Vision grenobloise de « Panama papers »

Publié le 8 avril 2016

Sainte-CecileLe 7 avril, l’enquête du Monde sur les paradis fiscaux rapporte comment J. Glénat, éditeur grenoblois de bandes dessinées a utilisé les services du cabinet d’avocat Mossack Fonseca au centre du scandale « Panama papers » (voir plus loin).

Dans un article de janvier 2016, D. Dupré enseignant-chercheur en finance à l’université de Grenoble explique comment 97% des députés ont, en décembre 2015, empêché le vote d’un amendement qui visait à lutter contre l’évasion fiscale. Alors que le gouvernement impose une cure d’austérité sans précédent, 40 à 60 milliards d’euros échappent à l’impôt par an (la commission européenne estime que ce sont 1000 milliards à l’échelle de l’Europe) ; l’absence de 531 députés a permis de repousser un amendement obligeant les multinationales à la transparence. Malheureusement les députés de l’Isère font partie des déserteurs. Plutôt que de défendre les Grenoblois et les Isérois contre l’exil fiscal, ils préfèrent voter l’austérité imposée !

Extrait de l’article du Monde du 7 avril 2018 : à noter que J. Glénat dément avoir été propriétaire de Getway S.A.

« En 2009, Jacques Glénat se porte acquéreur de Getway S.A., une société domiciliée aux Seychelles. Celle-ci est propriétaire d’un compte bancaire et est utilisée notamment pour acheter des œuvres d’art. Selon les documents consultés par Le Monde, pendant les quelques années où il a possédé la société, 4 millions d’euros ont été placés sur ses comptes. Cette société a par ailleurs amassé de nombreux tableaux – des Bruegel le jeune, un Corot, des Cranach, des Fantin-Latour, des Felix Ziem, etc. – mais aussi des bronzes ou de l’ébénisterie ancienne. Certaines de ces œuvres ont été achetées aux enchères.

Tout semblait destiner Getway S.A. à rester une structure opaque sans que le nom de M. Glénat n’apparaisse. Mais c’était sans compter sur la réforme de la législation des îles Vierges britanniques, entrée en vigueur le 1er janvier 2014. Il faudra désormais fournir un rapport financier annuel de la société mais, surtout, troquer les discrètes actions au porteur (anonymes) des sociétés pour des actions nominatives : c’est une couche d’opacité qui s’efface, puisque le nom des actionnaires doit désormais être renseigné. Mossack Fonseca, sommé par les autorités de respecter ces nouvelles règles, demande avec insistance le nom de l’actionnaire, mais le cabinet fiscaliste de Jacques Glénat, RSM Luxembourg, fait la sourde oreille pendant de longs mois.

Ce n’est qu’en mai 2014 qu’une réponse est finalement donnée : le bénéficiaire, plutôt que d’apparaître sur les registres, préfère fermer la société seychelloise. En attendant la fermeture, qui peut prendre plusieurs mois, RSM demande « s’il est possible de garder les actions au porteur, sachant que le client est prêt à payer toute amende pour les conserver ». La requête est acceptée, mais Mossack Fonseca demande néanmoins à connaître le nom et l’adresse du porteur des actions, en précisant que l’information restera dans ses fichiers internes. Un courriel auquel Le Monde a eu accès confirme le nom de l’actionnaire ainsi que son adresse grenobloise. Les documents préparant la liquidation de la société sont envoyés dans la foulée.

Au cours de l’été 2014, la société de Jacques Glénat distribue en dons manuels à ses enfants les œuvres d’art, avant d’être dissoute en novembre. Contacté par Le Monde, Jacques Glénat confirme bien que Getway S.A. a donné des œuvres d’art à ses enfants, mais qu’en revanche, « il n’y a aucun lien direct entre cette société et [lui]-même. ». Quelques jours plus tard, il précise que « s’agissant d’un compte de société, il n’a pas a être déclaré à l’administration fiscale si bien entendu, vous parlez du compte de la société Getway. »

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