Plan Pauvreté : de bonnes intentions mais attention aux financements

Publié le 21 septembre 2018

Les nombreuses réactions, dont des associations d’élus, suite à l’annonce du plan de lutte contre la pauvreté, disent toutes un peu près la même chose : de bonnes intentions mais il y a des interrogations et des inquiétudes fortes sur les financements et une exigence de concertation pour la mise en œuvre.

L’association des Maires de France (AMF) dans son communiqué du 14 septembre demande à ce que les modalités de mise en œuvre du plan soient décidées ensemble par l’Etat et les collectivités et que « les moyens financiers doivent être précisés et ne pas dissimuler une nouvelle fois le recyclage de crédits existants ».

« …La mise en place d’une concertation renforcée et équilibrée entre l’Etat et les élus locaux est la condition sine qua non de la réussite de la stratégie pauvreté. L’AMF estime qu’il est inacceptable que soit imposée aux collectivités une obligation de résultats en matière de lutte contre la pauvreté et que les expérimentations prévues ne soient pas étendues à toutes les catégories de territoires, notamment les communes rurales et les petites villes.

Les moyens financiers doivent être précisés et ne pas dissimuler une nouvelle fois le recyclage de crédits existants. L’AMF relève la contradiction du gouvernement : solliciter la mobilisation des collectivités va légitimement peser sur leurs dépenses de fonctionnement au moment même où la contractualisation financière qu’il a imposée vient entraver leurs moyens d’intervention, en particulier en matière sociale. L’AMF reste inquiète quant à l’insuffisance des moyens financiers dégagés par la CNAF pour mettre en œuvre les ambitions affirmées en termes de politique familiale, notamment pour la petite enfance et l’enfance. Elle regrette également la suppression des contrats aidés qui sont un indéniable dispositif d’insertion pour les publics les plus éloignés de l’emploi et contribuent à la vitalité du tissu associatif local. La réalisation par l’AMF, en lien avec l’Etat, d’un vade-mecum sur la transparence de l’attribution des places en crèche, qui est l’un des axes du plan pauvreté, témoigne de la démarche constructive des élus locaux. L’AMF attend des axes de déclinaison du plan pauvreté qu’ils soient suffisamment souples pour permettre aux territoires de se les approprier et que l’Etat soit à l’écoute des besoins exprimés localement par les citoyens auprès des élus locaux. »

Le réseau français des villes éducatrices s’interroge : « l’État entend-il mobiliser les acteurs locaux quand il les prive chaque année de moyens financiers supplémentaires et désormais d’une part importante de leur autonomie budgétaire. Les mesures de lutte contre la pauvreté doivent s’inscrire dans une politique cohérente d’équité sociale et territoriale. »

Dans un communiqué du 13 septembre, l’Union sociale pour l’habitat (USH) appelle à la cohérence entre les actions annoncées et la défense du logement social :

« L’USH rappelle que dans un contexte où plus de 2 millions de demandeurs de logements sociaux ont été enregistrés en 2018 et où un nouvel entrant sur deux dans le parc social vit en dessous du seuil de pauvreté, le Gouvernement a, dans la loi de finances 2018, largement amputé les moyens des organismes de logements sociaux, en les ponctionnant en 2018 de plus de 800 millions d’euros et en portant le taux de TVA de 5,5 à 10%, et qu’il s’apprête à renouveler en 2019 ces mesures.

Parallèlement, après une baisse massive des APL en 2018, le Gouvernement a annoncé pour 2019 une revalorisation des APL de 0,3%, soit à un niveau largement inférieur à l’inflation annoncée. Leur nouvelle méthode de calcul (« contemporanéisation ») ne viendra pas corriger ces baisses.

Par ailleurs, l’USH constate que l’État a aujourd’hui quasiment totalement disparu du financement des « aides à la pierre » qui concourent pourtant au financement des logements sociaux au moment de leur construction, et sont un des éléments nécessaires à la production de logements à bas et à très bas loyers.

Ces mesures ne sont pas sans impact. Alors qu’en 2017 la programmation de logements sociaux a connu une baisse de 9%, elle devrait à nouveau connaître une baisse de l’ordre de 5% en 2018.

Pour Jean-Louis Dumont, président de l’USH, à la veille du Congrès Hlm de Marseille, « Nous sommes en plein paradoxe, voire en pleine contradiction. Ce plan est nécessaire, urgent mais, dans le même temps, l’État non seulement se désengage du financement des aides à la pierre, mais il ponctionne très sévèrement les ressources des organismes Hlm en diminuant les APL. C’est pour le moins incohérent, et les grands perdants de cette incohérence, pensée et pilotée par Bercy, ce sont les centaines de milliers de familles modestes et pauvres qui, au final, attendront un logement social encore plus longtemps. »

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