Réchauffement climatique, la bataille est-elle déjà perdue ?

Publié le 3 novembre 2017

Deux études très inquiétantes viennent d’être rendues publiques. La première, celle de l’ONU du 31 octobre déclare : « Réchauffement climatique : la bataille est presque perdue », si rien ne bouge on va directement vers plus 3°C d’augmentation de la température moyenne du globe, ce qui serait catastrophique. L’ONU propose des solutions pour éviter le pire, mais elles doivent être rapidement mises en œuvre. La seconde est une étude scientifique parue dans Le Lancet, elle prédit un désastre sanitaire global et évalue pour la deuxième année consécutive les effets sanitaires du réchauffement climatique. L’agriculture est déjà atteinte et si rien n’est fait les changements climatiques à venir ruineront les avancées obtenues ces 50 dernières années en termes de santé publique.

Le communiqué de l’ONU déclare :

« La huitième édition du rapport annuel de l’ONU sur l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions, publié en amont de la Conférence de l’ONU sur les changements climatiques à Bonn, révèle que les engagements pris par les pays au niveau national ne représentent qu’un tiers des réductions d’émissions nécessaires à l’horizon 2030 pour respecter les objectifs relatifs à la lutte contre les changements climatiques. Les mesures prises par le secteur privé et les mesures à l’échelle infranationales ne se multiplient pas à un rythme qui permettrait de combler cet écart inquiétant.

L’Accord de Paris vise à limiter le réchauffement climatique en-deçà des 2°C mais un objectif encore plus ambitieux de 1,5°C est également suggéré. Atteindre ces objectifs réduirait la probabilité de sérieuses conséquences climatiques nocives pour la santé des êtres humains, pour les moyens de subsistance et les économies du monde entier.

Dans l’état actuel des choses, une mise en œuvre complète des contributions prévues déterminées au niveau national conditionnelles et inconditionnelles entraînerait très probablement une augmentation des températures d’au moins 3°C à l’horizon 2100 – « inconditionnelles » signifie que les gouvernements seront tenus de prendre des engagements bien plus importants lorsque ceux-ci seront révisés en 2020.

Dans le cas de figure où les Etats-Unis donneraient suite à leur intention déclarée de quitter l’Accord de Paris en 2020, le scénario pourrait se révéler encore plus sombre.

Cependant, le rapport présente des solutions pratiques pour réduire drastiquement les émissions de CO2 grâce à des mesures d’atténuation en développement rapide basées sur des modèles existants dans les domaines de l’agriculture, des bâtiments, de l’énergie, de la foresterie, de l’industrie et des transports.

Des mesures fortes pour la réduction des forceurs climatiques tels que les hydrofluorocarbones, par le biais de l’amendement de Kigali au Protocole de Montréal, et à d’autres polluants à courte durée de vie comme le carbone noir, pourraient aussi grandement contribuer à réduire les émissions de CO2.

« Un an après l’entrée en vigueur de l’Accord de Paris, nous nous retrouvons dans une situation où les efforts sont encore insuffisants pour éviter un avenir misérable à des centaines de millions de personnes », affirme Erik Solheim, le patron de l’ONU Environnement.

« C’est inacceptable. Si nous investissons dans les technologies adéquates en nous assurant que le secteur privé soit impliqué, il est possible de respecter la promesse que nous avons faites à nos enfants de protéger leur avenir. Il faut que nous nous y attelions dès maintenant. »

Les émissions de CO2 ont été stables en 2014, en partie grâce à la transition vers des sources d’énergies renouvelables, notamment en Chine et en Inde. Cela a suscité l’espoir que le pic des émissions ait été atteint et allait désormais suivre une trajectoire à la baisse à l’horizon 2020. Cependant, le rapport révèle que d’autres gaz à effet de serre, comme le méthane, continuent à augmenter et que l’accélération de la croissance économique mondiale pourrait être responsables d’une hausse des émissions de CO2.

Le rapport démontre que les engagements pris dans le cadre de l’Accord de Paris déboucheraient sur des émissions à hauteur de 11 à 13,5 gigatonnes d’équivalent de dioxyde de carbone (Gt éq-CO2) en 2030, c’est-à-dire au-dessus du niveau nécessaire pour maintenir le monde sur la voie la moins coûteuse et pour atteindre l’objectif des 2°C de hausse des températures. Une gigatonne est l’équivalent environ d’une année d’émissions produites par le secteur des transports dans l’Union Européenne (dont l’aviation).

Selon de nouvelles études récemment publiées, l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions pour atteindre l’objectif de 1,5°C de réchauffement se situe entre 16 et 19 Gt éq-CO2, plus important que celui prévu auparavant.

« L’accord de Paris a donné un nouvel élan aux mesures pour lutter contre les changements climatiques, mais cet élan faiblit », déclare Edgar E. Gutiérrez-Espeleta, ministre de l’environnement et de l’énergie du Costa Rica et Président de l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement 2017. « Nous faisons face à des choix douloureux : renforcer nos ambitions ou subir les conséquences de leur affaiblissement. »

Les cartes ci-dessous montrent l’augmentation continue des gaz à effet de serre avec une petite stabilisation depuis 2014, là où il faudrait une franche diminution pour éviter de dépasser les 2 °C d’augmentation de température.

Pour lire le communiqué en entier cliquez ici.

Le Journal de l’Environnement rapporte le travail paru dans le Lancet :

« Le Lancet a tenu parole. L’an passé, à l’orée de la COP 22 de Marrakech, la revue médicale de référence avait lancé une initiative originale : le Lancet Countdown. En se basant sur les travaux de 24 établissements universitaires internationaux et organisations intergouvernementales (OMS), le journal a quantifié les effets sanitaires des principales conséquences du changement climatique (sécheresses, événements climatiques extrêmes, perturbations des moussons, etc.). Des chiffres que le journal britannique entend mettre à jour tous les ans. C’est chose faite.

Sous sa houlette, climatologues, écologistes, économistes, ingénieurs, experts de l’énergie, de l’agroalimentaire et du transport, géographes, mathématiciens, chercheurs en sciences sociales, politologues, spécialistes de santé publique et médecins ont élaboré une quarantaine d’indicateurs dans 5 domaines : exposition et vulnérabilité au changement climatique ; plans d’adaptation pour la santé ; mesures d’atténuation ; finances et engagement public.

En filigrane, le message adressé aux politiques est clair : si vous n’agissez pas, les changements climatiques à venir ruineront les avancées en termes de santé publique obtenues ces 50 dernières années. A contrario, lutter efficacement contre le réchauffement et ses effets pourrait être «la plus grande opportunité du XXIe siècle en matière de santé à l’échelle mondiale ».

Sans surprise, de très nombreux indicateurs sont au rouge : depuis 2000, ce sont plus de 125 millions de personnes qui subissent des canicules de plus en plus intenses chaque année ; durant la même période, les agriculteurs du monde entier ont vu baisser leur productivité de 5% du fait de la dégradation des conditions climatiques ; à cause du réchauffement, le moustique Aedes aegypti peut transmettre la dengue dans un plus grande nombre de régions… »

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