Et si on parlait de canicule : les îlots de chaleur en ville

Publié le 17 juillet 2015
photo-lisa-marcelja (DL)

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La cuvette grenobloise a vécu début juillet un épisode de pollution atmosphérique sévère, notamment le 7 juillet où la concentration d’ozone a atteint 114 microgrammes/m3 et les particules fines (PM10) 45 microgrammes/m3 frôlant le seuil d’information. La canicule est arrivée de manière brutale, heureusement sur une courte durée, mais elle risque de revenir.

C’est le moment de réfléchir sur les ilots de chaleur en ville et comment les minimiser afin de nourrir les réflexions sur l’évolution de la ville notamment lors de la révision du PLU de Grenoble en vue du PLU intercommunal. Des propositions de végétalisation fleurissent ici et là, notamment l’ODTI propose, sur la place surchauffée Edmond Arnaud, un « Oasis des délices ».

Voici des extraits d’un article où E. Cordeau de l’Institut d’aménagement et d’urbanisme d’Ile-de-France, répond aux questions de Terra eco.


« Pourquoi fait-il plus chaud en ville ?
La nuit, les surfaces restituent la chaleur emmagasinée au cours de la journée sous forme d’infrarouges. C’est aussi à ce moment-là que le risque de santé publique est le plus important pour les personnes fragiles, car les corps sont en danger s’ils ne parviennent pas à tomber en température durant le sommeil. Sur une grande surface de pelouse, les infrarouges vont sortir du sol pour se libérer jusqu’au ciel. Dans une rue étroite bordée d’immeubles hauts, ils vont être captés par les surfaces minérales qui font obstacle avec le ciel. Plus l’îlot urbain est dense et compact, plus il fera chaud. C’est aussi une question de lignes. Prenons la Seine, par exemple. En théorie, elle devrait permettre de rafraichir la ville, surtout en soirée. Dans les faits, c’est plus compliqué, car à certains endroits, elle est bordée d’immeubles continus qui empêchent l’air de pénétrer dans le tissu urbain. Ce phénomène d’îlot de chaleur urbain est aussi aggravé par des conditions anthropiques, comme la pollution ou la climatisation. Sans oublier les brises thermiques…

Qu’appelez-vous une « brise thermique » ?
En l’absence de vent fort, comme c’est souvent le cas en période de canicule, quand il y a des différences de températures entre deux zones, des vents faibles se créent, des zones les plus froides vers celles les plus chaudes. Cela crée, selon les configurations morphologiques de la ville, des effets de concentration au niveau local de la pollution urbaine, compliquant la vie de ceux qui avaient déjà trop chaud. Mais cela participe aussi à la ventilation et au rafraîchissement de l’air dans certaines rues.

Est ce que cela signifie que nos villes sont mal construites ?
Oui et non. Il est difficile de juger les erreurs du passé quand on connaît la fin de l’histoire. Il y a eu un vrai décrochage dans l’après-guerre. C’était l’époque du baby boom : la quantité importait plus que la qualité. Les architectes n’accordaient plus autant d’importance au bioclimatisme. Nous avons voulu des villes qui ne tenaient pas compte de l’environnement. Résultat : on a trop chaud. Les progrès techniques n’ont pas forcément joué en notre faveur. Construire de grands immeubles de bureaux – entièrement vitrés – peut être considéré comme une aberration. On l’a fait car on savait qu’on allait pouvoir recourir à la climatisation. Aujourd’hui, on se rend compte que cette climatisation rejette de la chaleur en ville et nous demande de l’électricité qui implique, elle, des centrales nucléaires, qui devront elles-mêmes faire face, l’été, à des périodes de sécheresse qui peuvent perturber leur production. Donc plus de clim, plus de rejets de chaleur, plus de consommation électrique… C’est un cercle vicieux.

Les îlots de chaleur urbains sont-ils irréversibles ?
Non, pas du tout. D’ailleurs, il ne faut pas voir le tableau entièrement noir. Il existe des zones d’équilibre entre les espaces naturels et la ville. Le parc forestier de la Poudrerie, à Sevran (Seine-Saint- Denis) a, par exemple, permis de rester sous la barre des 20 degrés durant les nuits de la canicule de 2003, alors que dans tout le cœur de métropole, la température est restée au dessus. En moyenne, on connaît un jour de canicule par an. Si la prospective voit juste, ce seront dix ou vingt jours de canicule annuels à partir de 2080. Il faudra faire quelque chose. L’idée n’est pas de tout raser pour reconstruire : on peut, par exemple, jouer sur les couleurs des bâtiments ou la porosité des matériaux pour augmenter leur capacité à réfléchir l’énergie lumineuse. On peut aussi penser aux toitures végétalisées dans des îlots urbains très compacts et surtout reconstituer des espaces de pleine terre arborés dès que c’est possible, dans les secteurs les plus carencés. »

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