Étonnements de fin d’année 2015 !

Publié le 1 janvier 2016

etonnementVoici les étonnements d’un directeur d’association grenobloise lors d’un dialogue avec une stagiaire du secteur de l’éducation spécialisée :

Etonnement 1 !

  • Il y a quelques jours, dans notre association qui accueille des migrants et lutte contre les discriminations, une stagiaire, étudiante dans le secteur de l’éducation spécialisée, est venue me voir en me disant : « J’ai une question à vous poser. Vous dites souvent, parlant de l’association que c’est une entreprise. Pourquoi ? Qu’est-ce qu’une association a à voir avec une entreprise ! Je ne suis pas au clair là-dessus ! » Je précise que cette étudiante est particulièrement intelligente et particulièrement proactive, ce que reflètent d’ailleurs la nature et le contenu de sa question. Pour d’autres, en effet, ce type de propos habituels dans ma bouche ont coulé comme la pluie sur les plumes d’un canard. 

  • Je lui ai expliqué les choses et, notamment, le fait qu’au sein de cette association, comme dans toute entreprise, nous produisons de la valeur ajoutée, fondement de ce que d’aucuns appellent aujourd’hui, le commun. Pour cela, il faut entre-prendre, en prenant en compte et en faisant avec ces relations indicibles entre les personnes (les gens) et entre les personnes et les choses (l’environnement, les institutions). En mobilisant de la force de travail qualifiée, l’association est alors en mesure de se saisir et de faire avec cet « entre » pour coproduire de la valeur nouvelle, la valeur ajoutée.
  • Bien évidemment, il m’a fallu être un peu plus explicite, plus pédagogique et plus didactique en prenant des exemples, notamment l’art de cuisiner, car lorsque je lui ai demandé si dans son centre de formation de travailleurs sociaux étaient enseignés quelques rudiments d’économie, vous imaginez ce qu’a pu être sa réponse ! Bien évidemment, les travailleurs sociaux « travaillent du social », mais serait-ce un social où l’économie et l’entre-prise seraient… hors champ ? Qui sait s’il n’en serait pas de même des acteurs du social, à savoir ces « gens de peu » que prisait tant le sociologue Pierre Sansot avec qui les travailleurs sociaux doivent « faire avec » ? A ce point de notre discussion, devant les doutes de la stagiaire, mon étonnement s’est mué en inquiétude !

Etonnement 2 !

  • Nous avons poursuivi notre discussion sur ce qu’était censé produire le travail social car, s’il y a travail et donc dépense de force de travail, ce processus de production doit bien déboucher sur un résultat, même si ce résultat, ce produit, ne trouve pas la réalisation de sa valeur immédiatement ou dans un futur plus ou moins proche.  Elle m’a alors tenu un propos là encore, tout à fait étonnant : « Nos enseignants du centre de formation nous disent que nous n’avons pas à nous soucier du résultat de notre travail car nous n’avons qu’une obligation de moyens ». Bref, dès lors que les travailleurs sociaux ont mobilisé les moyens nécessaires prévus dans les procédures, ils pourraient selon leurs enseignants être tranquilles et quittes ! J’avoue être tombé de ma chaise comme frappé par le tonnerre (l’origine étymologique d’étonnement).
  • Ne faut-il pas voir dans ces propos qui ont suscité chez moi de l’étonnement, l’origine d’une partie de nos difficultés actuelles dans la mise en œuvre de nos activités et des politiques publiques ? En conséquence, n’y aurait-il pas là, dans ces propos, un argument de poids pour justifier les coupes pratiquées par les collectivités territoriales, et notamment les départements, dans leurs budgets de « dépenses sociales et dans ceux du travail social », dépenses dont  Michel Dinet, président du conseil général de Meurthe et Moselle disait qu’elles devaient être qualifiées d’investissement social. C’est vrai, mais qui dit investissement dit aussi avoir des… résultats.

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