Un maire peut il interdire les pesticides sur sa commune ?

Publié le 30 août 2019

Le 18 mai 2019, le maire de Langouët prend un arrêté instaurant des « restrictions des modalités d’utilisations des produits phytopharmaceutiques L’utilisation de produits phytopharmaceutiques est interdite sur le territoire de la commune de LANGOUET à une distance inférieure à 150 mètres de toute parcelle cadastrale comprenant un bâtiment à usage d’habitation ou professionnel. Cette distance est réduite à 100 mètres dans les cas suivants… »

La préfète d’Île-et-Vilaine a déposé un référé suspension le 2 août 2019 au tribunal administratif de Rennes estimant que la règlementation de l’utilisation des produits phytosanitaires n’est pas de la compétence du maire.  Le juge des référés a rendu une ordonnance suspendant l’arrêté le 27 août 2019 donnant raison à la préfète :

  « …Si, en vertu de ces dispositions du code général des collectivités territoriales, il appartient au maire, responsable de l’ordre public sur le territoire de sa commune, de prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, il ne saurait en aucun cas s’immiscer, par l’édiction d’une règlementation locale, dans l’exercice d’une police spéciale que le législateur a organisée à l’échelon national et confiée à l’État. En outre, le principe de précaution, s’il est applicable à toute autorité publique dans ses domaines d’attributions, ne saurait avoir ni pour objet ni pour effet de permettre à une autorité publique d’excéder son champ de compétence et d’intervenir en dehors de ses domaines d’attributions. 

  En l’occurrence, il résulte des dispositions des articles L. 253-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime que le législateur a organisé une police spéciale des produits phytopharmaceutiques. En vertu des dispositions de ce code, précédemment citées aux points 8 à 10, la règlementation de l’utilisation de ces produits relève selon les cas de la compétence des ministres chargés de l’agriculture, de la santé, de l’environnement et de la consommation ou de celle du préfet du département dans lequel ces produits sont utilisés. Il appartient ainsi à l’autorité administrative, sur le fondement du I de l’article L. 253-7 du code rural et de la pêche maritime, de prévoir l’interdiction ou l’encadrement de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques dans des zones particulières, et notamment « les zones utilisées par le grand public ou par des groupes vulnérables ».

Mais ce qui est intéressant dans cette ordonnance, c’est le rappel de l’arrêt récent du Conseil d’Etat qui oblige les ministères à prendre des mesures suffisantes pour protéger les populations de l’agression des pesticides et ce avant la fin de l’année 2019 :

« D’ailleurs, par une décision nos 415426, 415431 du 26 juin 2019, le Conseil d’État a annulé l’arrêté du 4 mai 2017 relatif à la mise sur le marché et à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et de leurs adjuvants visés à l’article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime notamment en tant qu’il ne prévoit pas de dispositions destinées à protéger les riverains des zones traitées par des produits phytopharmaceutiques après avoir considéré que ces riverains devaient être regardés comme des « habitants fortement exposés aux pesticides sur le long terme », au sens de l’article 3 du règlement (CE) n° 1107/2009 et rappelé qu’il appartient à l’autorité administrative de prendre les mesures nécessaires à la protection de la santé publique. Le Conseil d’État a enjoint en conséquence au ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, au ministre de l’agriculture et de l’alimentation, au ministre de l’économie et des finances et à la ministre des solidarités et de la santé de prendre les mesures réglementaires impliquées par sa décision dans un délai de six mois qui, à ce jour, n’est pas encore écoulé. »

Il est important que la mobilisation qui s’instaure sur cette question se poursuive afin que l’Etat prenne enfin les mesures suffisantes pour respecter la santé publique.

Voir le texte de l’arrêté du maire ici.

Et l’ordonnance du juge des référés .

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