Les petits arrangements avec un grand groupe, remis en cause

Publié le 6 mai 2016
Une des images futuristes de Eiffage

Une des images futuristes d’Eiffage

Le 27 mai 2011, le président de la Métro de l’époque (Marc Baïetto) propose au vote du conseil d’agglomération une délibération qui l’autorise à passer une convention de « partenariat, recherche et développement en vue de la mise en œuvre du Projet Phosphore IV » avec Eiffage afin de décrire l’agglomération en 2030. La Métro devant apporter la modique somme de 885 891 € dans la corbeille de mariage. Seuls Gilles Kuntz, élu « Écologie et Solidarité » et un autre élu du Parti de Gauche ont voté contre.

En fait l’habillage en convention de recherche et développement évitait une mise en concurrence, et permettait un arrangement direct entre le président et le grand groupe. L’attention de Raymond Avrillier a été attirée lorsqu’il s’est aperçu que la convention avait été signée avant que la délibération passe en préfecture pour le contrôle de légalité, ce qui l’entachait d’irrégularité et qu’il estimait qu’il y aurait dû avoir mise en concurrence pour une telle convention très favorable à Eiffage.

Le tribunal administratif (le 21 juillet 2014) puis la Cour d’Appel de Lyon (le 28 avril 2016) ont donné raison à Raymond Avrillier.

L’arrêt de la cour démonte complètement le raisonnement de MM. Baïetto et Roverato (PDG d’Eiffage).

« 6. Considérant, dune part, que la société Eiffage entend comprendre la notion de « recherche et développement » comme englobant la recherche fondamentale entreprise par pur intérêt scientifique mais également la recherche appliquée visant à discerner les applications possibles des résultats d’une recherche fondamentale ou à trouver des solutions nouvelles permettant datteindre un objectif déterminé choisi à l’avance ainsi que le développement expérimental fondé sur des connaissances obtenues par la recherche ou lexpérience pratique ; quil ne ressort toutefois pas des éléments quelle produit que le laboratoire dont la mise en place a été convenue, poursuit des travaux correspondant aux définitions ainsi énoncées ; que la société Eiffage ne démontre en effet nullement que les prestations intellectuelles qui devront être produites par le laboratoire en question, seront de nature à accroître la somme des connaissances de lhomme, de la culture et de la société ou que lutilisation des sommes de connaissances ainsi réunies par les personnes qui y seront employées, serviront au développement de nouvelles applications ; quelle ne démontre pas davantage que les travaux produits permettront de trouver des solutions nouvelles permettant datteindre un ou des objectifs déterminés choisis à l’avance ou, quà partir des recherches ainsi menées ou des expériences pratiques ainsi collationnées, des développements expérimentaux touchant aux matières évoquées dans le préambule susmentionné de la convention, pourront être obtenus ;

7. Considérant, dautre part, que la multiplication des thématiques envisagées dans le « Projet Phosphore IV » et la diversité des méthodologies déployées par ce dernier, ne font nullement obstacle à ce que les résultats escomptés des travaux ainsi engagés, annoncés comme devant porter sur une analyse dite « systémique » du territoire de l’agglomération grenobloise mais également présentés comme devant conduire à la production de divers documents et supports de communication, soient directement employés pour aider les autorités de la communauté à prendre les décisions daménagement urbain, industriel ou social qui devraient simposer à elles dans lavenir; que, dès lors, ces travaux ne sauraient en lespèce relever ni de la recherche fondamentale, ni des domaines de la recherche appliquée, ni du développement expérimental ;

Considérant qu’au regard de lobjet de la convention qui, ainsi quil a été dit, se borne à la réalisation d’une étude prospective portant sur différents aspects de lorganisation et du développement de l’aménagement du territoire de l’agglomération grenobloise à l’horizon de l’année 2030, dans le contexte d’un objectif affiché de développement durable, et dès lors que les données que ce projet collationnera et analysera pourront être utilisées directement à des fins décisionnelles, la convention litigieuse ne saurait être regardée comme un accord-cadre ou un marché entrant dans les prévisions du 6° de larticle 3 précité du code des marchés publics ; que, par suite, c’est à bon droit que le tribunal, en estimant que la convention litigieuse ne poursuivait pas un objectif de recherche et développement au sens que les parties signataires de celle-ci entendaient lui donner, a jugé que la communauté dagglomération Grenoble Alpes Métropole ne pouvait conclure celle-ci sans recourir aux règles de publicité et de mise en concurrence fixées par le code des marchés publics ; »

