Analyse des résultats du 1er tour des élections régionales, notamment à Grenoble

Publié le 18 mars 2010

V. Comparat nous propose une première analyse des élections régionales et les conséquences pour l’avenir politique à Grenoble.

Les résultats sont conformes aux grandes tendances nationales mais avec toujours une exception grenobloise de plus en plus marquée. L’ADES avait indiqué avant l’élection que si le score du PS passait en dessous de 32 % à Grenoble ceci signifiait une lourde sanction pour le maire et sa majorité « droite-gauche ». Avec seulement 27,5 % la sanction est très sévère. Les conséquences pour l’avenir sont importantes et les écologistes et leurs alliés ont les cartes en main pour devenir le ferment d’une nouvelle majorité politique vraiment de gauche et écologiste, capable d’offrir une alternative efficace face aux errements de la majorité « droite-gauche » de M. Destot, dont le rejet est de plus en plus marqué.

L’enjeu pour Europe Ecologie est maintenant de se construire comme un véritable mouvement, capable d’exister, d’être force de proposition et d’action, et d’ancrer durablement l’écologie politique à gauche dans le paysage français, au-delà des seuls rendez-vous électoraux. Et à Grenoble comme ailleurs qu’elle s’associe avec toutes celles et ceux qui veulent que ça change.

L’ADES quant à elle va continuer, comme elle l’a toujours fait, à travailler avec toutes les forces de gauche, écologistes et alternatives, afin de continuer à faire progresser concrètement dans notre agglomération les valeurs de démocratie, d’écologie et de solidarité.

Une abstention très inquiétante

Abstention National Rhône Alpes Isère Grenoble
Régionales 2004 39,2 % 40,1 % 39,8 % 41,1 %
Régionales 2009 53,6 % 56,8 % 57,0 % 57,7 %
différence 14,4 % 16,7 % 17,2 % 16,6 %

L’abstention atteint des niveaux record, ceci a été abondamment commenté dans les médias. La plupart des citoyens ne connaissent pas la Région et à quoi elle sert, en 2004, les élections régionales étaient couplées à des cantonales ce qui a tiré un peu la participation, notamment en dehors des agglomérations où le rôle du Conseiller général est assez connu.

A Grenoble, mais c’est valable partout, il y a environ ¼ des électeurs qui avaient voté aux municipales de 2008 qui ne se sont pas déplacés. L’abstention a toujours une caractéristique sociologique. Traditionnellement les bureaux de vote des quartiers paupérisés voient une plus forte abstention que dans les autres bureaux. A Grenoble moins de 30 % des inscrits sont allés voter à Mistral, Teisseire et Village olympique ! Dans ces quartiers de nombreux résidents n’ont pas le droit de vote, d’où une sous expression manifeste des habitants de ces quartiers et une sous représentation au niveau des élus. Ces quartiers se sentent de plus en plus abandonnés, bientôt ils ne voteront plus, se mettant en marge du système de démocratie représentative…

Face à ce déficit de participation, il faut d’urgence inventer une autre façon de faire de la politique et ne pas se contenter de croire que l’élection suffit à légitimer une politique pour la durée d’un mandat. La démocratie représentative est en crise, il faudra bien que les élus en tire rapidement les conséquences et construisent des modes de décision politique adaptés à cette réalité.

Une avancée très importante du vote à gauche

C’est la première fois qu’au niveau national, les votes de gauche et d’extrême gauche dépassent les 50 %. Il y a une vraie sanction politique de la politique de Sarkozy.

Total Gauche National Rhône Alpes Isère Grenoble
Régionales 2004 45,8 % 46,8 % 52,5 % 59,0 %
Régionales 2010 53,5 % 53,4 % 58,4 % 66,1 %

L’UMP plonge à 26,3 % démontrant l’erreur de ne pas présenter une offre politique diversifiée. Le Front National remonte par rapport aux derniers scrutins, mais n’atteint pas les scores des précédentes élections régionales.

