Le site « Déchets infos » s’interroge sur le lobbying de la société Eco-Emballages auprès de parlementaires. « On croyait qu’Eco-Emballages était un éco-organisme exclusivement chargé de promouvoir, développer et financer l’élimination et la valorisation des déchets d’emballages ménagers. Apparemment, on s’était trompé. L’entreprise a aussi développé depuis longtemps une activité d’organisateur de voyages, en particulier pour quelques élus soigneusement choisis. Bien entendu, officiellement, il ne s’agit que de voyages de travail qui s’inscrivent dans le cadre des missions de la société, résultant de son agrément. Mais au vu du détail des pérégrinations et de leurs participants, on est en droit de se poser quelques questions, au moins pour certains voyages et certains participants. »
Cette information est reprise par le Canard enchainé du 2 novembre 2016 :
« Parcourir des milliers de kilomètres en avion et brûler du kérosène par hectolitres pour visiter des contrées exotiques, tous frais payés et au nom de l’écologie : voilà le cadeau que le groupe Eco-Emballages offre presque chaque année à des élus. Cette entreprise privée finance les projets de tri et de recyclage des emballages (papier, carton, plastique, acier, verre,
etc.). Elle collecte une taxe parafiscale auprès des industriels producteurs de ces « contenants, et en reverse une grande partie aux collectivités locales qui gèrent des centres de tri. Assurant presque une mission de service public, cette société doit, tous les cinq ans, obtenir un agrément de l’Etat, qui passe par l’appui des parlementaires et des élus locaux. L’enjeu financier n’est pas mince. En 2015, plus de 670 millions ont transité par les caisses d’Eco-Emballages.
En bonne logique, ce sont les plus gros producteurs d’emballages qui administrent la maison : Coca-Cola, Danone, Nestlé, Carrefour et Lactalis, notamment, siègent autour de la grande table. Et veillent à ce que les pouvoirs publics ne se montrent pas trop cruels à leur égard. lls ont donc à cœur de soigner leurs relations avec les parlementaires et autres décideurs politiques.
C’est ainsi que, au cours des dernières années, révèle la lettre (2/11), Eco-Emballages a organisé une flopée de « voyages d’études » : pas moins de huit depuis 2012, dont cinq pour la seule année 2016 ! Leurs hôtes, férus d’écologie, ont ainsi eu le plaisir de découvrir Vienne (Autriche), Mayotte, Saint-Pierre et- Miquelon, San Francisco et la Guyane, pour des durées de deux à six jours…
Même si les vols (en classe affaires) et les destinations sont souvent très plaisants et que l’intégralité- ou presque- des frais est prise en charge, les élus contactés par « Le Canard », le précisent tous avec conviction : ces virées étaient purement techniques et « pédagogiques, rien à voir avec un voyage d’agrément » (Hervé Mariton).
C’est donc par pure provocation que l’un des invités, l’ex-maire de Grenoble Michel Destot, évoque avec émotion, sur son blog, son déplacement à Vienne :« Il est agréable de se perdre dans les rues piétonnes et les places animées du centre-ville. » Où l’étude des déchets urbains vaut sûrement le détour.
C’est certainement aussi un hasard si, l’hiver dernier, plusieurs parlementaires ayant bénéficié de ces voyages ont posé une série de questions écrites (très ressemblantes) au gouvernement, demandant la prolongation de l’agrément d’Eco-Emballages.
Lequel groupe, comme l’a montré, témoignage à l’appui, la lettre « Déchets Infos » avait prêté sa plume pour la rédaction desdites questions … »
Effectivement, M. Destot écrit sur son blog « J’ai participé les 5 et 6 avril à un déplacement parlementaire à Vienne consacré à des échanges sur les politiques nationales et européennes de traitement des déchets, thématique qui fut un des premiers sujets sur lesquels j’avais planché à l’Assemblée Nationale dans les années 90, en tant que rapporteur des projets de loi sur les déchets ménagers, industriels et hospitaliers. »
Dans les années 1990 M. Destot était effectivement très intéressé par les déchets, puisque, lors de la campagne électorale pour les législatives de mars 1993, il a vu sa campagne financée notamment par « France déchets » et « Plastic Omnium ».
Ce soutien à Eco-Emballages ne s’est pas démenti depuis : « Déchets-infos » décrypte les questions des parlementaires dans son numéro du 22 janvier 2014 :
« Michel Destot est maire (PS) de Grenoble, président de l’Association des maires de grandes villes de France (AMGVF) et député. Il a donc un certain poids politique. La question écrite qu’il a posée le 24 septembre dernier au ministre de l’Ecologie n’en a que plus de relief. Il s’y intéresse à la clause de revoyure. En particulier, il s’interroge sur « la nécessité », selon lui, « de garantir un système optimisé de tri et de collecte des déchets d’emballages ménagers à travers des coûts de référence correspondant réellement à des situations optimisées, comparables à ceux des collectivités les plus efficientes ». On comprend mieux où il veut en venir quand on lit la suite. A quelques mots près, Michel Destot reprend l’argumentaire développé par Eco-Emballages selon lequel il n’y a pas lieu d’appliquer la clause de revoyure en augmentant les soutiens aux collectivités. Qu’on en juge… »
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