L’action du réseau des Missions Locales pour les jeunes de 16 à 25 ans, est efficace mais déstabilisée depuis plusieurs mois. Après la menace de fusion des Missions Locales au sein de Pôle emploi, la baisse des crédits de la CPO (convention pluriannuelle d’objectifs) et les retards de versement des subventions en 2019, les modifications rétroactives des règles de paiement de l’accompagnement de la Garantie jeunes, les Missions Locales sont mises dans l’incapacité de répondre aux besoins d’accompagnement de centaines de milliers de jeunes et de satisfaire les objectifs du PIC (pole d’investissement dans les compétences) et du plan pauvreté (qui n’arrive pas à répondre correctement aux problématiques liées à la pauvreté). La réalité est que l’Etat fait des économies sur le dos des jeunes en situation de précarité. Conséquence : 30 % des Missions Locales seraient au bord de la cessation de paiement.
La situation de la Mission Locale de Grenoble est impactée par ces différentes mesures. 4800 jeunes sont inscrits, 60 % d’entre eux, sont issus des QPV (quartier politique de la ville), et un fort pourcentage ont un niveau infra bac. Les jeunes inscrits sont non seulement en demande d’accès à l’emploi, mais étant donné leur niveau insuffisant de formation, ils ont besoin d’accompagnement pour effectuer toutes leurs recherches de formation ou d’emploi, à cela s’ajoutent aussi les difficultés d’accès aux soins de santé et au logement et de mobilité. Près de 300 jeunes grenoblois ont bénéficié de la Garantie Jeunes, qui est un dispositif qui a fait ses preuves, par un accompagnement soutenu durant une année avec un conseiller pour 50 jeunes, (1 conseiller pour 100 jeunes pour le reste des jeunes inscrits). Il y a des temps de regroupement, avec l’apprentissage du travail de groupe et d’accompagnement vers des stages en entreprises, mais aussi d’entrée en formation, et d’accès à l’emploi ainsi qu’une allocation de 480 € mensuels durant 12 mois. Le plan pauvreté devait conforter ce dispositif, hélas, pour cette année 2019, les réponses concrètes ne sont pas au rendez-vous des besoins réels.
Malheureusement c’est la baisse progressive des financements publics. Pourtant les besoins sont conséquents. Alors les Missions Locales répondent de plus en plus à des appels à projets de fondations privées. Ces réponses nécessitent du temps administratif important, et pourtant c’est le seul moyen qui reste pour offrir d’autres ouvertures que la seule réponse aux besoins d’accès à un emploi.
S’ils n’avaient pas interrompu leur scolarité trop tôt, ils seraient inscrits dans des établissements de formation divers, qui leur permettraient l’accès à la culture, au sport… En 1982, Bertrand Schwartz avait pensé les Missions Locales comme une autre chance pour ces jeunes décrochés trop tôt du système scolaire, avec un mode différent d’une scolarisation classique grâce à une qualité d’offre de service. C’était il y a 37 ans, les besoins sont identiques, pour un nombre de jeunes dont les difficultés économiques s’aggravent, et dont le nombre diminue très peu.
Au niveau national, chaque année, les Missions Locales accompagnent 1,3 million de jeunes, notamment les plus démunis, dont 584 000 accèdent à l’emploi, 40 000 à un contrat en alternance, 186 000 bénéficient d’une formation professionnelle et 223 000 d’une immersion professionnelle. Les 436 Missions Locales, constituent le service public territorial de l’insertion et de l’accompagnement des jeunes qui est l’acteur central de l’accès des jeunes à l’emploi dans le cadre de la stratégie de lutte contre la pauvreté. Dans le cadre de la loi de finances pour 2019, il manquerait 80 millions d’euros pour mettre en œuvre la garantie jeunes, dont les missions locales sont chargées. Sur les 160 millions d’euros prévus pour 2019, il n’y a finalement que 80 millions d’euros en paiement pour 2019. Or les objectifs en matière de garantie jeunes restent les mêmes, à savoir 100.000 jeunes par an, comme en 2018. Au total, depuis le lancement du dispositif en octobre 2013, plus de 300.000 jeunes ont été accompagnés.
