Les affaires de GEG : des amis de 30 ans aux amis pour 60 ans

Publié le 9 mars 2014

A l’heure où droite grenobloise recycle sur sa liste des acteurs de premier plan des années noires vécues par la ville de Grenoble, rappelons ce qui s’est passé entre 1985 et 1986, notamment pour la privatisation de Gaz et électricité de Grenoble – GEG.

Informations inédites révélées lors d’une conférence de presse par Raymond Avrillier et Vincent Fristot, candidats sur la liste conduite Eric Piolle « Grenoble une ville pour tous ».

Tout Grenoblois doit savoir qu’avant avril 1986, le service du gaz et de l’électricité était géré en régie municipale, et bien géré. Le maire de Grenoble, Alain Carignon a décidé de privatiser les services publics locaux en les vendant aux grands groupes privés. Et voilà 30 ans que les usagers du gaz et de l’électricité payent la facture…

Pour privatiser la régie municipale du gaz et de l’électricité de Grenoble au profit de GEG et de ses actionnaires privés (42,5% LYONNAISE DES EAUX – SUEZ par sa filiale successivement dénommée UFINER, COFRETH, ELYO), Monsieur Alain CARIGNON a fait créer une société privée à Paris le 6 février 1985 par la banque CREDIT DU NORD, avec la complicité de Monsieur Pierre GASCON, son premier adjoint, de son directeur Auguste BLOISE, et de la BANQUE NICOLET LAFANECHERE (CREDIT DU NORD – BANQUE RHONE-ALPES BRA), soit plus d’un mois avant le principe de cette privatisation proposé par Messieurs CARIGNON et GASCON au conseil municipal.

Cette société dénommée LE PELETIER INVESTISSEMENT a changé de nom, d’objet et de PDG le 11 février 1986 pour se dévoiler sous le nom de GEG, avec pour objet « préparer le transfert de l’exploitation de la distribution du gaz, de l’électricité et de l’éclairage public de la ville de GRENOBLE » et pour PDG son actionnaire privé à titre personnel Monsieur Pierre GASCON.

L’opération a été dissimulée par le greffe du tribunal de commerce de Grenoble qui continue à certifier comme date d’immatriculation de la société GEG le 1er avril 1986 alors que cette société a été immatriculée au greffe du tribunal de commerce de Paris sous le numéro de registre du commerce et des sociétés RCS Paris n° 331 995 944, date d’immatriculation le 21 mars 1985 (dépôt du 5 mars 1985).

Soit la veille de la décision de principe concernant la privatisation du service public du gaz et de l’électricité ne sera annoncée que par la délibération n°1 du 22 mars 1985 trompeusement présentée sous le titre : « REGIE MUNICIPALE DU GAZ ET DE L’ELECTRICITE (RGE) – Transformation de la Régie Municipale en Société d’Economie Mixte Locale (SEML) ».

Au même moment, le 26 avril 1985, Monsieur Alain CARIGNON signe avec la GENERALE DES EAUX et la LYONNAISE DES EAUX un contrat qu’il appelle de « concession contrôlée » pour leur confier sans appel à concurrence la construction sur fonds publics et l’exploitation de la station d’épuration des eaux usées à Aquapole pour 25 ans à compter de 1989 (qui n’est pas une concession car c’est la collectivité qui paye les travaux, et qui ne sera pas contrôlée jusqu’en 1995 car les usagers et la collectivité vont payer des surprofits aux multinationales).

Puis ce seront les décisions illégales concernant l’eau, les déchets, le chauffage urbain, les parcs de stationnement et le stationnement sur voirie, le mobilier urbain, etc…

1. Une fausse date d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés

Sur l’extrait Kbis délivré par le Greffe du Tribunal de Commerce de Grenoble pour la société GAZ ET ELECTRICITE DE GRENOBLE, sigle GEG, numéro d’immatriculation 331 995 944 R.C.S. Grenoble », figure la « date d’immatriculation 01/04/1986 » qui est une fausse date d’immatriculation puisque la société GEG R.C.S 331 995 944 a pour date d’immatriculation le 21/03/1985.
Cette fausse date d’immatriculation a permis et permet toujours (sauf à faire le travail que nous avons fait) de dissimuler le montage de l’opération du 6 février 1985 au 1er avril 1986 (sic), et de dissimuler le fait qu’il n’y a pas eu « création » de la société d’économie mixte GEG en avril 1986 mais transformation de la société de Monsieur Pierre GASCON, dont il était actionnaire personnel et PDG, qu’il avait dénommé LE PELETIER INVESTISSEMENT puis GEG, par l’apport des capitaux et biens de la commune de Grenoble dont il était le premier adjoint.
Cette fausse date d’immatriculation correspond au transfert à Grenoble de la société GEG et non à son immatriculation au registre du commerce et des sociétés.

