Candidature aux JO, les raisons d’un échec cuisant, pour le maire, sa majorité et la droite

Publié le 25 mars 2009

jo-2008-greLe 6 octobre 2008, lors du grand show organisé pour que le Conseil municipal apporte un soutien massif à la candidature de Grenoble, seuls les six élus du groupe Ecologie et Solidarité ont osé voter contre la candidature de Grenoble, malgré un matraquage médiatique indigne d’une démocratie. Les 53 autres élus de la majorité et de l’opposition de droite se sont tous retrouvés, aux côtés de tous les notables locaux et des patrons isérois,  pour se lancer à corps perdu dans la candidature à la candidature.

Le mercredi 18 mars 2009, le résultat du vote du CNOSF a été cinglant pour la délégation grenobloise : Annecy 23, Nice 10 et Grenoble seulement 9 voix. L’affaire était donc réglée en un seul tour de vote  et Grenoble n’est arrivée qu’en troisième position sur les quatre candidatures françaises !

L’échec est d’autant plus cuisant pour le maire et ses proches que le 13 mars, le comité d’évaluation avait rendu un rapport qui plaçait Grenoble en première position, très légèrement devant Annecy : tout laissait à penser que le résultat serait très serré.

Voici les raisons de cet échec.

L’analyse des tenants de la candidature grenobloise : les mauvaises raisons !

Lors de la réunion du conseil municipal le 23 mars, le maire, Gilles Dumolard, Président de la CCI et le cercle restreint des responsables du dossier n’ont su fournir  qu’une explication : la victoire de Grenoble aurait été volée.

A partir de là, tout n’est qu’insinuation : avant même la réunion du conseil d’administration du CNOSF,  un sondage aurait indiqué que Grenoble  allait atteindre la majorité absolue des votants  (des membres du CNOSF auraient ils été ainsi pressentis ?) ; puis, il y aurait eu des votes préliminaires qui se seraient déroulés jusqu’à ce que le résultat final soit obtenu (sous entendant des manœuvres pour fausser le vote) ; autre insinuation : la candidature de Grenoble, trop crédible, devait être éliminée pour ne pas empêcher une prochaine candidature française à des JO d’été à laquelle la majorité du CNOSF aurait été favorable ! Geneviève Fioraso n’a-t elle pas relevé, juste après le vote du CNOSF qu’ Annecy ne tiendrait pas la route à l’international ?

Tout ceci est digne d’un roman policier : un complot contre Grenoble en quelque sorte ! Un vrai délire sans aucun élément de preuve consistant. Comment comprendre qu’en septembre 2008 le CNOSF décide qu’il est important qu’il y ait une candidature française aux JO d’hiver 2018 et  six mois après, qu’il faut la saboter ? Aucun membre du CNOSF ne s’est exprimé un tant soit peu en ce sens.

Cette histoire démontre plutôt que les responsables de la candidature ont vécu dans un cocon, coupé des réalités. Que la victoire leur était promise et qu’elle leur a été volée ? Mais n’étaient ils pas les seuls à être si sûrs de leur coup ?  Là, le maire perd tout sens de la mesure et des réalités grenobloises ; et lorsqu’il déclare que ceux qui ont joué contre Grenoble n’ont pas eu un comportement républicain, et, selon ses propos rapportés par le Dauphiné Libéré, qu’il n’oubliera pas ceux qui, d’après lui et son entourage,  ont  oeuvré contre les intérêts de la ville, il se discrédite honteusement.

A force d’agir en vase clos, dans le secret  et la pseudo confidentialité des initiés, le maire, sa majorité et les responsables de la candidature se retrouvent pris dans leur propre délire ; au lieu d’essayer de faire croire à une conspiration, ils devraient plutôt se pencher un peu plus sur des réalités concrètes que tout  citoyen grenoblois est en mesure d’appréhender.