Extrême droite National Rhône Alpes Isère Grenoble
Régionales 2004 16,1 % 19,9 % 18,4 % 12,0 %
Régionales 2009 12,8 % 14,0 % 13,1 % 8,9 %

Contrairement à ce qui a été dit au niveau national, il n’y a pas de poussée du parti socialiste par rapport au scrutin des régionales de 2004, et à Grenoble il y a un vrai recul. En 2004 la plupart des listes régionales menées par le PS étaient aussi avec le PC et les Verts. Dans le tableau ci-dessous est indiqué la somme des pourcentages du PS et du Front de gauche (PC + Parti de gauche). Pour 2004 il a été enlevé environ 6 % comme estimation du vote écologiste s’il avait été autonome. Pour la région Rhône Alpes il y avait en 2004 une liste autonome des Verts ce qui rend la comparaison plus facile.

Vote PS + FG National Rhône Alpes Isère Grenoble
Reg 2004 Estimation 35,5 % 32,2 % 36,3 % 39,9 %
Reg 2009 35,6 % 31,7 % 35,0 % 35,7 %

En fait la poussée de la gauche vient du vote important pour Europe Ecologie. En 2004, la liste des Verts avait déjà fait un score important, le rassemblement Europe Ecologie, après le grand succès des européennes démontre que l’écologie politique devient une force politique incontournable. Avec toujours l’exception grenobloise où le travail de terrain de l’ensemble des composantes écologistes depuis des années paye et fait reculer le vote PS.

Vote écologiste National Rhône Alpes Isère Grenoble
Régionales 2004 Estimation
6,0 %
10,1 % 11,1 % 13,7 %
Régionales 2010 12,2 % 17,8 % 19,3 % 26,5 %

A noter que dans l’ensemble de la Métro (les 27 communes), Europe Ecologie vient en 2ème position derrière le PS et devant la droite.

Les leçons des élections régionales à Grenoble

Après les municipales de 2008 et les européennes de 2009, ces élections régionales étaient un test important pour savoir si la stratégie politique du maire de Grenoble avec son ouverture à droite et l’éviction des écologistes était validée ou non par l’électorat. Les européennes n’étaient pas une mesure suffisante au niveau local car l’effondrement du vote PS était d’abord national. L’ADES avait démontré à l’époque que le recul du PS à Grenoble était plus important qu’au niveau national, indiquant une certaine sanction du maire et de sa majorité droite-gauche.

Les résultats des régionales à Grenoble montrent une double sanction :

  • Sanction contre la droite : l’UMP s’effondre en dessous de 20% des exprimés et le Front national reste nettement en dessous des 10 %, niveau nécessaire pour être présent au conseil municipal.
  • Sanction très nette vis-à-vis du PS. Le tract de dernière minute du maire appelant à voter pour Queyranne au premier tour a fait l’effet du baiser qui tue. Le niveau de vote du PS est très très bas avec 27,6 %. Au niveau national le PS représente plus de la moitié des voix de gauche, à Grenoble il dépasse difficilement les 40 %. Pire, dans 4 cantons sur 6 il est devancé par Europe Ecologie.

Le Front de gauche (alliance du PC et du parti de gauche) augmente légèrement son score des européennes de +1,4 % dans l’Isère et de 1,2 % à Grenoble, atteignant 8,1 %. Dans certains bureaux de vote le FG devance le FN et l’UMP. Il est difficile de savoir qui fait progresser le FG. Depuis des années le vote pour le PC diminue régulièrement à Grenoble, et atteignait lors des derniers scrutins environ 3,5 %. On pourrait en conclure que le Parti de Gauche pèse environ pour 4,5 % environ, ce qui est intéressant pour un mouvement aussi jeune.

Il y a toujours un déficit important de vote pour les écologistes dans les quartiers en difficultés sociales, pourtant leurs propositions sur l’action économique et sociale sont porteuses d’amélioration pour ces populations qui sont beaucoup trop entraînées dans le clientélisme, qui n’est qu’une solution individuelle et inefficace pour le long terme. Les écologistes doivent faire l’effort d’être beaucoup plus présents dans ces quartiers.

