Le pantouflage ne marche pas à tous les coups

Publié le 7 janvier 2022

M. Nicolas Bays, compagnon et ex-conseiller de la ministre de l’Industrie Mme Pannier-Runacher, souhaitait rejoindre l’entreprise iséroise Soitec, basée à Bernin. Mais l’ancien député socialiste a vu sa demande de pantouflage bloquée par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Il a fait un recours contre cette décision mais le Conseil d’Etat, l’a renvoyé dans les cordes le 13 décembre 2021 en refusant le référé suspension introduit par l’impétrant.

On ne peut que se réjouir que la HATVP ait pris cette position, et que le juge des référés ait refusé de suspendre cette décision car il apparait que le droit concernant le pantouflage est de moins en moins strict et la porosité entre intérêt public et intérêt privé devient de plus en plus importante.

Même des membres du Conseil d’Etat se compromettent avec un important lobby : l’Institut de la Gestion Déléguée (IGD) est un lobby très discret, réunissant de très nombreuses entreprises privées intéressées directement par la gestion des services publics ainsi que des représentants d’administrations publiques ou d’associations d’élus. IGD utilise des magistrats de la plus haute juridiction administrative, le Conseil d’Etat, pour influencer les décisions de justice dans les domaines très sensibles des délégations de service public, des partenariats publics-privés ou de la commande publique. Voir notre article ici.


Voici ce que dit l’ordonnance du juge des référés sur la décision de la HATVP :

« Pour estimer que le projet de reconversion professionnelle de M. A… comme conseiller à la stratégie régionale et géopolitique de la société Soitec n’était pas compatible avec les fonctions antérieurement exercées par lui au sein du cabinet de la ministre déléguée chargée de l’industrie, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’est fondée sur la double circonstance que cette société, spécialisée dans la conception et la production de matériaux semi-conducteurs, a des liens étroits avec les pouvoirs publics et bénéficie d’importants financements publics en sa qualité de l’un des six chefs de file industriels du plan Nano 2022, mis en place dans le cadre du projet important d’intérêt européen commun (PIIEC) électronique et du contrat de la filière électronique, ainsi que dans le cadre du plan de Relance, et de ce qu’elle avait été en relation pour différents projets avec le cabinet de la ministre déléguée chargée de l’industrie sur la période pendant laquelle M. A… en était membre. Elle a estimé qu’en tant que conseiller politique et élus locaux puis chef de cabinet, conseiller politique et élus locaux, l’intéressé avait été en position de connaître de l’ensemble des sujets évoqués et d’influer sur les décisions prises dans ces domaines. Elle a également relevé que la déclaration d’intérêts modificative de la ministre déléguée qui lui avait été communiquée en juin 2021 mentionnait que M. A… était son concubin. Elle en a déduit que, compte tenu de l’importance des liens entre le ministère chargé de l’industrie et la société Soitec, le projet de reconversion professionnelle de l’intéressé présentait un risque déontologique important, eu égard aux doutes légitimes qu’elle pourrait faire naître sur les conditions d’exercice par M. A… de ses fonctions… »

Pour lire le référé du 13 décembre concernant le pantouflage de M. Bays cliquer ici.

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