Note de l’Autorité environnementale relative aux programmes d’actions nitrates

Publié le 8 décembre 2023

Le 23 novembre 2023, l’Autorité environnementale (Ae) s’énerve et rend une note sévère concernant l’immobilisme des pouvoirs publics à propos de la pollution par les nitrates en France.  L’Ae estime que les pouvoirs publics ne tiennent pas compte de ses alertes et rappelle que la France est mise en cause dans des contentieux auprès de la Cour de justice de l’Union européenne comme de plusieurs tribunaux nationaux. Cette note est un véritable appel à la mobilisation sur ces pollutions nuisibles à la santé des populations. La note produite sera utile pour toutes celles et ceux qui se battent contre l’inaction du gouvernement.

« Constatant que le faible écho donné aux recommandations des précédents avis n’a permis d’améliorer ni les évaluations environnementales des programmes d’actions ni les programmes eux-mêmes, et face à l’absence de volonté d’infléchir une situation très dégradée, l’Ae a décidé de produire cette note délibérée afin de rappeler les enjeux majeurs relatifs à la maîtrise de cette pollution et de mettre en évidence l’impasse dans laquelle se trouve cette politique publique. »

Synthèse de la note

« Le programme d’actions nitrates (volet national-Pan et volet régional-Par) est prescrit par la directive « nitrates » de 1991 dans un contexte de pollution qui appelle des actions efficaces à mettre en œuvre rapidement. L’azote organique, produit essentiellement par les élevages, et l’azote contenu dans des produits de synthèse, apportés comme fertilisants aux cultures excèdent les besoins des plantes, ce qui induit une teneur excessive des eaux en nitrates, ainsi qu’une pollution de l’air. La disponibilité des fertilisants azotés au plan mondial conduit aujourd’hui au dépassement de la « limite planétaire azote » ; la France y contribue par l’excès d’azote épandu sur ses sols agricoles.

En dépit de la succession de programmes d’actions nitrates, la pollution des eaux superficielles et souterraines ainsi que les phénomènes d’eutrophisation ne diminuent pas significativement en France et atteignent des niveaux préoccupants dans certaines régions. La mise en œuvre insatisfaisante de la directive « nitrates » entraîne des contentieux auprès de la Cour de justice de l’Union européenne comme des tribunaux nationaux.

Une évaluation environnementale est effectuée pour le Pan et chacun des Par de la 7e génération.

Celles qui ont été examinées par l’Ae sont rarement satisfaisantes et n’atteignent aucun des objectifs d’une telle démarche. Sur un territoire donné, l’efficacité de l’action suppose une désignation adéquate des zones vulnérables et ne peut être appréciée qu’à l’aune de la somme des volets national et régionaux des programmes d’actions nitrates. Malgré cela, les évaluations environnementales n’ont pas été considérées comme un outil permettant d’agréger les moyens d’action régionaux, de bassin et nationaux, pour juger de leurs effets sur tous les milieux du territoire concernés. Dans ces programmes dont l’objectif premier est précisément de réduire les incidences de l’utilisation des fertilisants agricoles, elles n’analysent, ni n’évaluent au regard de leur efficacité pour l’environnement et la santé humaine les différentes mesures pour y parvenir. Les dispositifs de suivi ne sont pas adaptés au pilotage de l’efficacité des mesures. Les évaluations environnementales ne comportent pas de modélisation des incidences des activités agricoles sur l’environnement qui permettrait de faire le choix de dispositions en fonction de leur capacité à réduire l’impact de la fertilisation.

En conséquence, à l’instar des générations précédentes, la 7e génération des programmes d’actions nitrates ne satisfait pas l’objectif premier de la directive « nitrates » et, plus généralement, n’est pas en adéquation avec les enjeux de réduction de la pollution des eaux et de l’air par l’azote. Dans le prolongement de son avis rendu en 2021 sur le 7e programme d’actions national qui portait en germe les limites des orientations prises, l’Ae a été amenée à adopter des avis critiques sur les quatre Par nitrates examinés en 2023, en amont de la rédaction de la présente note (Bourgogne-Franche-Comté, Pays de la Loire, Auvergne-Rhône-Alpes et Île-de-France).

Elle considère comme peu probable que cette 7e génération de programmes, sans rupture avec la génération précédente, permette à la France d’améliorer la qualité des eaux et de réduire les émissions atmosphériques. De même l’atteinte des objectifs de la directive cadre sur l’eau (DCE) comme de ceux de la directive cadre stratégie pour le milieu marin (DCSMM) est compromise.

Constatant que le faible écho donné aux recommandations des précédents avis n’a permis d’améliorer ni les évaluations environnementales des programmes d’actions ni les programmes eux-mêmes, et face à l’absence de volonté d’infléchir une situation très dégradée, l’Ae a décidé de produire cette note délibérée afin de rappeler les enjeux majeurs relatifs à la maîtrise de cette pollution et de mettre en évidence l’impasse dans laquelle se trouve cette politique publique.

Plus fondamentalement, trente ans après l’adoption de la directive « nitrates », l’Ae, à nouveau, appelle de ses vœux un programme d’actions nitrates vraiment ambitieux et appliqué, et pleinement intégré dans une véritable stratégie d’ensemble d’amélioration effective des performances environnementales et de réduction de l’empreinte environnementale de l’agriculture. »

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