Conclusion

Les conséquences politiques à Grenoble de ces élections régionales vont être très importantes. La majorité « droite-gauche » était minoritaire (48 % aux municipales), avec l’effondrement du Modem, elle dépasse difficilement le tiers de l’électorat (environ 35 %) ! Ses divisions internes, pour l’instant camouflées, vont de plus en plus apparaître.

Le poids du vote écologiste ne cesse de grandir et la perspective d’une victoire des écologistes et de leurs alliés n’est pas à exclure aux prochaines municipales de 2014 si ils sont capables de fédérer l’ensemble des citoyens qui aspirent à une politique vraiment de gauche et écologiste. Le test des élections cantonales de mars 2011 sera crucial à cet égard. Vu la photographie actuelle, il n’est pas impossible que les trois cantons renouvelables, 1, 3 et 6 soient gagnés par un rassemblement de la vraie gauche et des écologistes ; en effet la droite risque d’être éliminée du 2ème tour, laissant face à face les représentants de la politique de la majorité municipale et le rassemblement autour des écologistes. Le rejet de la politique du maire est tel qu’il n’est pas improbable que les trois cantons échappent au PS.

Cela suppose qu’Europe Ecologie se structure rapidement à Grenoble et dans l’agglomération car pour l’instant ce n’est qu’une offre électorale.

Dans les mois qui viennent, l’ADES s’engagera résolument pour aider à la création d’une alternative politique de gauche et écologiste, portant les valeurs de démocratie, d’écologie et de solidarité, devenant enfin majoritaire à Grenoble.

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6 commentaires sur “Analyse des résultats du 1er tour des élections régionales, notamment à Grenoble”

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  2. pluriel dit :

    IL serait intéressant de connaitre l’abstention des 18/22a dans les trois quartiers populaires du sud.
    En particulier à la Villeneuve où nous vivons une veritable ségrégation de communication entre les populations issues de la diversité (où la majorité des 18/45a ont le droit de vote) et les électeurs habituels.
    Il va être indispensable de faire des réunions d’éducation civique si nous voulons redonner aux gens une habitude de vote et non d’abstention…et qu’ils se rendent comptent qu’un vote est important pour des décisions (par exemple le collége pour les prochaines cantonales)
    Combien de lycéens ont voté cette fois alors qu’ils sont les plus concernés par la politique de la région…je n’arrive pas à comprendre l’irréalisme du corps professoral qui ne parle pas du sens du vote dans les lycées ! Dans quel Lycée les trois listes se sont elles présentées ?

    • admin dit :

      Par rapport à vos remarques, notons dans la même veine que la disparition des cours d’instruction civique est à déplorer. Notons aussi que beaucoup de lycéens ne sont pas en âge de voter… Quant aux listes, elles ne peuvent pas se présenter « dans » les lycées, où toute propagande est interdite, mais elles auraient pu être présentes « devant » (pour des distributions de tracts…), c’est souvent le cas devant les écoles, ce qui permet de toucher les parents…
      Merci en tout cas pour vos remarques et vos propositions.

  3. admin dit :

    On peut ajouter à cette analyse ce que le vote écologiste à Grenoble devient après réintégration de l’abstention :

    2004 : 13,7 % de 58,9 % des inscrits = 8,06 % des inscrits
    2010 : 26,5 % de 42,3 % des inscrits = 11,2 % des inscrits

  4. PAYSSOT dit :

    Je crois qu’une « alliance » Europe Ecologie » Front de Gauche », ou « Parti de Gauche »(à débattre, vu la participatrion du PC à la municipalité Destot) et ADES, serait à formaliser pour les prochaines élections à Grenoble (cantonales, municipales). Avec une forte chance de gagner la municipalité. Condition préalable : construire un programme municipal, et le faire connaitre. Pierrette;

  5. Reups dit :

    Une différence de pourcentage est en points pas en pourcentage!