel, dans son jugement du 15 septembre, condamne l'institutrice à 18 mois de prison avec sursis, et les trois cadres d'EDF à un an de prison avec sursis et à des peines d'amende. L'amende de la Ville a été confirmée. Les responsables de l'Education nationale sont relaxés, ainsi que la directrice de l'externat Notre Dame.

Quelles ont été les réactions depuis juin dernier ?

Les parents des enfants ont trouvé les sanctions requises insuffisantes.

EDF a multiplié les opérations de séduction auprès des journalistes, en nommant un attaché de presse au moment du procès, puis en prodiguant dans les journaux des conseils de prudence aux promeneurs (cf. Le Dauphiné Libéré des 3 et 4 septembre), en s'offrant les services d'une agence de relations publiques lyonnaise (cf. Marianne du 23 juin).

Et le préfet de l'Isère ? Il a décidé le 4 juillet de fermer le site du Drac aux activités de loisir. Le site a en outre été défiguré, la végétation rasée sur 140 ha à coups de tronçonneuse (coût : 15 M.F.). D'affreuses souches lui donnent un aspect de vestige de cataclysme. 142 km le long de 7 rivières ont été interdits au public. A la suite de protestations locales, les 142 km interdits ont été ramenés à 118 pour permettre certaines activités de loisir estivales bénéfiques à l'économie de la région : kayak, pêche...

Il s'agit bel et bien là d'une confiscation du domaine public au profit d'EDF. Car n'oublions pas que l'on ne peut imputer ce tragique accident aux caprices du Drac : il n'est pas dû à une catastrophe naturelle et il aurait suffi qu'EDF suive les procédures d'alarme normales pour l'éviter. Le site du Drac, classé pour sa richesse en faune et flore, constituait une promenade superbe et toute proche pour les grenoblois. Cet aspect aurait dû être pris en compte par le préfet.

Alors, pourquoi pénaliser les enfants des écoles en sortie pédagogique, les promeneurs du samedi, du dimanche et des autres jours, ainsi que les pêcheurs de rivière ?

Ils ne sont en rien responsables, et devraient avoir le droit de profiter de ce site qui leur appartient, et non à EDF, ni au Préfet.

Geneviève Jonot