Depuis son lancement en juin 2016, le plan de sauvegarde des services publics locaux est au centre des débats politiques grenoblois et des perturbations de l’assemblée municipale par quelques manifestants. Pourtant, de plus en plus d’habitants en comprennent la nécessité compte tenu de l’austérité financière imposée par le gouvernement qui menait tout droit à la mise sous tutelle du budget de la ville et de l’engagement pris devant les électrices et les électeurs de ne pas augmenter les impôts dans une commune qui bat déjà tous les records d’imposition.
Certains se demandent maintenant pourquoi ce plan n’a pas été débattu avec la population. Derrière cette question il y a l’affirmation que la mairie pouvait faire autrement, notamment sur la question des bibliothèques, sans doute en trouvant, ailleurs dans le budget, des économies à faire portant sur d’autres activités et sur d’autres personnels. En fait les choses sont beaucoup plus compliquées que cela et vu l’urgence nécessaire à la mise en place de ce plan, il s’avère qu’il était impossible de mettre ce plan au débat public. Par contre associer les habitants à certaines conséquences de ce plan est une nécessité.
Le plan de sauvegarde n’est pas qu’un plan comptable reposant sur des transferts de dépenses et de ressources. C’est surtout, et avant tout, un plan de réorganisation et de restructuration en profondeur des services publics municipaux.
Tout le monde peut comprendre que tout ne peut pas se débattre dans l’urgence, avec les habitants, d’autant que trop peu d’habitants (voire des élu-es) s’intéressent et comprennent la mécanique budgétaire. C’est un mal bien français !
Trouver 700 000 € d’économies pour éviter de fermer des bibliothèques, ne semble pourtant pas la mer à boire dans un budget de fonctionnement de 250 millions d’euros… Présenté ainsi, cela semble du bon sens, à ceci près que le fonctionnement de la grande machine municipale comme la mairie de Grenoble ne se réduit pas à des millions d’euros qu’il est possible de transférer d’une activité à l’autre ou en pratiquant des coups de rabots identiques sur tous les postes. La mairie de Grenoble emploie plus de 4 000 agents (avec le CCAS). C’est une organisation lourde, compliquée et complexe, mise en place souvent il y a des dizaines d’années, selon des procédures qui ont pu générer de bonnes ou de mauvaises habitudes (comme partout), alors que les défis, les enjeux et les contraintes ont changé radicalement et que sont apparues des technologies nouvelles en matière d’information et de communication (informatisation et dématérialisation).
Le plan de sauvegarde ne consiste donc pas seulement à aligner des économies dans le budget de fonctionnement constitué, rappelons-le, d’une masse importante de salaires et de traitements qui augmentent plus vite que les ressources, mais bien, essentiellement, de faire une importante restructuration de l’organisation des services pour atteindre les résultats recherchés sans mettre en péril leur bon fonctionnement.
C’est aussi une situation historiquement inédite car, jusqu’en 2015, le montant des baisses des dotations financières de l’Etat pouvaient être compensées par des ajustements à la marge au sein du budget de fonctionnement de la ville. Ce n’est plus possible avec les coupes impressionnantes décidées par le gouvernement au lendemain des élections municipales de 2014. Compte tenu de la violence de ces coupes, il est impossible financièrement de remplacer tous les départs de personnels (retraites ou changements de collectivité).
Il faut donc procéder à un examen détaillé, service par service, pour trouver les meilleures réorganisations possibles. Comme souvent, tout n’est pas tout blanc ou tout noir contrairement à ce qu’affirment certains. Nous sommes face à d’infinies nuances de gris qui exigent des approches appropriées, diverses et spécifiques selon les secteurs de compétences et d’activités.
Ouvrir un débat sérieux sur un tel plan avec la population nécessitait donc de prendre du temps vu la complexité de l’opération. Or l’urgence des décisions à prendre n’accordait aucun délai sauf à sacrifier des investissements prioritaires pour l’avenir. Tout retard dans les économies dégradait l’épargne de la collectivité et diminuait la capacité d’investissement sur la durée du mandat.
Il a fallu six mois aux élu-es et aux directions des services pour procéder à un examen complet de la situation afin de trouver des réponses qui soient réalistes, viables et soutenables sur le moyen et long terme. Avec les réorganisations envisagées, ils n’ont d’ailleurs pas totalement atteint l’objectif d’économiser en deux ans les 14 M€ exigés. Ils ont trouvé, à ce jour environ 12,7 M€ ce qui a va permettre de faire une bonne partie du chemin. Pour permettre un débat utile et non un simulacre, il aurait fallu expliquer, en prenant le temps, comment se traduisent ces économies obligatoires en termes d’organisation des services. Cela supposait des formations spécifiques sur le détail du fonctionnement des services de la mairie. Pour le moment c’est inatteignable quand on voit la grande difficulté qu’il y a pour seulement débattre du budget qui est pourtant une mécanique beaucoup plus simple. Comment, en effet, expliquer aux habitants que tel choix était possible rapidement et que tel autre ne l’était pas pour des questions d’organisation, de départs à la retraite, d’absentéisme, de compétences qu’il fallait maintenir, d’évolution de la règlementation…
Il faut réaffirmer que la solution choisie d’associer étroitement les responsables des services à cette recherche d’économie était la seule solution normale, viable et raisonnable car eux ont la responsabilité et la connaissance directe, et au jour le jour, du fonctionnement des services.
En revanche, ouvrir des débats avec les habitants intéressés sur les mesures d’accompagnement de ce plan de sauvegarde est recommandé et légitime, c’est ce qui se fait ou tente de se faire.
La seule alternative à ce plan de sauvegarde, si on ne voulait pas sacrifier l’investissement était une augmentation des taux des impôts locaux (l’augmentation de la dette n’étant plus possible).
La majorité municipale a exclu d’augmenter les taux des impôts locaux car ils sont trop injustes et très élevés (les Grenoblois payent plus d’impôts locaux que d’impôts sur les revenus) et d’ailleurs les oppositions municipales, les habitants, les associations, les syndicats ne le demandent pas. Le montant de l’impôt est déjà revalorisé automatiquement de l’inflation chaque année par la loi et donc choisir d’augmenter en plus le taux des impôts même légèrement, c’est immédiatement faire peser l’austérité gouvernementale tout d’abord sur ceux qui ont le moins de ressources. Ce n’est pas compatible avec le bouclier social et écologique mis en place par la majorité municipale
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