Plainte déposée contre le ministre E. Dupont-Moretti

Publié le 2 octobre 2020

Le 30 septembre, la Cour de justice de la République (CJR) a enregistré une plainte pour prise illégale d’intérêts visant l’actuel garde des Sceaux. Elle a été déposée par Raymond Avrillier à la suite des agissements du ministre contre le Parquet national financier.

Un article de Médiapart apporte les informations suivantes :

« Il revient désormais à la Commission des requêtes de la CJR d’examiner le bien-fondé de la plainte et, éventuellement, d’ouvrir la voie à une enquête contre Éric Dupond-Moretti, déjà en fâcheuse posture à cause de l’inextricable situation de double conflit d’intérêts dans laquelle il s’est placé depuis son arrivée place Vendôme au début de l’été.

Premier conflit d’intérêts : ministre de la justice, Éric Dupond-Moretti a donc publiquement réclamé la semaine dernière une enquête disciplinaire contre des magistrats du PNF à l’encontre desquels il avait déposé plainte, à titre personnel comme avocat, quelques semaines plus tôt, en les traitant de « dingues » aux « méthodes de barbouzes ».

Les investigations du PNF avaient consisté à éplucher, en 2014, deux semaines de relevés téléphoniques d’avocats proches de Thierry Herzog, l’avocat de Nicolas Sarkozy, dans le but de découvrir qui, dans l’appareil judiciaire ou parajudiciaire, avait pu les informer (illégalement) de leur placement sur écoutes dans l’affaire Bismuth. L’enquête avait été infructueuse et la « taupe », dont l’existence ne fait pas de doute, selon les juges d’instruction de l’affaire Bismuth, jamais identifiée.

Une fois ministre, c’est-à-dire devenu le supérieur hiérarchique des « dingues » du PNF, Éric Dupond-Moretti avait retiré sa plainte. Mais profitant d’un rapport de l’Inspection générale de la justice, déclenchée par sa prédécesseure, il a demandé une enquête disciplinaire contre les magistrats du PNF, qui avaient brièvement investigué sur lui. Problème : le rapport de l’Inspection avait conclu à une absence d’illégalité ou d’irrégularité au sein du PNF concernant ladite enquête…

Le deuxième conflit d’intérêts d’Éric Dupond-Moretti porte plus particulièrement sur la relation du ministre avec son grand ami Me Thierry Herzog, qui doit être jugé en novembre prochain avec Nicolas Sarkozy pour « corruption » et « trafic d’influence » dans ce même dossier Bismuth. En effet, durant l’été, un article de Paris Match a mis en scène les vacances du ministre de la justice avec Me Herzog, son « pote de toujours », alors même que c’est le PNF, placé sous l’autorité d’Éric Dupond-Moretti, qui devra représenter l’accusation au procès.

Cette saisie de la CJR intervient au plus mauvais moment pour le garde des Sceaux, qui doit composer avec une indignation unanime de la magistrature à la suite de ses agissements contre le PNF et des interrogations de l’Élysée sur sa capacité à éteindre l’incendie…

Fait rarissime, le procureur général de la Cour de cassation, François Molins, après avoir cosigné une tribune dans Le Monde, a pris la parole publiquement, mercredi 30 septembre, sur RTL, pour déclarer : « Ce n’est pas la magistrature qui est en danger, mais l’indépendance de la justice. » Il a aussi dénoncé un « mélange des genres à l’opposé du principe de neutralité ».

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