La majorité municipale poursuit la mise en place de son programme qui prévoyait la saisine du conseil municipal sur pétition des habitants (2500 signatures) et la votation d’initiative citoyenne (8000 signatures). Par rapport aux engagements 5 et 6 il y a eu quelques évolutions qui ont amélioré ces deux propositions. Il est maintenant proposé un seul processus d’intervention des habitants : suite à une pétition de plus de 2000 habitants de plus de 16 ans, le conseil municipal se saisit du sujet s’il est de sa compétence et légal. Si le conseil municipal n’adopte pas la demande des pétitionnaires, alors cette demande sera renvoyée à une votation citoyenne.
Le principe de la saisine sur pétition du Conseil municipal, ne pose pas de problème de principe si le maire en est d’accord. Le maire est maitre de l’ordre du jour, il peut donc proposer au débat du conseil toute question qu’il juge utile et mettre en délibération toute question de la compétence de la commune.
Pour mettre en place la saisine et la votation, il faut surmonter plusieurs difficultés :
– Le contrôle des signatures. A partir du moment où le seuil est fixé assez bas (2000) qui permet la saisine du conseil municipal, il est impératif de contrôler la véracité des signatures. Or il n’existe pas de fichier de la population grenobloise de plus de 16 ans. Il faut créer un tel fichier à partir de celui de la liste électorale à laquelle il faudra rajouter les 16-18 ans et les résidents étrangers qui, si aucun autre moyen n’est trouvé, devront s’y faire inscrire volontairement. Cette liste sera indispensable pour l’organisation des votations citoyennes. La constitution d’un tel fichier est soumise à l’autorisation et au contrôle de la CNIL qui doit être saisie.
– La question de la votation citoyenne et de son aspect référendaire qui obligerait les élus à accepter et valider le résultat d’une votation où il y aurait plus de 20 000 oui et moins de non, est autrement plus complexe. Cela ne peut pas être inscrit tel quel dans une délibération qui serait immédiatement refusée par le contrôle de légalité ou par le tribunal administratif. Notre règle constitutionnelle est que le mandat impératif est interdit et en son article 72 il est précisé que les collectivités territoriales s’administrent « par des conseils élus » et « dans les conditions prévues par la loi ». Il ne peut donc pas y avoir une intervention extérieure au conseil municipal qui lui imposerait une décision prise ailleurs. La loi ne prévoit que la consultation des électeurs (et non des habitants) donnant seulement un avis (non décisionnel) sur une délibération du Conseil municipal ou un référendum local limité aux électeurs, qui est décisionnel s’il y a une majorité de oui et s’il y a au moins la moitié des électeurs inscrits sur la liste électorale qui s’est déplacée pour voter.
En l’état du droit, il n’est donc pas possible d’organiser des consultations à vocation décisionnelle, sans passer par le vote limité aux seuls électeurs inscrits sur les listes électorales et avec l’organisation d’un vote classique qui est d’une telle lourdeur (et d’un tel coût) que cela n’est pas envisageable fréquemment.
Par contre le groupe des élus majoritaire peut prendre des engagements vis-à-vis des habitants, notamment celui de suivre le résultat d’un sondage en vraie grandeur des habitants. Il peut être suivi par des groupes d’opposition s’ils partagent cette conception de l’expression populaire entre deux élections municipales. Mais le conseil municipal ne peut pas s’engager à suivre de manière impérative le résultat d’une consultation des habitants.
Autre difficulté : chaque fois qu’une commune a voulu organiser un vote des habitants (non limité aux électeurs), elle s’est vue retoquer par la justice administrative qui considère que seul le vote des électeurs inscrits sur la liste électorale est possible. Le terme de votation essaye de s’éloigner de cette situation, mais est-ce suffisant ? Il serait plus prudent que la recherche du point de vue des habitants de plus de 16 ans soit confiée à une structure extérieure au conseil municipal.
Une idée à creuser : les Conseils Citoyens Indépendants (CCI) étant définis comme les « artisans de la démocratie », pourraient être les organisateurs de la journée de votation citoyenne qui regrouperait toutes les demandes de votation, notamment celle pour choisir les projets à faire financer dans le cadre du budget participatif. Cela assurerait l’indépendance de l’organisation de telles votations et éviterait à la ville de voir annuler ces votations.
La majorité municipale va prochainement fixer des règles pour pouvoir organiser des « votations citoyennes » ; il va falloir qu’elle navigue entre les multiples écueils tendus par la loi qui entend défendre farouchement la primauté de la démocratie représentative, sur une démocratie plus délibérative associant de près les habitants aux décisions qui les concernent.
Mots-clefs : conseil municipal, démocratie locale