Manger Malin poursuit sa marche de pub…

Publié le 9 mars 2013
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Une belle surprise dans un récent message de la CAF (Caisse d’Allocations Familiales) que cette publicité « manger malin » parvenue au domicile de parents d’enfants de moins de 3 ans, dont certains nous ont interpellé pour exprimer leur étonnement, voire leur grand mécontentement. Renseignements pris auprès d’une Maison des Habitants : cette offre s’adresse désormais à toutes les femmes enceintes et parents d’enfants âgés de moins de 3 ans, sans conditions de ressources.

Quoi de plus facile pour la CAF, qui dispose d’un fichier presque exhaustif, que de relayer cette publicité.

Pour comprendre les enjeux il faut savoir, qui, fait quoi, et comment

Le Centre communal d’action sociale – CCAS et la CAF ont confié la gestion de ce dispositif, financé par la Fondation Danone, à la Croix Rouge. Le conseil général dont la promotion de la santé du jeune enfant est l’une des missions, se contente d’informer les familles, sans plus. « Manger Malin » consiste à donner des chèques de réduction pour l’achat de produits d’alimentation infantile : lait 2ème âge, lait de croissance, des petits pots salés et compotes pour les enfants de 0 à 3 ans. Il est également possible d’avoir accès à des paniers hebdomadaires de fruits et légumes frais, par l’intermédiaire des AMAP (paniers solidaires), 4 tarifs selon quotient familial, allant de 4 à 9 €, pour 3.5 kg de légumes et fruits, issus de l’agriculture raisonnée.

Le courrier adressé aux familles est TRES MALIN…

Alors que d’autres marques devaient s’associer à ce dispositif mis en place à Grenoble par le Vice Président du CCAS avec le soutien de Martin Hirsch, nous constatons qu’il ne fonctionne qu’avec « Blédina », fabriqué par… Danone. Ces bons de réductions d’un montant de 315 €/an, ne sont utilisables que dans certains magasins sélectionnés. Ils sont destinés aux enfants âgés de 6, 12, 16, 20 mois. De 0 à 6 mois et de 24 à 36 mois, «manger malin» offre des conseils, ce qui n’est pas très nourrissant !

Et ce n’est pas tout… Dans un précédent article, nous avions relevé le côté publicitaire de cette opération. Ce nouveau papier le confirme.

Les préoccupations immédiates des parents d’un nouveau né, sont, l’alimentation du 1er âge, le sommeil, les pleurs, l’éveil, éventuellement le mode de garde. L’alimentation après ses 6 mois de vie est rarement l’inquiétude du moment. Mais en proposant d’emblée le lait 2ème âge Blédina, la ruse consiste à ce qu’ils s’orientent vers du lait 1er âge de la même marque, sauf en cas d’allergie. Etant proposé avant la naissance, l’idée fait son chemin et le tour est joué. N’est ce pas le principe même du conditionnement publicitaire ?

Une autre question nous taraude. Depuis quand des services publics, la CAF notamment, peuvent ils utiliser le fichier des familles, pour inciter des parents à acheter telle ou telle marque de produits pour bébés, ou encore orienter les parents vers les magasins choisis par qui : la Croix Rouge ?, le CCAS ?, la CAF ?, aux dépens des commerces qu’ils fréquentent habituellement ? Au départ, ce dispositif devait s’adresser aux familles en situation de précarité, mais lorsque ce document est distribué à l’ensemble des futurs parents ou parents, tout devient différent.

Nous continuons d’exprimer notre étonnement et notre désapprobation sur de tels procédés un peu pervers : sous un prétexte d’aide aux plus démunis on aboutit à la promotion de produits d’une multinationale de l’agroalimentaire. Quant à l’argument « cette firme ne fait aucun bénéfice sur les produits proposés », personne n’est naïf au point de croire que cette générosité soit totalement désintéressée.

Des questions et une remarque

  • N’est-il pas contradictoire  d’inciter les familles à acheter des paniers solidaires de fruits et légumes, tout en les encourageant à acheter des plats préparés ?
  • Pourquoi cette multinationale de l’agroalimentaire n’offre-t-elle pas des aides financières conséquentes aux organismes caritatifs qui créent également des épiceries solidaires et s’inquiètent des baisses des aides de l’Europe ?
  • Enfin, l’entreprise Danone vient d’annoncer une vague de licenciements sur l’ensemble de son groupe, dont plusieurs centaines en France. Lorsque les parents « chômeurs Danone » seront en fin de droit, ils pourront toujours demander à entrer dans le dispositif « manger malin » le plus près de chez eux.

Dans notre pays il existe un réel et grave problème de malnutrition. Il concerne enfants et parents de nombreuses familles en situation de précarité. Voilà pourquoi, nous continuerons à demander une authentique répartition des richesses, autrement que sous la forme de « charité-business » !

Cette multinationale peut légalement effectuer des dons financiers au CCAS de la ville de Grenoble. Cette aide permettrait aux ménages à faibles ressources, d’accéder à des produits frais locaux. De même, puisque tous les établissements d’accueil de jeunes enfants sont dans l’obligation de participer à ce dispositif, cette contribution financière devrait favoriser les visites de fermes pour tous les enfants accueillis, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Autre suggestion : Augmenter le nombre de cours de cuisine. Ces moments d’échanges de savoirs, permettent d’apprendre la confection de plats peu onéreux et savoureux, ainsi que l’équilibre alimentaire. Ce sont de vrais espaces de convivialité, facteurs d’amélioration d’un lien social durable.

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