
Le 10 mars 2025, l’Observatoire national des violences faites aux femmes a rendu publique une étude montrant que les femmes restent les principales cibles des violences sexistes et sexuelles dans les transports. Les chiffres ne cessent d’augmenter. Dans la Lettre n°23, l’Observatoire a choisi de se pencher sur l’ampleur et la nature des violences sexistes et sexuelles dans les transports en commun et collectifs. 91 % des victimes de violences sexuelles dans les transports en commun sont des femmes, 75 % d’entre elles ont moins de 30 ans et 36 % sont mineures.
L’étude s’appuie sur les données de l’Observatoire national de la délinquance dans les transports, du ministère de l’Intérieur et des opérateurs de transports. Ces données démontrent des efforts importants engagés depuis plusieurs années mais le phénomène reste largement sous-évalué puisque seules 7 % des victimes ont déposé plainte en 2023.
« Les femmes sont toujours les principales cibles des violences sexistes et sexuelles dans ces espaces puisqu’elles représentent 91 % des victimes dans les transports en commun selon l’enquête « Vécu et ressenti en matière de sécurité » du SSMSI. Quant aux auteurs de ces violences, le ministère de l’Intérieur indique que 99 % des mis en cause sont des hommes. Une statistique particulièrement frappante qui illustre parfaitement les propos de Raphaël Adamczak, doctorant en psychologie sociale, lorsqu’il explique que la violence masculine « a pour but de rappeler que cet espace appartient au groupe masculin ».
Si, contrairement aux idées reçues, la plupart des violences faites aux femmes sont commises par des membres de leur entourage proche – rappelons que 61 % des victimes de viols, tentatives de viol et agressions sexuelles en 2022 connaissent l’agresseur – il n’en demeure pas moins que l’espace public, et tout particulièrement les réseaux de transports en commun, reste un lieu où les femmes s’exposent aux violences sexistes et sexuelles dès lors qu’elles l’investissent.
L’enquête ENOV conduite pour la RATP révèle en effet que 7 femmes sur 10 ont déjà été victimes de violences sexistes et sexuelles dans les transports franciliens au cours de leur vie. Cette proportion est encore plus élevée chez les jeunes de 15 à 25 ans.
Comme le précise la chercheuse en urbanisme Manon Marguerit, dont les analyses éclairent cette Lettre, les agresseurs agissent en tous lieux, et ne se limitent pas aux frottements ou à l’exhibitionnisme. Les agressions qui rendent les transports publics hostiles aux femmes sont aussi des regards menaçants ou insistants, des insultes, des attouchements et des viols ou tentatives de viol. La peur associée et intériorisée conduit les femmes à adopter des stratégies de contournement pour prévenir l’agression et être en capacité de la fuir plus rapidement. Qu’une femme ou une fille modifie ses horaires ou ses trajets par peur d’être agressée doit nous interroger sur la liberté d’accès de toutes les citoyennes au service public des transports.
Face à cela, les opérateurs ont mis en place des dispositifs innovants pour renforcer la sécurité des femmes dans leur réseau : marches exploratoires avec des usagères, descentes à la demande sur le réseau de surface, bornes d’alerte et canaux de signalement.
Retenons aussi les éclairages positifs apportés par ces données. La part des victimes dans les transports en commun franciliens ayant déclaré avoir été aidées par une tierce personne a plus que doublé par rapport à 2016 et 4 victimes sur 5 ayant sollicité un agent ou une agente de la RATP se sont senties bien prises en charge, écoutées ou comprises.
À travers cette Lettre, nous mettons aussi en lumière une réalité : celles des violences sexuelles commises sur des personnes vulnérables par des chauffeurs de transports sanitaires, de bus et de bus scolaires. L’enquête publiée en 2024 par l’association Disclose en collaboration avec Radio France met en lumière qu’entre 2005 et 2024, 152 personnes ont été victimes de violences sexuelles commises par leur chauffeur dans les transports sanitaires, dans les bus et dans les cars scolaires. 67 % étaient mineures et 23 % étaient en situation de handicap.
Toutes ces données doivent provoquer une prise de conscience : nous nous devons toutes et tous d’agir en étant attentifs et attentives aux situations qui nous entourent pour porter assistance aux personnes en danger ou solliciter de l’aide. C’est en exerçant ensemble un contrôle social que nous participerons à bannir les violences faites aux femmes, aux personnes en situation de handicap, aux enfants, et que nous créerons des espaces publics sûrs et habilitants, c’est-à-dire accessibles et inclusifs pour toutes et tous. »
Mots-clefs : Déplacements, droits des femmes, violences