Tribune libre

Après la vache folle, les plantes folles !

Le gouvernement vient d'accorder l'autorisation de cultiver du maïs transgénique en France. Cette décision s'accompagne d'un moratoire pour les autres plantes, mais il s'agit bien d'une porte ouverte à une technologie dont personne ne maîtrise les conséquences.

Qu'est-ce que les organismes génétiquement modifiés (O.G.M) ?

Ce sont des êtres vivants dont on a modifié l'information contenue dans les gènes, notamment en introduisant artificiellement des gènes d'organismes différents (bactéries, plantes, animaux). Ces modifications visent à donner à l'organisme modifié des "qualités nouvelles", en le rendant résistant aux herbicides ou aux insectes, ou en augmentant sa durée de conservation.

Des risques non maîtrisés

Une contamination de l'environnement peut se produire par le biais des pollens qui sont transportés par le vent et les insectes. Ainsi, le colza transgénique résistant au désherbant mis au point par la firme Monsanto et expérimenté en 97 sur la commune de St Georges d'Espéranche (38) peut se croiser avec des plantes sauvages comme la ravenelle, la moutarde... Ces plantes, considérées comme "nuisibles", pourraient à leur tour devenir résistantes à ce désherbant. Certains colzas transformés génétiquement présentent aussi des risques pour les insectes pollinisateurs tels que les abeilles et les insectes auxiliaires de l'agriculture (coccinelle).

Les risques pour la santé des consommateurs ne sont pas non plus négligeables. Les plantes génétiquement modifiées peuvent sécréter des substances allergènes. Le problème s'est déjà posé avec le soja transgénique créé par la compagnie Pioneer, qui a dû arrêter son produit.

Le maïs, lui, est très utilisé pour la nourriture des animaux mais aussi dans un grand nombre de produits destinés directement à notre alimentation (maïs doux, céréales du petit déjeuner, gâteaux apéritifs) et indirectement par le biais des industries de l'amidonnerie (plats cuisinés, soupes, sauces), les brasseries, les huileries. Le gène qui rend le maïs résistant à la pyrale (insecte parasite du maïs) est associé à un gène marqueur résistant à un antibiotique, l'amoicilline. On peut craindre que les bovins et les humains ne deviennent un jour résistant à cet antibiotique de la famille des pénicillines.

Pas de transparence dans l'information

Les essais de cultures transgéniques, comme l'utilisation des O.G.M. dans les produits alimentaires, souffrent d'une absence totale de transparence.

La commission de génie biomoléculaire, chargée de donner les autorisations pour les essais de cultures trangéniques, est dominée par des scientifiques spécialistes de la génétique moléculaire. Lorsqu'une firme reçoit l'autorisation de mettre en culture un champ expérimental d'O.G.M., les autorités locales et la population directement concernée ne sont informées que plusieurs mois après la mise en culture. Le maire de Pajay (38) a appris fin novembre 97 par la direction départementale de l'agriculture qu'un champ de colza transgénique avait été semé sur la commune en septembre 97 ! De plus, la distance réglementaire pour éviter la contamination d'autres champs de colza est faible (400 mètres).

Pour les consommateurs, même si un étiquetage se met en place, il sera impossible de contrôler la présence de produits génétiquement modifiés dans les aliments composites ou les produits agricoles importés des Etats-Unis. Nous consommons des animaux nourris avec du maïs transgénique dont l'importation a été autorisée par le gouvernement précédent. Nous sommes tous transformés en cobayes.

Une agriculture productiviste

L'essor de "l'agriculture transgénique" va favoriser une plus grande dépendance des agricultures vis à vis des firmes multinationales. Ainsi, la firme Monsanto qui produit l'herbicide Roundup met au point des plantes résistantes à ce désherbant. Les agriculteurs deviennent ainsi dépendants de la même firme pour les semences et les produits phytosanitaires qu'ils pourront alors utiliser massivement.

Les O.G.M. favorisent l'intensification de l'agriculture, qui entraîne la disparition de nombreuses exploitations agricoles chaque année. Le développement de la pyrale du maïs est le résultat d'une monoculture. Il existe un traitement biologique à la pyrale qui bénéficie de 10 ans d'expérience : le trichigrame (prédateur de la pyrale), au coût actuellement le moins cher du marché, et au taux de réussite de 95%.

Agir pour une agriculture de qualité

En Isère les paysans, écologistes et consommateurs se sont réunis dans une alliance pour défendre une agriculture durable. En juin 97, une action a été menée contre un champ de colza transgénique à St Georges d'Espéranche. Il s'agit maintenant de convaincre les agriculteurs qu'ils ne défendent pas leurs intérêts en développant les O.G.M., mais celui des firmes multinationales.

En tant que consommateur, nous avons aussi un rôle à jouer en choisissant des produits de qualité.

Hervé Prat
Les Verts Isère

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