2. Les décisions de signer l’apport des biens de la commune et la délégation de service public pour 30 ans ont été prises par des personnes intéressées personnellement et incompétentes.

Les décisions de signer :

  • le 27 mars 1986 le contrat d’apport des biens de la commune à la société GEG de Monsieur Pierre GASCON (avant même qu’elle soit transformée en société d’économie mixte),
  • le 1er avril 1986 la convention d’exploitation pour 30 ans du service public du gaz, de l’électricité, de l’éclairage public entre la ville de Grenoble et la société GEG de Monsieur Pierre GASCON (avant même qu’elle soit transformée en société d’économie mixte),

décisions prises par Monsieur Alain CARIGNON et Monsieur Pierre GASCON intéressés à l’affaire, alors qu’ils étaient incompétents pour signer ces actes qui n’avaient pas été auparavant approuvés par le conseil municipal de Grenoble, et avant que la modification des statuts et la nomination des administrateurs de la société GEG ne soient décidés par le conseil municipal, et alors que Monsieur Pierre GASCON était personnellement intéressé à l’affaire par sa société GEG dont il était actionnaire personnel et PDG.

3. Les statuts de la société GEG transformée en S.E.M.L. ont été enregistrés au Greffe du Tribunal de Commerce comme approuvés par le conseil municipal de Grenoble par une délibération « n°51 B du 28 mars 1986 » alors que cette délibération n’était pas à l’ordre du jour de cette séance du conseil municipal, alors que cette délibération a été modifiée après le vote par Monsieur Pierre GASCON, et alors que la modification des statuts de la société GEG en société d’économie mixte n’ont été approuvés que par la délibération n°5 du conseil municipal du 16 mai 1986 (qui a été trompé sur le fait qu’il ne s’agissait pas d’une création de société mais d’une modification).

Les « Statuts de la S.E.M.L. GAZ et ELECTRICITE de GRENOBLE » ont été enregistrés le 12 août 1986 au Greffe du Tribunal de Commerce de Grenoble, par « Le Président du Conseil d’Administration P. GASCON » qui a présenté faussement ces statuts comme une « Annexe à la Délibération n°51 B du 28 mars 1986 complétant la Délibération du Conseil Municipal du 22 mars 1985 »

4. Une fausse « délibération n°51 bis du conseil municipal du 28 mars 1986» a décidé « la dissolution de la Régie Gaz et Electricité à compter du 14 avril 1986 ».

Une fausse délibération « n°51 bis » qui n’était pas inscrite à l’ordre du jour de la séance du conseil municipal du 28 mars 1986 décidant de « désigner pour représenter la Ville au sein du Conseil d’Administration, ainsi que dans les Assemblées Générales ordinaires et extraordinaires de la Société d’Economie Mixte Locale Gaz et Electricité de Grenoble, les élus suivants : Monsieur Pierre GASCON, Monsieur Christian GAUDUEL, Monsieur Jean DE DECKER, Monsieur Jean-Jacques GUILLEMOT, Madame Christiane D’ORNANO, Monsieur Jean-Charles SIMIAND, Monsieur Jean FOLCO » a été transmise au préfet de l’Isère Monsieur Jean MINGASSON le 2 avril 1986.

Cette « délibération n°51 bis du conseil municipal du 28 mars 1986» a même été « refaite par M. GASCON le 11 avril 1986 » qui a ajouté de son propre chef que le conseil municipal a décidé « la dissolution de la Régie Gaz et Electricité à compter du 14 avril 1986 », décision que le conseil municipal n’a jamais été votée par cette « délibération n°51 bis du conseil municipal du 28 mars 1986» ».
Cette falsification de décision publique a été réalisée par Monsieur Pierre GASCON sous la direction de Monsieur Alain CARIGNON et avec la complicité de Monsieur François TORT, secrétaire général de la ville de Grenoble de juillet 1983 à juillet 1986 (puis directeur adjoint des services du conseil général de l’Isère à partir de juillet 1986 à juillet 1989, puis directeur général du SIEPARG devenu communauté de communes à compter de juillet 1989), et de Monsieur Auguste BLOISE, directeur de la régie municipal du gaz et de l’électricité de Grenoble, puis directeur de la société GEG.

