Éradiquer la grande pauvreté à l’horizon 2030, l’avis du CESE

Publié le 5 juillet 2019

Le 26 juin, le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a adopté un rapport intitulés « Éradiquer la grande pauvreté à l’horizon 2030, à l’unanimité moins 15 abstentions, qui dresse un constat plutôt pessimiste.

Ce rapport met le doigt sur les spécificités de la pauvreté qui ont évolué depuis le début des années 2000 : poids des familles monoparentales, nouvelles formes de pauvreté des personnes âgées ou des jeunes… Le rapport s’interroge sur l’effectivité de l’accès aux droits. Il pointe en particulier les difficultés d’accès au logement et le poids des dépenses énergétiques, l’aggravation des difficultés d’accès à la santé (avec l’importance du non recours aux soins), la précarité alimentaire (même si celle-ci évolue aujourd’hui plutôt vers la difficulté à accéder à une nourriture saine et équilibrée), les difficultés de l’école face à la grande pauvreté, ou encore les inégalités dans l’accès à une formation et à un emploi décent, seule voie durable pour sortir de la grande pauvreté.

En introduction :

«…le CESE ne peut accepter une société duale où les plus pauvres seraient traités dans des dispositifs spécifiques qui ne feraient que les maintenir dans une situation de marginalité et de non effectivité de leurs droits. Ces droits, il faut le rappeler sans relâche, sont indivisibles. Les personnes en situation de grande pauvreté ont les mêmes droits fondamentaux que toutes et tous pour exercer leurs responsabilités de citoyens et de citoyennes, de parents, de travailleurs et de travailleuses, de patients et de patientes : mener une vie familiale digne, s’instruire, se former, se cultiver, se soigner, participer à la vie associative, partir en vacances, aller en justice, être consultés et représentés…

Toutefois, comme cet avis fait de l’éradication de la grande pauvreté en 2030 l’horizon de notre pays, il semble nécessaire et urgent de définir clairement un seuil de référence monétaire pour mesurer statistiquement les situations de misère et leur évolution. C’est pourquoi le CESE retient, en ayant conscience de son côté arbitraire et imparfait, le critère de 50 % du revenu médian en dessous duquel la grande pauvreté doit être mesurée. 

Les préconisations de notre avis seront déclinées autour de cinq priorités : instaurer un revenu minimum social garanti (I) ; simplifier l’accès aux droits afin de réduire le non recours qui contribue à aggraver grande pauvreté et exclusion (II) ; reconnaître un droit effectif à l’accompagnement (III) ; créer les conditions pour faire de l’éradication de la grande pauvreté une réalité en 2030 (IV) ; soutenir l’action des acteurs de la solidarité et la mobilisation de la société en faveur de la lutte contre la grande pauvreté (V). »

Et dans la conclusion du rapport :

« Considérer les progrès de la société à l’aune de la qualité de vie du plus démuni et du plus exclu, est la dignité d’une Nation fondée sur les droits de l’homme. » 

Cette phrase, gravée à l’entrée du CESE, est plus que jamais d’actualité.

En effet, ne pas se satisfaire de décrire les réalités objectives de la misère, ou ne faire qu’en limiter les conséquences, mais s’engager résolument dans une démarche visant à éradiquer la grande pauvreté et donner ainsi à toutes et tous les moyens de vivre dignement, est un impératif pour toute notre société.

C’est pourquoi, dans le prolongement de son avis sur la situation des personnes vivant dans la rue, le CESE, avec ce rapport et son avis associé, tient à apporter la voix de la société civile sur la grande pauvreté.

Il s’agit de reconnaître les personnes en situation de grande précarité comme des citoyennes et des citoyens à part entière, de leur garantir l’accès et l’effectivité de leurs droits, d’engager une lutte contre la grande pauvreté embrassant tous les domaines de la vie, de mieux accompagner les personnes et de prendre en compte leur expertise. Pour en finir avec la stigmatisation et la mise à part qui mettent à mal le vivre­ensemble et menacent la cohésion sociale. C’est une question de survie pour une société démocratique : la grande pauvreté conduit à la désespérance.

Car, malgré les politiques publiques menées, l’action quotidienne des travailleuses et travailleurs sociaux, des actrices et acteurs de solidarité et des bénévoles, ainsi que les financements engagés, la grande pauvreté, dans notre pays, est un phénomène qui s’intensifie et s’étend à de nouvelles populations.

Face à ce constat alarmant, même si les comparaisons internationales montrent que la France ne figure pas parmi les plus mal placés en ce domaine, il ne faut cesser de le répéter : la persistance de la grande pauvreté est un scandale pour toute notre société ! Elle est inacceptable.

Mais si nous savons que la seule croissance ne pourra pas résorber la misère vécue, nous avons la conviction qu’il est possible d’agir : des solutions concrètes existent si la ferme volonté de lutter contre la grande pauvreté s’exprime.

Cette tâche doit être collective et appelle non seulement à une intervention forte et cohérente des pouvoirs publics mais aussi à des actions de mobilisation de l’ensemble des actrices et acteurs de la société. Il y a urgence, il nous reste une dizaine d’années pour atteindre le premier des 17 objectifs de développement durable adopté par l’ONU et en France : éradiquer la grande pauvreté sous toutes ses formes à l’horizon 2030.

Ne pas réussir à relever ce défi, qui nous engage toutes et tous, serait une défaite pour notre République ! »

Pour télécharger le rapport complet, cliquez ici.

Mots-clefs : ,

Le commentaires sont fermés.