L’ADEME : rapport de la Cour des Comptes et utilisation politicienne

Publié le 31 mars 2017

Le 23 mars 2017, la Cour des Comptes rend un rapport sur les comptes et la gestion de l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) qui est le principal opérateur public de la transition énergétique. Ce rapport examine la période 2009 à 2014 avec des actualisations 2015 quand c’est possible. La Cour attire l’attention sur le risque de manque de moyens financiers par rapport aux missions qui lui sont confiées. Ce rapport très diplomatique soulève plusieurs irrégularités graves dans la gestion de l’ADEME sous la présidence de M. Echevin.

C’est l’occasion de rappeler que le 21 février 2014, M. Echevin est venu soutenir irrégulièrement la campagne électorale de MM. Safar et Destot lors des élections municipales de 2014, en utilisant l’ADEME et en méconnaissance de l’obligation de réserve des personnes chargées d’une mission de service public en période électorale. On peut lire sur le blog de M. Destot : « En présence de Jérôme Safar, Premier Adjoint, de mes Adjoints Abderrahmane Djellal, Laure Masson, Stéphane Siebert, et des Conseillers municipaux Serge Nocodie, Eric Grasset et Pascal Garcia, nous nous sommes rendus dans plusieurs lieux emblématiques des innovations grenobloises réalisées avec le soutien financier et technique de l’Ademe… Je me réjouis que le président de l’Ademe ait visité notre ville ». La plupart de ces personnes étaient candidats sur la liste de J. Safar.

Voici un extrait de la synthèse du rapport :

« Établissement public à caractère industriel et commercial (ÉPIC), l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) est placée sous la tutelle du ministère de l’environnement, de l’énergie et de la mer (MEEM), dont elle constitue l’un des principaux opérateurs.

Employant plus de 1100 agents, dotée d’un budget dépassant 500 M€, l’ADEME s’est vu confier par l’État un nombre croissant de missions au fil des années : principal opérateur de la transition écologique et énergétique à la suite du Grenelle de l’environnement, elle est aussi un des acteurs majeurs du programme des investissements d’avenir (PIA), pour lequel des moyens financiers dépassant 3,1 Md€ lui ont été alloués pour la période 2010-2015. La loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a conforté son rôle dans la mise en œuvre des politiques publiques consacrées à la promotion du développement durable.

Le contrôle de la Cour porte sur les comptes et la gestion de l’ADEME pour les exercices 2009 à 2014, avec, dans la mesure du possible, une actualisation à 2015. Le rapport précédent, établi par la Cour en septembre 2010 à la demande de la commission des finances du Sénat dans le cadre de l’article 58 2° de la LOLF, portait sur les exercices 2004 à 2008. Il y était notamment relevé que l’agence devait accomplir des progrès sensibles dans la gestion de ses ressources humaines, de ses implantations immobilières et des procédures mises en œuvre en matière d’achat public.

Au terme de ce contrôle, la Cour estime que, si l’ADEME parvient à assumer de façon globalement satisfaisante les nombreuses missions qui lui ont été progressivement déléguées par l’État, une attention particulière doit être portée à l’évolution de ses moyens financiers au cours des prochaines années ; en outre, sa gestion, dans un certain nombre de domaines, doit rapidement être améliorée »…

Une attention particulière doit être portée à l’évolution des moyens financiers

de l’agence…

Ce constat s’explique par le fait que le montant des autorisations d’engagement (AE), qui pour la plupart, sont décidées par sa tutelle, se situe à un niveau élevé (plus de 650 M€ par an depuis 2013), alors que celui des crédits de paiement (CP) délégués à l’agence se situe à un niveau sensiblement moindre (de l’ordre de 500 M€). Il en résulte que le volume des restes à payer n’a cessé d’augmenter (+ 44 % depuis 2011, passant de 925 M€ en 2011 à 1 335 M€ en 2015).

Cette différence récurrente entre AE et CP provoque un « effet de ciseau » qui, selon les projections établies par l’agence, risque de se traduire à partir de la fin de 2017, à ressources constantes, par une insuffisance de fonds de roulement. La Cour ne peut que regretter que cette situation, prévisible depuis au moins trois ans, n’ait, jusqu’à ce jour, donné lieu, ni de la part de l’agence, ni de sa tutelle, à aucune décision susceptible de la corriger.

Il leur revient désormais d’apprécier la probabilité de la réalisation d’un tel scénario et d’en tirer les conséquences, soit sur le niveau des engagements futurs de l’ADEME, soit sur le montant des ressources à lui affecter sans attendre la programmation triennale 2018-2020… »

Et quelques extraits des critiques glanées parmi les 102 pages du rapport :

« Déjà relevées en 2010 par la Cour, certaines défaillances constatées dans la gestion des marchés passés par l’ADEME, ont de nouveau été observées pendant la période sous revue. Elles s’expliquent par un défaut d’organisation de la fonction achats, trop faiblement centralisée, et par une faiblesse du système d’information…

la Cour a constaté que, si la conception générale des règles qui fixent les modalités des aides attribuées par l’agence n’appelle pas d’observation, des efforts peuvent être encore réalisés sur les contrôles a priori et a posteriori exercés par ses services, qui permettraient de mieux garantir la conformité des contrats à l’objectif qui justifiait le versement de la subvention.

En conclusion, face à l’incertitude qui entoure la soutenabilité des engagements financiers de l’ADEME, en particulier à partir de la fin de 2017, la Cour appelle ses responsables à mieux anticiper les contraintes financières à venir et à faire preuve de rigueur dans les choix de gestion…

Alors que le rapport précédent de la Cour des comptes l’y invitait, l’ADEME n’a pas été en capacité de contrôler régulièrement l’ensemble de ses régies…

À l’évidence, l’exercice 2015 marque une dégradation de la situation financière de l’établissement… en conséquence de la succession de résultats négatifs, les capitaux propres sont eux-mêmes devenus fortement négatifs depuis l’exercice 2011. Ils ont diminué de 376 M€ entre les exercices 2011 et 2015 et de 1,16 Md€ entre 2009 et 2015…

Le tableau recensant les marchés passés au cours de la période sous revue est incomplet. Des informations contractuelles et élémentaires telles que la durée d’exécution, la présence, le nombre et l’objet d’avenants, le montant effectivement payé, le type de marché et le mode de passation sont soit absentes, soit erronées. En particulier, les marchés conclus sur le budget propre de l’agence ne mentionnent aucune de ces informations, l’établissement n’ayant pas jugé opportun d’acquérir le module marché de l’applicatif SIREPA qui aurait permis cette connaissance…

Enfin, la multiplication d’avenants résulte le plus souvent d’une appréciation défaillante du besoin initial ou de circonstances particulières en cours d’exécution du marché s’agissant de prestations de dépollution de sites. Cette dernière activité apparaît pourtant comme une des missions spécifiques de l’Agence, pour l’exercice de laquelle elle devrait détenir un véritable savoir-faire… »

Pour lire le rapport complet, cliquez ici.

 

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