Un arrêt de la Cour des comptes concernant la gestion d’Alpexpo

Publié le 19 mai 2023
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La Chambre du contentieux de la Cour des comptes qui est, à compter du 1er janvier 2023, en charge de la répression des fautes commises par les gestionnaires publics en première instance, a décidé le 11 mai 2023 :

« Article 1er : Mme Catherine CALMELS est condamnée à une amende de trois mille cinq cents euros (3 500 €).

Article 2.  MM. Alain PILAUD et Claus HABFAST sont relaxés des fins des poursuites. »

Ceci met fin à la mise en cause par la justice financière des deux élus municipaux de Grenoble qui avaient la responsabilité de la direction générale d’Alpexpo, poursuites initiées par un signalement du Procureur près la Chambre régionale des comptes en 2018 dans le cadre du contrôle périodique d’Alpexpo. Il reste la poursuite pénale auprès du tribunal judiciaire de Grenoble qui sera jugée à l’automne. 

Alain Pilaud a été Président directeur général de la SEM Alpexpo depuis fin 2011 jusqu’en mai 2014, date à laquelle il a été remplacé par Claus Habfast. En juillet 2015 Alpexpo est devenue une Société Publique Locale. En août 2017, le conseil d’administration de la SPL a déchargé Claus Habfast de la fonction de Directeur général.

En février 2012, A. Pilaud passe un contrat avec la société MCG Managers où Mme Calmels en qualité de « Manager Intervenant » est désignée pour couvrir l’ensemble des composantes d’une Direction Générale. Alpexpo n’avait pas à cette époque de directeur général nommé par le Conseil d’administration suite au départ de Guy Chanal qui avaient rempli cette fonction depuis début 2009. Par avenants successifs, le contrat a été prolongé, puis poursuivi par tacite reconduction de mois en mois dans l’attente d’une décision stratégique concernant la direction générale d’ALPEXPO. Il a pris fin le 26 février 2015.

Ce qui était reproché par la justice financière à Mme Calmels :

« Dans le cadre de sa mission successivement auprès de MM. les présidents-directeurs généraux PILAUD et HABFAST ; Mme CALMELS, qui n’a jamais bénéficié d’une délégation de pouvoir, ni de signature, a effectué des opérations sur le compte bancaire de la société ALPEXPO au moyen d’une carte bancaire et de chèques. Le contrat souscrit entre la société ALPEXPO et la société· prestataire était un contrat de prestations de service et il n’a jamais été conclu ni convention tripartite entre ces sociétés et Mme CALMELS, ni contrat de travail entre elle et la société ALPEXPO, ni convention d’aucune sorte l’habilitant à se substituer au mandataire social dans les actes de la vie de cette société d’économie mixte, ou précisant les dépenses qu’elle était autorisée à engager en tant que « Manager Intervenant ».

Il n’est pas contesté que Mme CALMELS qui avait été seulement missionnée par son employeur, MCG Managers, auprès la société ALPEXPO, mais n’avait pas de lien juridique avec cette dernière, a pourtant signé, au nom de la société ALPEXPO, entre le 29 novembre 2013 et le 1er octobre 2014, neuf contrats de, travail (sept à durée indéterminée et deux à durée déterminée). Du 4 novembre-2013 au 16 décembre 2014, elle a aussi ·signé· douze marchés conclus avec différentes sociétés pour la commande de biens ou de services… »

La Chambre du contentieux considère que Mme Calmels aurait dû soumettre certains actes, notamment la signature de contrats de travail et de certains marchés, à la signature des Présidents directeurs généraux au lieu de les signer elle-même.

Sur les fautes graves reprochées aux dirigeants successifs de la société MM. Pilaud et Habfast :

« Sur les faits et les éléments retenus dans la décision de renvoi du ministère public

47. La décision de renvoi du 18 janvier 2023 susvisée considère successivement cinq catégories de faits comme éléments constitutifs d’une infraction, soit le défaut de surveillance des agissements de Mme CALMELS, le désordre constaté dans la conservation de documents comptables, voire la tenue de la comptabilité, qui ne permettrait pas d’établir avec certitude le montant de la dette dont Mme CALMELS serait restée redevable envers la société ALPEXPO, l’absence de diligences menées à terme en vue de recouvrer cette dette, des défaillances dans l’exécution du contrat de « Mise à disposition de prestations de services en Management de Transition » avec la société MCG Managers, notamment l’absence d’établissement d’une lettre de mission de Mme CALMELS, et enfin le non-respect de certaines dispositions réglementaires en matière de commande publique. »…

L’arrêt de la Chambre du contentieux se termine par :

« 52. Indépendamment des manquements poursuivis et de leur gravité supposée, dans la limite des seuls éléments relatifs à l’existence d’un préjudice financier significatif, dont la Cour est saisie, il demeure impossible d’apprécier le montant des sommes dont Mme CALMELS serait restée redevable, alors qu’il n’est pas suffisamment démontré que l’exécution du contrat passé avec MCG Managers ait constitué une dépense ayant contribué à aggraver le résultat financier de la société ALPEXPO. Il en va de même des contrats qui auraient été conclus au cours de la période non prescrite, sans avoir été précédés d’une publicité ou d’une mise en concurrence suffisantes, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu’ils auraient entraîné un préjudice financier significatif, au détriment de la société.

53. Dès lors, le préjudice financier et son caractère significatif, au sens de l’article L. 131-9 précité du code des juridictions financières, entré en vigueur le 1er janvier 2023, ne sont pas établis. Ainsi, tous les éléments constitutifs de l’infraction ne sont pas réunis. En conséquence, il y a lieu de relaxer des fins des poursuites engagées à leur encontre MM. PILAUD et HABFAST »…

Les nombreux éléments que le procureur près la Chambre régionale des comptes avaient transmis, qui ont été complétés par une instruction effectuée par un rapporteur Conseiller maître honoraire de la Cour des comptes, ne constituent selon la Chambre du contentieux, aucune faute grave au sens des juridictions financières.

Sur les circonstances

54. Il y a lieu de considérer, d’une part, que Mme CALMELS a fourni, ainsi que le conseil d’administration l’a régulièrement relevé, une importante contribution personnelle à la gestion de la société ALPEXPO, mais que, d’autre part, elle a laissé perdurer des pratiques défaillantes, marquées notamment par le mésusage de la carte bancaire de la société.

Sur l’amende

55. Il sera fait une juste appréciation de ta gravité des faits, de leur caractère répété et des circonstances de l’espèce, en infligeant à Mme CALMELS une amende de 3 500 €, soit un montant inférieur au plafond fixé par l’article L. 131-6 du code des juridictions financières. »

A noter que la Chambre du contentieux n’avait pas suivi le Procureur général près la Cour des comptes qui avait demandé des peines d’amende à l’encontre de MM. Pilaud et Habfast.  

Une analyse de cet arrêt par le cabinet d’avocats Landot ici.

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