5. Les organisateurs de ces malversations

Pour mémoire, ces malversations ne sont que les premières de toutes celles de mise en place d’un système de corruption généralisée durant cette période qui va durer de 1985 à 1994.
Pour information, à la même époque et pendant plusieurs années :

onsieur Auguste BLOISE a abusé des biens sociaux de la société GEG et de ses filiales :

  • affaire BLOISE, POIRIER, GEG GEP GEGA : Cassation, chambre criminelle, 14 juin 2006, n°05-85912 ;
  • affaire BLOISE : Cassation, chambre criminelle, 7 novembre 2012, n°11-88241 ; …

Monsieur François TORT a recelé des abus de biens sociaux de la SEM Grenoble Parking Hoche :

  • emploi fictif dans une SEM de la ville de Grenoble (de janvier 1985 à août 1992) : Cour d’appel de Lyon, 23 novembre 2005, n°1635/04.

Monsieur Pierre GASCON a favorisé un emploi fictif :

  • affaire GASCON SAHIRI CODASE Tribunal correctionnel de Grenoble 24 novembre 1998, Cour d’appel de Grenoble 28 octobre 1999 ;

Monsieur Alain CARIGNON, maire de Grenoble de 1983 à 1995 a été corrompu :

  • affaire CARIGNON Lyonnaise des eaux : Cass. chambre criminelle, 6 février 1995, n°94-8542 ; 26 juin 1995, n°95-82333 ; 27 octobre 1997, 96-83698 ; 8 varil 1999, 98-84539 ; Cass. Civ., 20 novembre 2001, 99-13731 ; CE, 1er octobre 1997, n° 133849 ;
  • affaire CARIGNON PENEAU Rhoddlams échangeur d’Alpexpo : TGI Grenoble, 13 juillet 1999 ; Cour des comptes, Arrêt, 30 avril 2009, n° 54813 ;
  • affaire CARIGNON NEVACHE GID : Cass. chambre criminelle, 8 juin 1999, n°98-82608 ;

6. Les profiteurs

Monsieur Pierre GASCON a tiré des profits personnels de ces manipulations : les charges de sa société dont Monsieur Pierre GASCON était le PDG à titre d’actionnaire personnel au moins d’octobre 1985 à juin 1986, les comptes de cette société étant absorbés par la société GEG modifiée en société d’économie mixte à compter d’octobre 1985 ; les profits de 505 000 euros tirés de 1986 à 1995 par Monsieur Pierre GASCON du fait de ses rémunérations de président de GEG.

La banque CREDIT DU NORD dans la société GEG depuis le 5 février 1985 et son associée la BANQUE NICOLET LAFENACHERE ISERE (BNLI), ont monté la société GEG, par Monsieur Olivier LAFANECHERE actionnaire depuis le 11 février 1986 de la société GEG au capital de 38 112 euros, ils ont anticipé les décisions du conseil municipal de Grenoble pour devenir bénéficaires de GEG, bénéficiaires des contrats d’emprunts et de trésorerie de GEG et bénéficiaires de ses dividendes pendant 30 ans : d’ailleurs le 11 avril 1986 cette banque conserve ses 2 500 actions de la société GEG de Monsieur Pierre GASCON sans avoir à en apporter de nouvelles : « Les 402 000 actions nouvelles porteront jouissance du 1er janvier 1986 (…) Les fonds provenant de la souscription seront déposés à la BANQUE NICOLET LAFANECHERE et de l’ISERE… ».
Pour mémoire le capital de la société GEG de Monsieur Pierre GASCON passe ainsi de 250 000 F (38 112 euros) à 106 438 400 F (16 226 429 euros), la commune de Grenoble apportant les biens en capital.
L’opération va être faite en deux temps : d’abord une augmentation du capital le portant de 250 000 F (38 112 euros) à 106 438 400 F (16 226 429 euros) par l’apport de 106 188 400 F (16 188 317 euros) de la commune ; puis une augmentation du capital le porte de 106 438 400 F (16 226 429 euros) à 146 638 400 F (22 354 880 euros) par l’apport en capital de 31 500 000 F (4 802 144 euros) d’UFINER (LYONNAISE DES EAUX, Monsieur Raymond ROUX), 7 000 000 F (1 067 143 euros) d’EDF, 1 000 000 F (152 449 euros de MERLIN GERIN, 350 000 F (53 357 euros) de l’entreprise PASCAL, 350 000 F (53 357 euros) de la société de Monsieur Gilbert MUSIQUIAN.

