Paroles d'élue

La Ville : un coup de jeunesse

Enseignante honoraire, au fait des problèmes d'éducation, Marie-Amélie Patras, est conseillère municipale "Enfance, jeunesse et périscolaire". Elle accompagne, en douceur, une petite révolution : la nouvelle place de la Ville dans ses actions en direction de l'enfance et de la jeunesse.

Le Rouge et le Vert : En quoi consiste votre délégation : le périscolaire qu'est-ce que c'est ?

Marie-Amélie Patras : Je m'occupe essentiellement des colonies de vacances et des classes de découverte. Il y avait aussi la gestion de la subvention plein air. Depuis cette année, elle est gérée par le conseiller au socioculturel qui était A. Helly, remplacé depuis sa démission par L. Marocco 1. En dehors de ces deux activités, je m'intéresse à la gestion des centres eux-mêmes, les travaux, la maintenance et le fonctionnement des équipements. J'appartiens également à la commission "Rayonnement et développement culturel sportif et scolaire". Cela dit ma délégation est mal dénommée, l'enfance est un vaste chantier et beaucoup d'élus sont concernés : l'adjoint à la vie scolaire, le conseiller au socioculturel et l'adjoint aux sports. Evidemment, ma délégation concerne l'enfance, mais l'appeler "enfance, jeunesse et périscolaire" ne me paraît pas informatif. Au départ, cette dénomination s'inscrivait dans un projet de travail transversal avec les autres élus. C'est vrai par certains aspects de la vie scolaire et socioculturelle mais sans refléter la réalité. Je crois que dès cet automne, il faudra revoir l'intitulé de ma délégation. C'est un peu compliqué, tout cela manque de clarté pour l'opinion publique qui ne sait pas trop ce que chacun fait.

Le R et le V : Disposez-vous d'un budget propre ?

M.-A. P. : Le service jeunesse dispose d'un budget pour les colonies de vacances de l'ordre de 5,3 M.F. et les classes de découverte de 4 M.F.. En ce qui concerne les colonies de vacances nous travaillons avec 12 ou 13 associations qui organisent elles-mêmes des séjours. Il nous faut donc les rencontrer, être parfois un peu critique par rapport à leurs propositions, discuter les prix, bref ! faire tout un travail de préparation qui dure environ quatre mois. Ensuite, en été, je me rends sur place pour visiter les centres, cela me permet de mieux comprendre le fonctionnement des associations et les besoins et désirs des enfants. Nous sommes très attentifs aux organismes qui proposent des séjours pour les adolescents et notamment des séjours à l'étranger. En ce domaine nous ne répondons pas suffisamment à ces demandes qui restent néanmoins très coûteuses. L'année dernière nous avons proposé pour les plus jeunes des séjours à la semaine qui sont très prisés par les familles, avec des activités variées, montagne, poney, théâtre Cependant je ne suis pas pour multiplier les activités à tout crin. Je constate que les enfants aiment aussi avoir du temps pour eux. En visitant un centre où de multiples activités étaient proposées, j'ai le souvenir de bateaux dormant tranquillement sur la plage, pendant que les enfants, y compris les plus grands, collaient de petits coquillages sur des feuilles de papier. D'un côté les familles ont une demande de consommation et de l'autre il y a les enfants avec une demande un peu différente, qui peut être tout simplement de vivre avec les autres. Il faut donc trouver des formules actives mais qui laissent aux enfants une place pour vivre.

Le R et le V : Quelle perception avez-vous du fonctionnement des diverses structures dans lesquelles vous représentez la Ville ?

M.-A. P. : Je trouve extrêmement intéressant de participer à des conseils d'école ou à des conseils d'administration, c'est un moyen de prendre connaissance des réalités du terrain. Je représente également la Ville à l'OMSCAG 2. Cet office municipal devrait disparaître au profit d'un conseil local de la vie associative, pour lequel une réflexion est en cours actuellement. La Ville soutiendra cette entreprise collective qui se veut un outil de dialogue inter-associatif, outil de dialogue avec la Ville aussi. Par ailleurs mes fonctions m'amènent à m'intéresser de près à la politique de la CAF 3. Je participe aux travaux du collectif "Droit aux vacances pour tous". Nous avons dernièrement rencontré la Métro 4 pour évoquer le désengagement financier de la CAF et les répercussions de cette mesure sur les budgets locaux et sur le fonctionnement des associations d'éducation populaire en charge de centres de vacances. Si la CAF maintient son orientation de désengagement, comment demain les enfants de nos villes partiront-ils en vacances ?

Le R et le V : Pensez-vous que la Ville devrait faire un effort particulier en direction du périscolaire, et dans ce cadre quelles sont vos priorités ?

M.-A. P. : Je crois que la Ville a tout intérêt à avoir une politique très déterminée en direction de l'enfance et de la jeunesse et plus précisément de la tranche d'âge des 10-15 ans qui pose d'énormes problèmes. Les actions engagées ne relèvent pas seulement du bon vouloir financier, elles doivent s'accompagner d'une réflexion approfondie et d'un engagement de tous les acteurs. Dans le cadre des contrats d'aménagement du temps de l'enfant (CATE) certaines écoles effectuent un travail en articulation avec les équipements socioculturels en faveur des enfants d'âge scolaire. Nous allons développer ces actions, mais cela ne résoud pas le problème des 10-15 ans. Concernant les colonies de vacances, je trouve l'outil bien adapté, il est rodé et fonctionne bien, d'autant qu'à notre arrivée nous avons, avec 500 000 F de plus, augmenté le budget de manière importante. Quant aux classes de découverte, je crois qu'il est indispensable de mener une réflexion en relation avec les enseignants et l'Education nationale pour préciser les besoins. En automne 1995, nous avions entamé un travail en ce sens, que la terrible catastrophe du Drac a brusquement interrompu. Nous devons reprendre cette réflexion. L'outil que la Ville met actuellement à disposition des écoles, à savoir des centres permanents, est très apprécié, mais les écoles n'ont pas le choix des dates. Les destinations sont imposées. Il existe des opportunités nouvelles qui peuvent être développées avec le soutien de la Ville. Je pense par exemple au réseau des fermes buissonnières, à la mise en place des parcs régionaux ou encore aux échanges scolaires hexagonaux ou internationaux. La Ville a des contraintes fortes de gestion. Il faut réfléchir à la manière dont elle peut moduler son aide.

Le R et le V : Cela veut dire moins d'équipements lourds à gérer pour la Ville ?

M.-A. P. : Exactement, je pense en effet qu'il faudrait que la Ville n'ait pas trop de contraintes de gestion propre pour pouvoir répondre à la demande des écoles d'une manière plus souple. Il est vrai qu'à l'époque où elle a créé ses services vacances et classes de découverte, il n'y avait pas de proposition du milieu social et associatif. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. De nombreuses associations compétentes offrent leurs services. La Ville doit aider le tissu associatif indispensable à la respiration collective sans se substituer à lui quand il répond aux besoins. Il faut ajouter que les contraintes de sécurité deviennent très fortes et que le niveau des diplômes requis pour encadrer des activités est de plus en plus élevé. Tout ceci pose de nombreux problèmes.

Propos recueillis par J.-M. C.


1 Cf. Le Rouge et le Vert n· 59, p 2
2 OMSCAG : Office municipal socioculturel associatif grenoblois
3 CAF : Caisse d'allocations familiales
4 Métro : communauté de communes de la région grenobloise