Si c’est légal, est-ce pour autant conforme aux principes démocratiques ?

Publié le 6 avril 2008

La loi organisant les élections municipales a été construite sur une formule proportionnelle donnant une prime électorale à la liste majoritaire au premier tour ou arrivée en tête au second tour. Après des années où la liste majoritaire raflait la totalité des sièges, cette réforme est intervenue à la fin des années soixante-dix, afin d’introduire de la proportionnelle tout en maintenant une prime majoritaire (la liste arrivée en tête se voit attribuer automatiquement 50% des sièges) pour que les grandes communes urbaines restent « gouvernables ». C’est l’argument qui nous est servi habituellement.

A Grenoble, pour la première fois la liste arrivée en tête du second tour ne passe pas la barre des 50%. Cependant avec une minorité de 48% des voix, la liste nouvelle droite-gauche de Michel Destot obtient 74,6% des sièges. La vieille droite, avec 29,5, 15,3% des sièges et la gauche et les écolos, avec 22,5 % des voix, seulement 10,2% des sièges. C’est ce que l’on appelle, en France, l’équité démocratique.

résultats des élections municipales 2008 nombre d’élus

A cette situation qui illustre bien «les bizarreries» démocratiques (c’est un euphémisme) du pays des droits de l’homme et du citoyen s’ajoutent bien d‘autres incongruités et d’autres dénis démocratiques qu’il serait trop long de recenser ici.

Trois de ces dénis démocratiques, quasiment uniques en Europe, peuvent être soulignés ici.

Tout d’abord l’absence de droit de vote et d’éligibilité des résidents étrangers non communautaires aux élections locales. Une promesse du candidat François Mitterrand en 1981, cela fait… 27 ans déjà !

Ensuite, le cumul des mandats. La France reste le pays des cumulards, cumulards dans l’espace (député, conseiller régional, conseiller général ou conseiller municipal auquel il faut ajouter le quasi-mandat de conseiller communautaire d’agglomération) et dans le temps (on peut faire 2, 3, 4, 5 mandats ou plus, en suivant). Au conseil municipal de Grenoble, nous avons quelques beaux spécimens de cumuls : deux députés dont le député-maire, quatre conseillers généraux, plusieurs conseillers régionaux). Pour justifier de telles pratiques, l’argument de l’accès ainsi facilité aux ressources budgétaires pour le bénéfice de la ville est fréquemment utilisé. C’est pourtant pour le moins illusoire sauf lorsqu’on devient ministre. Cela ne saurait peut-être tarder en ces temps d’ouverture. Un poste de ministre des montagnes pour préparer les JO de 2018.

Enfin, plus grave, dans les collectivités territoriales (commune, conseil général, conseil régional), depuis les lois de décentralisation du début des années quatre-vingt, le maire ou le président cumule la direction de l’exécutif et du délibératif. Une telle situation aberrante n’existe pas au sommet de l’Etat et elle n’existe quasiment pas au niveau local dans les autres pays européens. Cette situation est contraire au principe de séparation des pouvoirs posé par Montesquieu et sanctuarisé par la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : Art. 16 « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ».

Va-t-on devoir recourir aux tribunaux européens ? Il le faudra si nous voulons continuer à donner des leçons de démocratie au reste de la planète !

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