
Ce rapport présenté par deux députés de sensibilités politiques très différentes, Antoine Léaument (LFI) et Ludovic Mendes (apparenté au groupe macroniste) est la conclusion des travaux d’une mission d’information conduite sur plus de dix-sept mois et deux législatures, c’est dire le sérieux du diagnostic et des conclusions.
Il apporte un nouvel éclairage sur l’intégralité des enjeux de la lutte contre le trafic de stupéfiants : sécuritaire, institutionnel et sanitaire. Ils mettent en lumière l’aspect essentiel de la prévention pour lutter contre la consommation, raison pour laquelle les rapporteurs lui ont réservé une part conséquente de leur rapport. Pour eux il faut privilégier la prévention à la pénalisation prenant le contrepied de la politique actuelle : « Le courage politique commande de traiter enfin le sujet de la consommation, sans complaisance ni démagogie, en s’appuyant sur la réalité : les politiques stigmatisantes à l’égard des consommateurs ont fait la preuve de leur inefficacité dès lors qu’elles n’ont pas empêché l’augmentation de la consommation ni mis un terme à l’accentuation de la menace que le trafic fait peser sur la sécurité et l’ordre public.» Après avoir examiné ce qui se passe à l’étranger, ils proposent d’avancer vers une libéralisation du cannabis en France : « le choix d’une légalisation étroitement régulée par l’État »
Conclusion des deux rapporteurs :
« À l’issue de leurs travaux, vos Rapporteurs ont mesuré l’ampleur de la menace que font peser les organisations criminelles de trafiquants de stupéfiants sur la sécurité publique et la stabilité de nos institutions.
Si le poids de ce constat peut paraître accablant, vos Rapporteurs sont certains qu’il existe des moyens efficaces d’y remédier pour endiguer l’influence de ces groupes criminels et fragiliser leurs structures.
La lutte contre le trafic de stupéfiants appelle de la part des autorités publiques la mise en œuvre d’une politique ferme mais lucide. Les moyens de cette lutte doivent être prioritairement dirigés vers ceux qui en sont responsables au premier chef : les trafiquants eux-mêmes et spécifiquement les chefs des réseaux criminels et les agents du blanchiment de l’argent de la drogue.
Les politiques publiques doivent être guidées par des impératifs d’efficacité qui commandent d’abandonner la vision trop souvent stéréotypée portée sur la consommation des produits stupéfiants.
Vos Rapporteurs ont acquis la conviction que lutter contre le consommateur ne permettra pas d’endiguer durablement le trafic de stupéfiants. Il est essentiel de ne pas se tromper de cible : les outils de la lutte contre ce fléau criminel doivent être mobilisés à l’encontre des principaux responsables de son développement, les trafiquants. Les efforts pour lutter contre la demande, qui sont indispensables, tout comme ceux déployés pour tarir l’offre, ne doivent pas se focaliser sur la répression du consommateur de produits stupéfiants.
Être à la hauteur de ces enjeux implique de s’emparer du sujet du trafic de stupéfiants dans toutes ses dimensions : les risques en matière de sécurité publique, la déstabilisation des institutions au travers de la montée en puissance du phénomène de la corruption, mais également le traitement inapproprié du consommateur.
Trop souvent oubliée dans le débat public, la prévention de la consommation des drogues est pourtant l’un des enjeux fondamentaux de la lutte contre le trafic et l’un des seuls moyens efficaces pour lutter contre la demande exponentielle de ces produits illicites.
Le courage politique commande de traiter enfin le sujet de la consommation, sans complaisance ni démagogie, en s’appuyant sur la réalité : les politiques stigmatisantes à l’égard des consommateurs ont fait la preuve de leur inefficacité dès lors qu’elles n’ont pas empêché l’augmentation de la consommation ni mis un terme à l’accentuation de la menace que le trafic fait peser sur la sécurité et l’ordre public.
Vos Rapporteurs ont souhaité explorer l’ensemble des pistes de réflexion qui leur ont été soumises et comparer toutes les politiques publiques pouvant avoir un réel effet sur l’ampleur du trafic pour en mesurer l’efficacité, sans préjugés ni opinions préconçues.
Les recommandations qu’ils formulent sont le reflet de la stratégie globale qu’ils préconisent d’adopter pour améliorer l’efficacité de la lutte contre le trafic de stupéfiants. Elles explorent chaque dimension de cette forme de criminalité organisée sans épargner aucun pan : en particulier, la fermeté de la réponse à l’égard des trafiquants du « haut du spectre » ne doit pas occulter l’enjeu de la prévention à l’égard de ces substances.
Ils formulent le vœu que ce rapport marquera un tournant dans l’approche de la lutte contre le trafic et permettra de guider les réflexions à venir sur les initiatives législatives qui s’annoncent en la matière. »
Mots-clefs : délinquance, drogues, parlement