Les nombreuses bonnes raisons

  • Dans le dossier d’évaluation de la candidature de Grenoble, plusieurs points faibles avaient été recensés. Le comité d’évaluation s’interrogeait sur la réalité d’affirmations qui  pouvaient paraître excessives : les JO s’annonçaient sans voiture (alors qu’il y avait un effort important dans les voiries : passage à 2×2 voies de la route Grenoble-Bourg d’Oisans, rocade nord), l’aéroport  devaient être agrandi (avec, certainement, la bénédiction des riverains !) ; il était également pour le moins douteux que les nombreux logements construits par le privé seraient transformés en logement social. Autre motif, plus que probable, de doute pour le CNOSF : le fait que Grenoble était la seule ville qui n’avait pas réalisé de sondage d’opinion récent (le dernier datant de 2005) sur cette candidature, alors que c’était la ville où la contestation s’était le plus fortement exprimée : or, ce point aurait été très sensible pour le Comité international olympique (CIO) et  les membres du  CNOSF qui a été abondamment arrosé par les contestataires,  ont forcément dû émettre des doutes quant au niveau réel de l’adhésion populaire à cette candidature.
  • Tout a été fait dans le plus grand secret. Le dossier a été préparé par un cabinet noir. Durant le mandat municipal précédent (depuis plus de 3 ans), des préparations secrètes avaient lieu sans que les élus ne soient au courant et c’est vraiment à partir de mars 2008, avec le dernier avatar du mandat de Michel Destot , que l’affaire a émergé au grand jour.   Au conseil municipal du 6 octobre 2008, il est demandé aux élus de voter sur un dossier dont ils n’ont pas eu communication, malgré les demandes du groupe Ecologie et Solidarité. Les raisons évoquées pour ne pas fournir le dossier étaient évidemment fallacieuses (il faut réserver la primeur du dossier au CNOSF !), en fait tout se passait comme si il y avait des choses à cacher aux Grenoblois qui en même temps subissaient de la part de tous les medias locaux une avalanche de propagande sans justification réelle.
  • Les Jeux de neige en décembre 2008, présentés comme une sorte de préliminaires des JO,  ont été une caricature de fête et là aussi beaucoup de choses ont été camouflées, notamment le financement et le coût réel. De nombreux Grenoblois ont commencé à sérieusement s’inquiéter de la dérive financière liée aux JO. Et comme au même moment il y a eu la décision d’augmenter les taux des impôts locaux (de 9 % !) avec des explications peu convaincantes, la crainte justifiée de l’impôt JO s’est manifestée et n’a cessé de croître parmi la population.
  • Un lobbying contre productif : massif et politique. Immédiatement après le vote du CNOSF, certaines langues se sont déliées, notamment celle du président du comité départemental olympique de l’Isère (CDOSI) qui a déclaré que l’échec n’était pas celui de Grenoble mais bien de Michel Destot. Les propos de Jean Claude Killy et de David Douillet ont laissé entrevoir certains défauts du lobbying Grenoblois. Tout a fait surprenante fut la présence du préfet de l’Isère dans la délégation grenobloise au CNOSF le 18 mars, dans aucune autre délégation le préfet ou son représentant n’étaient présent. Que le représentant de l’Etat es-qualité accompagne la délégation est incompréhensible. La candidature grenobloise apparaissait alors comme une candidature officielle soutenue par le Gouvernement, quelle maladresse politique !
  • Une arrogance qui a été mal reçue. La ville se présentait comme celle qui savait mieux faire que les autres et qui avait une légitimité naturelle puisqu’elle avait déjà organisé des Jeux. Dans les médias, l’écart entre la modestie de la candidature d’Annecy et l’arrogance grenobloise était manifeste. On ne mène pas une candidature à la candidature comme une campagne électorale pour les municipales où toutes les promesses sont bonnes pour attirer le gogo. Enfin, tous les médias ont souligné l’attitude de mauvais perdant de la délégation grenobloise quittant le CNOSF après le vote. Didier Migaud s’est vite retiré et l’absence d’André Vallini a été remarquée.

Une attitude ambiguë de la Métro et du Conseil général de l’Isère

  • La Métro : il était clair que la manière dont était menée la candidature grenobloise n’emportait pas l’enthousiasme de la Métro ni de beaucoup de maires de l’agglomération et encore moins de leurs conseils municipaux. Le soutien financier chichement décidé pour les Jeux de neige en était l’indication la plus nette. Au tout dernier moment, le Conseil de Développement de l’agglomération grenobloise a été sollicité pour soutenir la candidature – soutien qui  ne put être apporté par l’ensemble de ses membres, divisés sur le sujet, mais seulement par le bureau de ce Conseil – comme quoi certains devaient déjà penser qu’il y aurait des difficultés pour passer.
  • Le conseil général de l’Isère – CGI : l’absence systématique du président Vallini sur ce dossier était clairement affichée. Le soutien du CGI était porté par le directeur général des services, c’est-à-dire par l’administration et non par l’exécutif du département contrairement aux autres candidatures. Evidemment cela permettait toutes les interprétations, notamment que le soutien du département n’était que formel.

Conclusion

Il s’agit d’abord d’un échec personnel du maire qui a voulu calquer la gestion de cette candidature sur la façon dont il a organisé son pouvoir dans la ville. Toutes les décisions stratégiques sont prises en secret et dans un petit cercle, il est sourd aux critiques. Le débat public n’aura lieu qu’après les décisions…

C’est aussi l’échec de toute une équipe qui se voyait déjà en haut de l’affiche. Nombreux, dans la majorité municipale, sont ceux qui ne regrettent pas que la ville ne soit plus candidate, mais évidement ils le disent en privé, la loi du silence est la règle aujourd’hui à l’hôtel de ville. La démocratie représentative est bien malade lorsque l’omerta s’impose.

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2 commentaires sur “Candidature aux JO, les raisons d’un échec cuisant, pour le maire, sa majorité et la droite”

  1. Triolle Ph dit :

    En plus de ce qui est écrit ci-dessus concernant « l’échec de la candidature » qui est un succès pour les finances publiques, peut-être peut-on penser que si les juges se sont un peu promenés à Grenoble et alentour, ils ont pu constater l’état de crasse dans lequel se trouve la ville, notamment les délaissés des services de nettoiement, démontrant que l’idée de jeux propres est une bouffonnerie.
    Présenter une ville et une agglomération agréables à regarder pourrait être un préalable à toute opération de communication et de promotion et cela aurait l’avantage d’en faire profiter les habitants contribuables, notamment ceux des périphéries qui sont souvent oubliés et qui n’ont pas droit à toutes les attentions paysagères des édiles, réservées à des centres-villes bien circonscrits et aux abords des Hôtels de ville. Je pense par exemple à l’affichage publicitaire qui ne respecte pas les obligations légales d’une loi pourtant bien trop permissive à l’égard des afficheurs. Je pense aussi aux monceaux de détritus qui souillent les bords de route – rocade sud notamment mais pas seulement hélas – aux friches qui pourraient rester des friches, pourquoi pas, un peu de « sauvagitude » ne nuisant pas, mais propres.
    Sur ce plan là, cela ne doit pas forcément être plus brillant à Nice ou à Annecy, nous sommes en France, mais cela aurait pu être un facteur sur lequel insister et ceci au bénéfice des populations et des gens de passage, jeux ou pas jeux.

    Philippe Triolle

  2. admin dit :

    Concernant l’affichage publicitaire, l’association Paysages de France travaille beaucoup sur ces questions, et a notamment permis à Grenoble le démontage du panneau géant de l’entrée de Comboire.