La vidéosurveillance n’est pas efficace, et très chère !

Publié le 1 mars 2014

CameraBouleLors d’une conférence de presse et un café citoyen, le Rassemblement citoyen de la gauche et des écologistes a révélé que l’enquête (restée secrète) sur la vidéosurveillance à Grenoble a démontré qu’elle n’était pas efficace. Par contre l’installation des caméras coute très cher, et il serait beaucoup plus utile et efficace de multiplier la présence publique dans l’espace public. Vous trouverez le texte intégral de l’analyse et des propositions sur le site du rassemblement : « La sécurité exige du sérieux« .

En voici quelques extraits :

« Grenoble n’a pas besoin de tapage ni de gesticulation. Il nous faut regarder la situation en face, construire une politique du résultat, et pas du coup d’éclat, éviter les coups de force et développer une vision et une action globales de protection des Grenoblois.

Une bonne politique s’appuie d’abord sur un diagnostic sérieux

Le 27 janvier 2014, le maire de Grenoble nous a indiqué  de façon stupéfiante : « nous ne disposons pas de statistiques ou d’études réalisées par la Ville de Grenoble ou les services de l’Etat concernant la sécurité, la délinquance ou la demande sociale de sécurité.» Il ajoute le 11 février 2014 que « s’agissant du nombre d’installations privées de caméras de vidéosurveillance et de leur carte d’implantation sur le territoire communal […] nous ne disposons pas de ces documents » alors même que le Collège d’éthique a demandé un rapport sur ces caméras dès le 18 mars 2013.

Une bonne politique s’appuie d’abord sur un diagnostic sérieux de la situation pour regarder la réalité telle qu’elle est. Dès le début du nouveau mandat, nous analyserons la réalité des actes de délinquance sur la commune et de la demande sociale de sécurité des habitants…

Une évaluation « de l’expérimentation » de la vidéosurveillance malmenée

A Grenoble, l’évaluation de l’expérimentation n’a jamais été rendue publique malgré les engagements de la municipalité. Elle a pourtant été rendue au collège d’éthique dès le 18 mars 2013. Sa présentation qui était prévue en conseil municipal l’automne dernier a tout bonnement été annulée. Et pour cause, bien que cette étude ne respecte pas les critères prévus par la convention avec la police nationale, elle ouvre le débat plus qu’elle ne le conclut. Nous avons pu nous procurer la synthèse de l’étude du cabinet Planète Publique que nous révélons aujourd’hui et que nous avons mis en consultation libre sur notre site www.unevillepourtous.fr

Comme nous le présentions cette enquête permet de tirer des enseignements très intéressants. Si la vidéosurveillance sur la voie publique agit sur le ressenti des habitants, qui par ailleurs ne sont pas majoritairement favorable à son installation, elle n’a aucun rôle significatif, au regard de son coût, pour la prévention de la délinquance ou l’élucidation des délits. Par ailleurs l’enquête démontre que la présence humaine a plus d’effet que la vidéosurveillance, sur la tranquillisation des habitants, sur la diminution des nuisances et actes de délinquances. Quelques extraits :

« Ces premiers éléments donnent surtout à voir une grande stabilité sur la période, avec une légère tendance vers plus de confiance vis-à-vis de la vidéosurveillance. 47% des enquêtés considèrent l’installation comme une bonne initiative. », avec des variations selon les quartiers entre le centre-ville et les quartiers populaires.

60% des enquêtés du Jardin de ville restent opposés à la vidéosurveillance après l’expérimentation, 50% des enquêtés du centre-ville sont du même avis. « Les habitants de ces quartiers ne ressentent que très peu de sentiment d’insécurité. Ils sont par ailleurs plutôt opposés, voire très opposés, à l’usage de la vidéosurveillance ».

« Pour les habitants du VO, l’outil est remarqué et apprécié ». 53% des enquêtés sont pour installer de la vidéosurveillance. « Pour les habitants de Lafleur, l’attente était moins partagée mais elle parait entrainer son effet de satisfaction net quand elle est constatée » puisque seulement 38% des enquêtés ont conscience que le quartier est vidéo-surveillé.

L’évaluation du cabinet Planète Publique relève que « pour les riverains du jardin de ville, la vidéosurveillance n’était ni attendue ni demandée. Une fois mise en place, elle n’est ni constatée ni plus appréciée qu’avant. La demande portait sur une meilleure intervention publique ». « On peut supposer que l’effet de tranquillisation est plutôt lié au déploiement de la Brigade de soirée sur ce territoire ». Dans les quartiers éloignés du centre-ville, l’évaluation conclut que « le constat de l’intervention publique, notamment concrétisée par la présence de caméras, est en soi un vecteur de tranquillisation »

L’évaluation précise qu’ »en l’état des informations qui nous sont fournies, il n’est rien possible de dire sur le taux d’élucidation ». Sur l’ensemble des réquisitions réalisées (128 depuis 2011 dans les documents dont nous avons eu connaissance), 7 auraient permis l’élucidation d’affaires mais nous n’avons pas connaissance de l’analyse qualitative de ces élucidations pourtant demandée par le collège éthique dès mars 2012.

Il serait pertinent que l’évaluation puisse être explorée et débattue dans son intégralité, d’autant que la synthèse soulève une baisse de l’activité de la police nationale parallèlement aux expérimentations de vidéosurveillance alors qu’elle souligne qu’un effet de tranquillisation peut être atteint par une autre forme d’intervention publique et humaine.

Des moyens à réaffecter sur des outils plus efficaces

Aux responsabilités, nous réorienterons les moyens affectés par la majorité sortante à la vidéosurveillance et l’armement de la police municipale. Au lieu d’investir 4 millions de plus dans des caméras de vidéosurveillance, nous proposons notamment d’assurer une présence humaine renforcée dans les quartiers afin de prévenir la délinquance : éducateurs, médiateurs de jour et de nuit selon les quartiers…

Par ailleurs, nous proposons, comme l’a rappelé Sébastien Roché, expert en politiques de sécurité et membre du collège d’éthique, d’agir sur l’éclairage public qui a beaucoup plus d’effet sur la baisse des actes de délinquance et des conflits d’usage de l’espaces public que la vidéosurveillance. Ainsi, nous nous engageons à réaliser un plan lumière qui permette d’améliorer l’éclairage là où il est manifestement insuffisant.

Nous notons que le Programme Local d’Actions de Prévention dispose d’un budget annuel inférieur à 100 000 €. Parallèlement, l’investissement pour les 18 premières caméras a nécessité 700 000 € d’investissement, celui pour l’armement nécessiterait au moins 200 000 € pour le seul démarrage. Il faut comptabiliser en plus, pour 3 années, un budget de fonctionnement de 1 110 000 € (pour le personnel et l’entretien), soient 370 000 € par an, sans prendre en compte la subvention de la mairie à la vidéosurveillance de la police nationale…

La réaffectation des moyens permettrait donc de tripler les moyens consacrés à la médiation et la présence humaine dans les espaces publics faisant l’objet de conflits.

Les questions de prévention et de sécurité sont trop sérieuses pour laisser de la place aux effets d’annonce et à la démagogie. Aux responsabilités, nous mettrons en œuvre les solutions efficaces pour une ville apaisée et conviviale. »

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