Ces personnes et sociétés vont tirer profits des dividendes de la société GEG pendant 30 ans.

7. Les avantages de la dissimulation du montage de cette opération

En procédant ainsi, outre les prises illégales d’intérêt de Monsieur Pierre GASCON et du CREDIT DU NORD BNLI, Monsieur Alain CARIGNON et la LYONNAISE DES EAUX ont disposé rapidement d’une société leur permettant de procéder à cette privatisation en mars 1985 qu’ils comptaient avoir effet à compter du 1er janvier 1985. Mais un recours (avec des motifs erronés) a suspendu de fait la décision jusqu’au jugement de rejet du 12 février 1986, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté les demandes tendant à l’annulation de la délibération en date du 22 mars 1985 (confirmé par le Conseil d’Etat, GEG, 28 juin 1989, n° 77659).

Dès qu’ils ont connu ce jugement Monsieur Alain CARIGNON et Monsieur Pierre GASCON, avec leurs complices du CREDIT DU NORD en présence de Monsieur Olivier LAFANECHERE représentant la BANQUE NICOLET LAFANECHERE ET DE L’ISERE, actionnaire, ont, à Paris, fait nommer Monsieur Pierre GASCON, actionnaire privé, PDG de LE PELETIER INVESTISSEMENT, ont modifié la dénomination de la société en « GEG », modifié l’objet qui est devenu « La Société a pour objet de préparer le transfert de l’exploitation de la distribution du gaz, de l’électricité et de l’éclairage public de la ville de GRENOBLE à une Société d’Economie Mixte Locale régie par la loi du 08/07/1983. Et d’une façon générale, assumer toutes fonctions visant à accomplir l’objet ci-dessus, et réaliser à cet effet, toutes opérations d’ordre financier, commercial, industriel, mobilier et immobilier. », et rapatrié cette société cachée de Paris à Grenoble.

Ils ont mené leurs opérations irrégulières en février, mars, avril, mai, juin 1986 au bénéfice principal de la LYONNAISE DES EAUX qui est devenue GDF SUEZ (« Dolce Vita » !).

D’autre raisons plus cachées qui nous échappent ont certainement motivé ces malversations, qui ne peuvent être élucidées que par une instruction judiciaire sérieuse qui n’a pas été menée jusqu’alors.
Il s’agissait de la première grosse opération de « partenariat public privé » au bénéfice de ces sociétés privées.

Le 3 octobre 1987 Monsieur Alain CARIGNON et les hauts responsables de la LYONNAISE DES EAUX concluent un pacte de corruption pour la privatisation du service public de l’eau et de l’assainissement de Grenoble au bénéfice de la LYONNAISE DES EAUX pour 25 ans.

Il faudra attendre les actions que nous avons menées de 1989 à 1993 pour que cette corruption fasse l’objet, en 1994, d’une instruction judiciaire… à Lyon ; il faudra attendre 1997 pour que la délibération de privatisation du service public de l’eau de Grenoble de 1989 soit annulée pour tromperie du maire Monsieur Alain CARIGNON (CE, 1er octobre 1997, Avrillier, n°133849) ; il faudra nos actions pour que la remunicipalisation du service de l’eau prenne effet en 2000 (avec 90 millions d’euros d’économie pour les usagers de l’eau et l’assainissement de 2000 à 2008).

8. Les payeurs

Les usagers du gaz et de l’électricité ont payé les dettes de la société GEG en 1985 et les charges de cette société dont Monsieur Pierre GASCON était le PDG à titre d’actionnaire personnel au moins d’octobre 1985 à juin 1986, les comptes de cette société étant absorbés par la société GEG modifiée en société d’économie mixte à compter d’octobre 1985.

Les usagers du gaz et de l’électricité ont payé les abus de biens sociaux de GEG et ses filiales recelés par Monsieur Auguste BLOISE directeur de la société GEG à compter de 1986.

Les usagers du gaz et de l’électricité ont payé pendant 30 ans les profits réalisés par les actionnaires de la société GEG et les profits de 505 000 euros tirés de 1986 à 1995 par Monsieur Pierre GASCON du fait de ses rémunérations de président de GEG.

Les usagers du gaz et de l’électricité ont payé illégalement sur leurs factures l’éclairage public de la ville (CE, 31 juillet 2009, GEG contre Avrillier, n°296964).

Les présidents successifs de la société GEG ont caché ces informations essentielles.

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Un commentaire sur “Les affaires de GEG : des amis de 30 ans aux amis pour 60 ans”

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