La précarité et le financier

Publié le 6 avril 2012

(photo GK)

Quel est donc le rapport entre le CCAS (Centre Communal d’Action Sociale) de Grenoble et le Comité des Banques de l’Isère ? Voilà une question légitime à l’heure où l’on apprend que le Maire pour l’un et le président départemental pour l’autre, viennent de signer « une convention de partenariat pour renforcer les relations entre les banques et les acteurs sociaux ». A priori on ne voit pas très bien de quelles relations il s’agit, mais admettons ! Par cette convention, nous dit-on, « les banques et la ville marquent leur volonté d’agir ensemble auprès des publics fragiles, particulièrement dans un objectif de prévention ». Agir « auprès des publics fragiles » étant la raison même de son existence on ne sera pas étonné venant du CCAS. Mais les banques ? Auraient-elles, par un excès de soudaine compassion décidé de distribuer quelques surplus de leurs réserves aux plus pauvres ? Seraient-elles devenues philanthropes ? Evidemment non ! Alors pour mieux comprendre il faut se pencher sur les quatre axes qui fondent le partenariat ville-banques :

« -Améliorer la connaissance mutuelle et les contacts entre les réseaux bancaires et les acteurs sociaux de la ville.

-Permettre aux acteurs sociaux de mieux accompagner les personnes en difficulté dans leurs démarches auprès des banques.

– Donner accès aux acteurs à une base complète d’informations sur la banque (guides pratiques, supports de formation…)

– Renforcer la prévention par la complémentarité des actions du CCAS et de la profession bancaire »

Il est en effet intéressant de savoir « bien utiliser sa carte bancaire » ou « des prélèvements » comme le propose par exemple la base d’informations sur la banque (axe 2), surtout quand on dispose de peu de ressources.

On ne voit toujours pas l’intérêt du CCAS dans cet accord, en revanche on comprend beaucoup mieux celui des banques pour lequel il est exclusivement conçu. En résumé ce pourrait être « sus aux mauvais clients » pauvres bien entendu, puisqu’aux yeux des banques on ne trouve aucun mauvais client chez les riches.

Il existe depuis de très nombreuses années (dès après guerre) des actions menées par des travailleurs sociaux d’associations et aujourd’hui du Conseil général pour venir en aide aux ménages et familles dans la gestion d’un budget qui se résume le plus souvent aux seules prestations familiales. Pour offrir un peu de répit aux personnes en grandes difficultés matérielles on a parfois recours aux plans de surendettement qui ont littéralement explosé ces dernières années. Mais l’une des interventions essentielles des travailleurs sociaux consiste à apporter une protection face aux organismes de crédits à la consommation, aux cartes de crédits à hauts taux « généreusement » distribués par les grands groupes de consommation et de crédit, sans qu’aucune banque ou comité de banques ne s’en émeuve. S’inquiètent-elles ces banques de l’attitude de leurs agences qui rejettent les demandes d’ouverture de comptes ou excluent certains clients pour cause de revenus insuffisants? Il est assez saugrenu de les voir se poser en donneurs de leçons de gestion alors qu’elles sont à l’origine de la crise financière mondiale.

De son côté si le CCAS souhaite assurer sa mission de protection des « personnes fragiles », il a tout intérêt à ce que ses « acteurs sociaux» se rapprochent de ceux qui exercent déjà ce type d’actions, sans avoir jamais eu besoin des banques. Autrement dit, les acteurs sociaux du CCAS ont de bonnes raisons de se défier pour ne pas être transformés en auxiliaires des banques comme celles-ci semblent l’avoir rêvé en signant cette convention. Et ce n’est pas parce que certaines villes ou associations ont succombé que Grenoble devait suivre. Il n’est pas interdit de s’engager dans une autre voie.

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