Le projet MALIN, pour l’aide alimentaire aux plus démunis, pas si malin…

Publié le 16 mars 2012

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« Donnez un poisson à un enfant il mangera un jour, apprenez lui à pêcher, il mangera toute sa vie »

Dans un pays riche comme la France, la malnutrition des enfants et des adultes est révoltant. Grenoble n’échappe pas à ce fléau, d’où l’idée de proposer un projet nommé « MALIN » pour l’aide alimentaire aux plus démunis.

On ne sait pas si c’est malin pour les bénéficiaires, mais pour la multinationale de produits laitiers fournisseur de l’opération, c’est un bon placement à court, moyen et long terme.

Ce projet initié au plan national, a donné lieu à un protocole d’accord en 2010, entre des institutionnels, professionnels de santé publique, associatifs et industriels pour faciliter l’accès aux « produits alimentaires adaptés à la nutrition infantile à prix réduits. »

 Comment çà fonctionne

Le programme MALIN s’adresse aux enfants en bas âge moins de 4 mois à 3 ans.

Il consiste à sensibiliser les familles aux bonnes pratiques en matière de nutrition et de renforcer les connaissances sur l’alimentation de la femme enceinte, sur l’allaitement et l’alimentation de la mère et de l’enfant, sur la diversification alimentaire.

Son autre objectif est de « faciliter l’accès des familles en situation de précarité, RSA socle ou celles vivant sous le seuil de pauvreté à une alimentation adaptée aux besoins nutritionnels des enfants en bas âge ».

« Les familles inscrites peuvent se renseigner pour recevoir des actions d’accompagnement individuelles ou collectives, dans les maternités, centres PMI, etc. »

« Ces familles recevront tous les trimestres, des chèques de réduction, nominatifs d’une valeur totale de 315 €, entre le 5ème et le 21ème mois de l’enfant. Les chèques sont valables 3 mois dans tous les supermarchés qui vendent… » des produits commercialisés par une multinationale des produits laitiers.

Cette idée pourrait voir le jour à Grenoble, par l’intermédiaire du CCAS.

Dans les années 70, un système similaire avait été mis en place dans les pays en voie de développement, par un autre grand groupe alimentaire, ce qui avait été dénoncé dans un livre pamphlet «  Nestlé contre les bébés ! » Les enfants ne mouraient plus seulement de malnutrition, mais de dysenterie en raison de l’eau polluée utilisée pour la reconstitution du lait en poudre.

Il existe des dispositifs pour éviter la malnutrition des enfants

  • Un enfant peut bénéficier d’un allaitement maternel après 5 mois, si sa mère le souhaite. C’est le meilleur aliment équilibré et qui favorise ses défenses immunitaires. Concernant l’introduction à l’alimentation diversifiée : 2 pommes font une compote pour environ 3 jours, une pomme de terre, un poireau ou une courgette et une carotte font une soupe de légumes pour environ 2 jours. L’éducation à une bonne alimentation n’a pas pour seule fonction de remplir un estomac. Par l’alimentation, on développe le goût, le toucher, mais aussi l’éveil aux cycles de la nature, et la connaissance des produits issus de la terre, du jardin ou des champs Le repas est aussi un temps de convivialité et d’apprentissage des codes de la vie sociale, à commencer par « s’il te plait » et « merci ». Il n’est pas certain que la barquette individuelle chauffée au micro ondes produise le même effet.
  • Les infirmières puéricultrices de PMI, professionnelles averties peuvent intervenir après la naissance de chaque enfant (Loi 2/11/1989), pour répondre aux questions que se posent la mère, le père sur l’équilibre alimentaire de leur enfant, les raison des pleurs ou du sommeil de l’enfant, ainsi que par une écoute bienveillante, nécessaire à l’établissement d’une bonne relation mère/enfant/père et ainsi diminuer certaines inquiétudes parentales. C’est ainsi que l’on peut contenir, et probablement diminuer les risques de maltraitance à enfants.
  • Le Conseil général doit également ouvrir selon des règles légales, des consultations pour les femmes enceintes, pour les enfants de 0 à 6 ans, et assurer des bilans de santé dans les écoles maternelles avant l’âge de 4 ans.

Ces différents dispositifs de prévention primaire, ont été mis en place pour améliorer les suivis de grossesse et favoriser des dépistages précoces des troubles de l’audition, de la vue ou du langage de tous les enfants. Cette offre de services est théoriquement destinée à toute la population, pauvre ou riche.

Mais c’est là que le bât blesse : les infirmières puéricultrices n’arrivent pas à répondre favorablement à toutes les demandes. Les consultations sont en nombre insuffisant. Quant aux bilans de santé dans les écoles maternelles, la couverture départementale est très incomplète, sauf à Grenoble où c’est la ville qui les assure.

A Grenoble, après le dispositif « parler bambin » qui peut s’avérer bénéfique pour les enfants, sous réserve d’un personnel en nombre suffisant pour la prise en charge des enfants qui ne sont pas intégrés au programme, voilà le « projet MALIN », adopté par le Conseil d’administration du CCAS (sans l’assentiment de Gilles Kuntz représentant des élus Ecologie et Solidarité). Ce projet s’adresse aux plus pauvres, est d’une autre nature mais ne peut supplanter le nécessaire entourage humain, si précieux au moment de la naissance de chaque enfant, qu’il soit de milieu modeste ou aisé.

Nous assistons à une diminution constante des actions de prévention très précoce dans un bon nombre de conseils généraux qui se justifient par la montée en charge de la protection de l’enfance maltraitée. Nous n’échappons pas à la règle. Ce que nous ne ferons pas en prévention maintenant aura des conséquences néfastes à l’avenir.

Avec le dispositif MALIN, nous assistons au remplacement des services d’aides aux familles au moment de la naissance, par une aide apportée par une entreprise du CAC 40 ! N’est ce pas aussi, un conditionnement à acheter des plats préparés de la marque du plan « MALIN » durant de nombreuses années ?

D’une façon plus générale, ce projet précis s’inscrit dans le développement ces dernières années de la politique du « guichet » et du chèque individuel (vacances, cadeaux, fournitures scolaires, alimentaires, …) conforme à l’économie libérale. Il s’agit de casser le collectif et le secteur public pour imposer la logique de privatisation et d’individualisation tout en fournissant au cas par cas l’accompagnement indispensable aux victimes avec des politiques caritatives de réparation.

En 2012, il est nécessaire d’affirmer que la prévention précoce auprès des enfants et leurs familles, ne représente pas un coût de fonctionnement, mais un formidable investissement humain d’avenir !

N’est ce pas plutôt cela être solidaire ?

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