Quelle relation entre difficultés de recrutement et taux de chômage ?

Publié le 15 octobre 2021

Contrairement au discours gouvernemental habituel, les difficultés de recrutement ne sont pas liées au fait que certains ne veulent pas travailler et profiteraient du système d’assistance chômage trop avantageux, d’où la réforme très brutale du système d’assurance chômage. L’Unédic, le gestionnaire de l’assurance chômage, évalue à plus d’un million le nombre de chômeurs pénalisés, à des degrés divers, par ce sévère changement de pied. Jusqu’à 400 000 personnes pourront perdre 40 % de leur indemnité.

Une étude officielle de la Dares (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, du ministère du Travail) du 1er octobre montre que les difficultés de recrutement dont liées à des problèmes d’attractivité de certains métiers donc des salaires insuffisants et ou des conditions de travail dégradées.

Voici la conclusion de l’étude de la Dares :

« Cependant, pour expliquer les tensions de recrutement actuelles, il est nécessaire d’analyser finement le marché du travail pour chaque métier et dans chaque territoire. C’est ce que permettent les indicateurs de tension publiés par la Dares et Pôle emploi depuis fin 2020, à un niveau fin de la nomenclature (186 métiers du secteur privé) et par département.

Cette grille d’analyse montre qu’entre 2015 et 2019, la hausse des tensions au niveau macroéconomique s’accompagne d’un accroissement du nombre de métiers concernés. En 2019, 6 métiers sur 10 sont en forte tension de recrutement, alors que seul 1 sur 4 l’était en 2015.  Les indicateurs publiés permettent de détailler l’origine de ces tensions (annexe B) :

Dans un tiers des cas, les tensions surviennent principalement par absence de main-d’œuvre formée. Il s’agit des situations de skill mismatch évoquées plus haut. Les demandeurs d’emploi n’ont pas les compétences requises pour exercer des métiers qui sont pourtant attractifs du point de vue des conditions de travail. Cela concerne beaucoup de métiers pointus de l’industrie (techniciens de la mécanique ou de l’électricité par exemple), du bâtiment (plombiers, charpentiers) et la quasi-totalité des métiers d’ingénieurs dans l’industrie, le bâtiment ou l’informatique.

Dans un quart des cas, les tensions proviennent plutôt de conditions de travail révélant un problème d’attractivité. Se situent notamment dans cette catégorie les aides à domicile, les conducteurs routiers, les ouvriers non qualifiés de l’industrie (agroalimentaire, bois, métal, etc.), ou certains ouvriers qualifiés de l’industrie et du bâtiment ainsi que les serveurs.

Dans un cas sur cinq, les conditions de travail et le besoin de formation semblent tous deux contribuer aux tensions. Sont concernés la plupart des métiers de bouche (cuisiniers, bouchers, boulangers) mais également les aides-soignantes.

Pour les autres métiers, l’origine des tensions est plus diverse. Par exemple, l’inadéquation géographique apparaît particulièrement forte pour les assistantes maternelles.

En 2015, une majorité des métiers du premier et du troisième groupe étaient déjà en tension : le déficit de formation dans ces métiers n’est pas nouveau. En revanche, presque aucun métier du deuxième groupe, présentant un problème d’attractivité, ne l’était.

Même si les effets liés à la conjoncture peuvent bien évidemment jouer sur cette période 2015-2019, il semblerait que la forte poussée des tensions et l’apparition d’un désalignement inhabituel entre difficultés de recrutement et chômage en France sur ces cinq ans résultent moins d’un problème de formation, déjà existant, que d’un problème d’attractivité dans une trentaine de métiers (27). Si les actions d’amélioration de la formation (initiale comme continue) sont nécessaires pour résoudre les problèmes structurels de compétences, l’apaisement des difficultés de recrutement (et la baisse du chômage) pourrait donc aussi passer par l’amélioration des conditions de travail et/ou la revalorisation des salaires dans certains métiers. »

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