Voici des détails sur le déroulement de l’affaire :

Quand Messieurs Marc Baïetto, président de La Métro et Jean-François Roverato, PDG d’Eiffage, sont dans un bateau en 2011 : les contribuables écopent illégalement pour 885 891 euros.

La Cour administrative d’appel de Lyon du 28 avril 2014 confirme le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 juillet 2014 annulant délibération de La Métro du 27 mai 2011 et la signature le 9 juin 2011 par Monsieur Marc Baïetto du marché Eiffage dit « Phospore IV » avec Jean-François Roverato, PDG d’Eiffage, rejette l’appel de la société Eiffage soutenue par La Métro, et condamne la société Eiffage à prendre en charge une petite partie des frais engagés par Raymond Avrillier dans ce recours.

Raymond Avrillier avait averti personnellement, avant la décision du 27 mai 2011, Monsieur Marc Baïetto du caractère irrégulier de la décision qu’il allait proposer.

Il avait effectué un recours administratif le 1er août 2011 en demandant au président de La Métro de soumettre au conseil de Métro l’annulation de la délibération irrégulière et du marché, ce qu’il a refusé

Il avait saisi le préfet de l’Isère le 1er août 2011, complété le 2 septembre 2011 en lui demandant de déférer les décisions irrégulières devant le tribunal administratif de Grenoble, ce qu’il a refusé.

L’ensemble des mesures de prévention préalables ont donc été prises par Raymond Avrillier et ses demandes visant à la légalité des décisions et de l’usage de l’argent public ont donc été refusées par des personnes incompétentes.

C’est donc par devoir, et en défense des contribuables de La Métro, que le recours a dû être déposé devant le tribunal administratif de Grenoble le 29 septembre 2011.

Le tribunal administratif de Grenoble a mis 3 ans pour juger ce dossier.

La multinationale Eiffage a fait appel du jugement devant la cour administrative d’appel de Lyon.

La cour administrative d’appel de Lyon a mis un peu moins de 2 ans pour juger ce dossier.

La décision définitive démontrant l’illégalité des décisions de La Métro et de Monsieur Marc Baïetto est donc intervenue par le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 juillet 2014 confirmé par la cour administrative d’appel de Lyon le 28 avril 2016.

L’arrangement illégal du 9 juin 2011 entre Monsieur Marc Baïetto et le PDG de la multinationale Eiffage engageant un montant d’au moins 885 891 euros au bénéfice de la multinationale Eiffage et payés par les contribuables de La Métro.

Cet arrangement illégal a été possible grâce à l’absence de contrôle de la légalité par le préfet de l’Isère dont c’est la mission, comme l’a confirmé la Cour des comptes dans son rapport public annuel 2016 (pp. 329-366), et l’absence de moyens de la justice à Grenoble, comme l’a confirmé le ministre de la Justice, le 6 avril 2016 :

« Dans un souci de vérité et de transparence, il faut reconnaître que la justice est à bout de souffle. Le ministère n’a plus les moyens de payer ses factures […] la justice était au bord de l’embolie. Depuis que je pousse la porte des juridictions, je dis plutôt qu’elle est sinistrée… En état d’urgence absolue, comme disent les médecins […]

Les juridictions ont déjà fait baisser toutes leurs dépenses, de nettoyage et d’entretien, par exemple… Elles n’ont même plus de ressources disponibles. […]

La machine judiciaire risque de s’arrêter… ?

Le risque existe qu’elle se grippe. […] »

Comme l’a déclaré lors de l’audience le rapporteur public devant la cour administrative d’appel de Lyon : « C’était sans compter sur la vigilance de Monsieur Avrillier ».

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