Rétablir la confiance des Français dans la vie démocratique. 50 propositions pour un tournant délibératif de la démocratie française

Publié le 4 mars 2022

Il s’agit du titre d’un rapport rendu, le 21 février, au Premier ministre par l’ancien président du Cese (Conseil économique social et environnemental), M. Bernasconi. Il lui était notamment demandé de réfléchir aux scénarios d’évolution institutionnelle permettant à la participation citoyenne de trouver sa place dans les institutions comme méthode d’action publique. Cette mission devait notamment s’appuyer sur :

  • un état des lieux des différents dispositifs participatifs ou délibératifs en France, aux niveaux national et local, ainsi qu’une identification des éventuels freins réglementaires ou opérationnels à leur mise en œuvre ;
  • une typologie des acteurs de la participation devait préciser leur périmètre d’action, les modalités de saisine, les méthodologies et les outils et moyens mobilisés ;
  • une analyse, qualitative et quantitative, de l’impact des démarches participatives sur la qualité des décisions publiques et le fonctionnement de la démocratie.

Parmi les 50 propositions faites dans le rapport, plusieurs visent à donner un second souffle aux dispositifs de participation locale. Le rapporteur suggère notamment une révision des instances locales de participation citoyenne (conseils citoyens, conseils de jeunes, conseils de quartier, comités consultatifs…) et offrir un véritable cadre juridique aux budgets participatifs en plein essor.

« La mission propose la mise en place d’un véritable « cycle délibératif national » L’analyse rigoureuse du déroulement du Grand débat national (GDN) comme de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) fait bien apparaître l’intérêt de conduire de tels exercices, tant pour améliorer la qualité des décisions prises par le gouvernement et la représentation nationale (fonction épistémique), que pour favoriser une culture de l’écoute et de l’échange rationnel et pacifique d’arguments (fonction éthique) ou encore pour inclure davantage nos concitoyens dans la délibération sur la chose publique (fonction inclusive). Ces trois fonctions permettent de résorber une partie de la fracture entre citoyens et démocratie représentative et contribuent à réparer la confiance dégradée des Français dans leurs institutions ainsi que dans la vie publique.

Cependant, dans les deux expérimentations que furent le GDN et la CCC, c’est la sortie du processus qui a été la plus dysfonctionnelle, faute d’avoir pensé une véritable méthodologie de la reddition de comptes ainsi qu’une bonne articulation avec les institutions de la démocratie représentative, à commencer par le Parlement.

La mission demeure, à l’issue de ses auditions et de ses investigations, convaincue que l’institutionnalisation maîtrisée d’un « cycle délibératif national » comportant des éléments participatifs et délibératifs serait de nature à améliorer la confiance que les représentés témoigne à l’égard de leurs représentants mais aussi à revigorer la démocratie représentative. Pour ce faire, il est besoin de penser un dispositif d’association des citoyens à la décision publique qui remplisse trois conditions :

  • une combinaison de séquences participatives et de séquences délibératives. Comme l’écrit M. Éric Buge, cela revient à se mettre à la recherche « du diamant de Micromegas , qui permettrait de faire participer chaque citoyen à un processus délibératif global, de faire entrer en relation nombre de participants et qualité de la délibération. »
  • Une institutionnalisation du déclenchement d’un tel cycle d’action publique, la mission estimant que cette initiative doit être partagée entre le Gouvernement et le Parlement, chacun disposant d’un droit égal d’initiative;
  • une clarté quant au caractère non décisionnaire des préconisations formulées par les citoyens, tant durant la phase participative que durant la phase délibérative, le dernier mot devant rester au Parlement qui conserve le monopole du vote de la loi. Pour autant, les préconisations émanant d’un cycle participatif et délibératif d’action publique ne sauraient être des recommandations purement consultatives. Elles ont une valeur d’orientation par rapport à laquelle le Parlement et le Gouvernement auraient à se positionner et à rendre des comptes…

Les différentes phases d’un « cycle délibératif national » efficace et inclusif

Comme l’a relevé la mission, le GDN comme la CCC ont été conçus comme des expérimentations ponctuelles, dont la gouvernance et la méthode ont été construits largement in itinere. Si l’on veut renouveler ce genre d’expérience, il semble nécessaire de penser une institutionnalisation a minima de la démocratie participative/délibérative comme composante de la démocratie nationale. Cette inscription institutionnelle devra respecter les conditions suivantes :

  • pour éviter le caractère ponctuel, d’opportunité ou discrétionnaire du déclenchement, il conviendra de formaliser, clarifier et stabiliser les modalités de déclenchement d’un exercice participatif ou délibératif d’envergure nationale
  • la mission recommande de combiner une séquence « participative » à large spectre avec une séquence « délibérative » plus qualitative, en formation plus retreinte. Comme l’a bien montré M. Éric Buge, on perd souvent en qualité délibérative ce que l’on gagne en volume participatif ; d’où l’intérêt de raisonner sous la forme d’un cycle délibératif complet d’action publique conjuguant les deux démarches
  • la mission préconise enfin d’entourer ce cycle délibératif d’action publique d’un ensemble de garanties procédurales et méthodologiques, notamment en matière de reddition de comptes, qui en assurent la qualité et évitent de reproduire les erreurs du GDN ou de la CCC. »

rapport_de_m._patrick_bernasconi_-_retablir_la_confiance_des_francais_dans_la_vie_democratique.pdf

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