Encore un jugement condamnant les excès d’autorité de l’ancien exécutif de la Région

Publié le 22 avril 2016
Les "Mounier" aux voeux de la Région (Photo PM, tous droits réservés)

Les « Mounier » aux voeux de la Région (Photo PM, tous droits réservés)

Ce n’est pas sans rappeler l’affaire du lycée Mounier où d’autorité le Président de la Région (JJ. Queyranne) avait décidé la fermeture du lycée alors qu’il était prévu par le conseil régional de le reconstruire au même endroit. Pierre Mériaux alors conseiller régional avait déposé avec succès un recours au tribunal administratif. Le 17 mars 2016 le tribunal administratif donne raison à deux anciens conseillers régionaux (Pierre Mériaux et Corinne Bernard) sur un autre dossier et qui rappelle que l’exécutif doit appliquer les décisions et les règles imposées par les lois et le délibératif. Ce rappel peut être utile dans la situation actuelle où l’exécutif régional mené par L. Wauquiez fait preuve d’un autoritarisme très critiquable.

Voici les détails de cette histoire montrant les dysfonctionnements de l’exécutif régional.

Il était une fois un vice-président de la région Rhône-Alpes, chargé de l’économie, connu pour sa grande proximité avec le patronat Rhônalpin, nonobstant son étiquette « socialiste » (mais tendance Valls, ce qui explique sans doute cela …).

Ce politicien cumulard (il était aussi député de la Loire) était très fier d’avoir fait actualiser par la région une « SRDEI », une Stratégie Régionale pour le Développement Economique et l’Innovation.

Jusque-là rien d’anormal, c’est même une obligation légale que la Région par une délibération-cadre liste les cas de figure où elle décide d’apporter son aide aux partenaires privés ou publics, dans le cadre de sa mission de coordination des politiques économiques des collectivités locales.

Jean-Louis Gagnaire était connu de tous les élus régionaux pour ses longs « tunnels » lors de ses interventions orales vantant sans cesse la valeur « prescriptive » des schémas régionaux.

Mais en 2013 un élu régional, par ailleurs maire de sa commune, vient le démarcher pour lui demander de l’aider à racheter le bâtiment (17 000 m²) et le terrain (40 000 m²) libérés par le départ brutal d’une entreprise qui délocalise sa production en Espagne, ce foncier étant alors mis en vente à bas coût.

Ce maire agit comme beaucoup d’élus locaux, en cherchant à maximiser les gains pour sa commune. Il ne s’agit donc pas de lui jeter la pierre, d’autant qu’il est décédé depuis : il s’agissait de Fabrice Marchiol, maire de La Mure, qui campait dans une posture d’opposition résolue (et douée) à la majorité PS-FDG-EELV de la Région.

Il n’est guère étonnant qu’un opposant ne se sente pas obligé de respecter le cadre défini par une majorité qu’il conteste. Après tout il tente sa chance en sollicitant le Vice-président de la région comme il le fait avec l’Etat et le conseil départemental parallèlement.

Par contre il est sidérant de voir la façon dont ce Vice-président a traité la demande, en négligeant totalement la SRDEI adoptée après de longs débats avec tous les partenaires de la région, délibérée puis votée par les élus. Car le hic était que cette SRDEI ne prévoyait aucune possibilité de financement dans le cas cité, le rachat d’un grand bâtiment et de terrains sans aucun repreneur d’entreprise annoncé, sans installation d’une autre entreprise, sans intervention de l’EPFL (auquel le maire de la Mure refusait d’ailleurs d’adhérer).

Malgré 4 tentatives de négociation menées par les élus EELV directement concernés par le CDDRA du territoire (Corinne Bernard et Gérard Leras, par ailleurs membre de l’exécutif régional au titre de sa délégation sur le foncier), relayés par le groupe EELV directement auprès du président de la région, le vice-président Gagnaire a décidé « souverainement » de faire verser 162 875 € de subvention régionale, soit le tiers de la somme nécessaire au rachat, pour agrandir le patrimoine immobilier d’un syndicat intercommunal, sans aucun effet direct sur l’emploi.

Ulcérés par ce mépris total du délibératif et des principes d’action économique décidés en commun 2 des élus isérois du groupe EELV, Pierre MERIAUX et Corinne BERNARD, ont alors décidé de faire un recours. D’abord auprès du service de contrôle de légalité de la préfecture de région, qui n’y trouva rien à redire… ce qui interroge sur la validité du contrôle effectué !

Puis ils ont déféré la délibération régionale à la censure du Tribunal Administratif de Grenoble qui vient de se prononcer en annulant la délibération avec un jugement limpide qui leur donne totalement raison : le Tribunal Administratif constate que l’aide a été versée hors cadre du Schéma régional économique ce qui n’est pas légal, la délibération cadre servant de « loi des parties » dont nul ne peut s’exonérer.

Le Tribunal Administratif rejette les demandes de sanction financières déposées par les avocats de la région (1 000 €) et du SMIME (3 000 €) contre les 2 élus, qui eux ont fait ce recours sans avocat, classique manœuvre d’intimidation des autorités en place contre les requérants.

Là encore, comme pour le recours (fait en 2011 par Pierre Mériaux) contre la décision du seul président de région de baisser la capacité du lycée Mounier, sans vote de son Assemblée, il faut saluer un progrès démocratique acquis par les jurisprudences du Tribunal Administratif de Grenoble : l’exécutif est là pour exécuter les volontés de l’Assemblée, il ne peut déroger aux règles fixées soit par la loi, soit par des décisions précises de l’Assemblée.

La nécessité de respecter le délibératif et l’absence d’exception à la règle est un des remparts contre le clientélisme en politique, cette décision le rappelle utilement au moment où Laurent Wauquiez démarre son mandat en maltraitant les élus et en prenant des décisions très contestées (statues du Puy, UNI, Festival de Vienne…).

Les 8 éluEs du Rassemblement régional feraient sans doute bien de s’inspirer de leurs prédécesseurs au conseil régional pour obtenir devant la justice le respect des droits qu’un président autocrate leur dénie dans l’assemblée régionale.

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