Gratuité des transports en commun, une belle idée, mais comment la réaliser ?

Publié le 3 octobre 2014

AubagneLes transports en commun dans l’agglomération sont pour l’instant de la compétence du SMTC, syndicat mixte constitué à parité par la Métro et le Conseil Général de l’Isère (CGI). Il s’agit d’un service public administratif et donc les usagers ne sont pas obligés de payer l’intégralité du service contrairement aux services publics industriels et commerciaux comme l’eau, le gaz, l’électricité, l’assainissement, le chauffage urbain… Il peut y avoir des tarifs sociaux et même aller jusqu’à la gratuité. Pour de multiples raisons, la gratuité d’un tel service serait positive pour renforcer l’alternative aux déplacements en automobile et donc participerait à la lutte contre la pollution et les gaspillages de temps dans les embouteillages. Ce serait aussi une mesure sociale forte car le budget déplacement est souvent lourd pour les ménages.

Mais est ce possible économiquement ?

Voici la structure actuelle du budget de transports en commun dans l’agglomération.

Le SMTC, autorité organisatrice des transports en commun, a des recettes de fonctionnement annuelles de 172,5 M€ qui proviennent :

  • du versement transport : 95 M€ versé par les entreprises de plus de 9 salariés dans l’agglomération (2% de la masse salariale).
  • de la Métro et du CGI : ils versent à part égales au total 73,5 M€, payés par les contribuables de l’agglomération et du département.

–       d’autres très faibles recettes.

Coté charges de fonctionnement le total est de 124 M€ dont 86,5 M€ pour l’exploitation du réseau de transport par la SEMITAG et divers autres prestataires. Le reste étant les frais financiers de la dette (environ 19 M€) et les diverses dépenses de fonctionnement courant.

Le SMTC dispose pour 2014 d’environ 48,5 M€ d’autofinancement pour ses investissements, ce qui permet de rembourser l’annuité en capital de la dette de 36 M€ et d’aider un peu au financement des équipements (108 M€ en 2014). En 2014 le SMTC fera un emprunt d’environ 80 M€ pour financer les investissements. Sa dette est lourde et atteindrait 680 M€ fin 2014.

Quelle est la contribution des usagers ? Ils payent des tickets ou des abonnements à la SEMITAG qui a un contrat de délégation de service public avec le SMTC qui se terminera fin 2020. Le montant de la contribution des usagers est d’environ 32 M€. Avec cette somme et le versement du SMTC, la SEMITAG équilibre son exploitation avec ses 1350 salariés (environ). Le total des charges d’exploitation est d’environ 114 M€ avec 77 M€ de charges salariales, le reste sont des frais de maintenance des bus et tram, l’énergie (combustibles et électricité), des sous-traitances, les impôts et taxes …

Pour savoir ce que coûterait la gratuité totale il faudrait avoir les coûts liés à la non gratuité : gestion de la billettique et des contrôles. Mais la gratuité entrainera une augmentation de la demande et il faudra renforcer l’offre de service. On peut estimer qu’il faudra conserver l’ensemble du personnel en le réaffectant aux nouvelles tâches notamment de conduite et de gestion pour l’amélioration du réseau. Il faudra éventuellement augmenter le nombre de véhicules… Une étude détaillée devrait donner des chiffres précis, mais l’ordre de grandeur restera. Le coût prévisionnel de la gratuité totale sera d’environ 30 M€ si on veut garder la qualité de service.

Le versement transport est au maximum légal. Les collectivités Métro et CGI peuvent peut être faire un effort mais il n’y a rien d’évident vu l’état de leurs finances et des désengagements de l’Etat sur leurs dotations. Vouloir trouver ces 30 M€ dans les impôts locaux, c’est reprendre d’une main ce qu’on a donné de l’autre et en plus les impôts locaux sont injustes. De plus il faudrait être fixé sur l’avenir du SMTC et connaître s’il va continuer ou disparaître lors du passage en métropole. On devrait le savoir bientôt.

Soit l’Etat intervient pour subventionner lourdement le SMTC et la gratuité est possible, soit il ne le fait pas et il faudra attendre. Malheureusement vu la politique nationale actuelle où l’Etat diminue ses dotations aux collectivités, il n’est pas du tout dans la logique de favoriser des opérations de ce type.

La seule solution envisageable à court terme c’est une gratuité ciblée sur une partie des usagers comme l’a fait le Rassemblement citoyen de la gauche et des écologistes à Grenoble en proposant la gratuité pour les 18-25 ans, tranche d’âge qui pose des problèmes car adultes mais n’ayant pas accès aux minima sociaux et donc particulièrement fragiles quand les parents ne peuvent ou ne veulent pas aider. Il faut vérifier si l’économie de cette mesure est tenable compte tenu que les collectivités Métro et CGI ne peuvent pas financièrement augmenter fortement leurs subventions car elles vont subir les diminutions des dotations de l’Etat durant les 3 ans à venir.

Le CGI veut sortir du SMTC, on n’en connait pas les conséquences financières, qui peuvent être très négatives suivant les scénarios. Il est donc trop tôt pour avancer sur ce sujet d’importance.

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