La qualité de l’action des Missions Locales est plébiscitée par les jeunes eux-mêmes, dont plus de 9 sur 10 sont satisfaits voire très satisfaits de l’accueil et de l’accompagnement par leur Mission Locale.
Une étude de la DARES (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques), du 17 avril 2019 intitulée : « La garantie jeunes : quels jeunes et quel bilan après cinq ans ? » démontre l’intérêt positif de ce dispositif. Les résultats de l’insertion, à l’issue du parcours, sont plutôt bons, compte tenu du contexte. A l’issue de leur parcours, 29 % des bénéficiaires sont en emploi huit mois après l’entrée en dispositif, 41 % au bout de 19 mois. Les jeunes sortent aussi un peu plus autonomes.
« Entre octobre 2013 et juillet 2018, 229 000 jeunes ont intégré la Garantie jeunes. Conformément à la cible du dispositif, ces jeunes ni en emploi, ni en études, ni en formation au moment de l’entrée en Garantie jeunes connaissaient une situation économique et sociale précaire et présentaient des freins importants à l’emploi. Ils étaient peu diplômés (la moitié d’entre eux n’a pas validé une formation de niveau CAP-BEP) et la plupart d’entre eux étaient déjà suivis par la mission locale au moment de leur entrée en Garantie jeunes.
L’accompagnement en Garantie jeunes est intensif, en particulier au cours des deux premiers mois.
Les jeunes assistent à de nombreux ateliers et, selon la logique du « work first », réalisent de nombreuses immersions en entreprises. Ils touchent en moyenne 3 900 euros d’allocation au cours de l’accompagnement, qui dure en moyenne 11 mois en Garantie jeunes.
L’emploi progresse parmi les jeunes bénéficiaires après l’entrée en Garantie jeunes, en particulier l’emploi durable. 29 % des bénéficiaires sont en emploi 8 mois après l’entrée en dispositif, 41 % au bout de 19 mois. L’évaluation de l’impact de la Garantie jeunes sur les trajectoires d’emploi des bénéficiaires montre qu’elle aurait augmenté le taux d’emploi des bénéficiaires de 10 points 11 mois après l’entrée en dispositif. Cet effet perdure dans les mois qui suivent la sortie de l’accompagnement et correspond essentiellement à une augmentation du taux d’accès à l’emploi durable. »
L’Union Nationale des Missions Locales (UNML) demande :
- le versement immédiat des avances des crédits de la Convention pluriannuelle d’objectifs (CPO) et de la Garantie jeunes à toutes les Missions Locales,
- des éclaircissements sur les modalités de leur comptabilisation et des montants 2019,
- l’abondement des crédits de l’accompagnement des jeunes dans le cadre de la Garantie jeunes à hauteur de 160 millions d’euros en 2019, et leur maintien sur les prochaines années pour réussir la lutte contre la pauvreté des jeunes,
- la négociation d’une convention pluriannuelle tripartite Etat-Région-UNML assurant un socle de financement structurel aux Missions Locales qui leur permettrait d’assurer leur mission de Service public territorial de l’insertion des jeunes.
« L’UNML regrette que cette instruction ne traite pas de la question du financement des Missions Locales, au moment où celles-ci se retrouvent confrontées à des difficultés financières accrues, suite à la modification inopinée des règles de paiement de la Garantie jeunes.
Le non versement de la totalité des crédits prévus en 2018, va remettre en cause la réalisation même des objectifs qui sont annoncés. Pour que cette instruction puisse être mise en œuvre, il est donc essentiel que les Missions Locales retrouvent ces financements à leur hauteur, avec un abondement des crédits de 2019 à hauteur de 160 millions d’euros pour l’accompagnement des jeunes en Garantie jeunes.
Dans ce contexte de difficultés financières, l’UNML demande qu’une concertation soit très rapidement établie entre l’UNML, la DGEFP et la délégation interministérielle à la lutte contre la pauvreté afin de régler rapidement cette situation…