Analyse des résultats du 1er tour à Grenoble

Publié le 20 mars 2020

Comme partout la participation s’est effondrée, elle est même inférieure à celle des élections européennes de 2019. A Grenoble seulement 42 % des électeurs se sont déplacés alors que pour les précédentes municipales au 1er tour il y avait eu 52% de votants au premier tour.

La question est de savoir si cette chute de participation a pu jouer sur les équilibres politiques et faussé le scrutin.

La comparaison par bureaux de vote entre les taux de participation aux européennes et au premier tour du 14 mars indique une forte corrélation entre ces deux paramètres. Il n’y a donc pas eu une abstention nettement plus marquée d’un électorat par rapport à un autre.

Le résultat pour la liste Grenoble en commun est très impressionnant. Alors que l’ensemble des autres listes a systématiquement pris pour cible la gestion du maire sortant et son bilan, dépasser largement les 45 % au 1er tour, c’est à dire nettement plus que le score du deuxième tour de 2014, est un résultat très positif.

Globalement l’électorat écologiste et de gauche des européennes de 2019 a voté pour l’équipe du maire sortant, à part une partie des électeurs socialistes. Même avec une chute très importante de la participation, Eric Piolle fait beaucoup plus de voix (16 800) qu’au premier tour de 2014 (12 800). Il y a des zones de faiblesse dans certains bureaux de vote, mais beaucoup plus limité que prévu par les oppositions ; c’est notamment le cas à Mistral et au Village Olympique, comme en 2014. Par contre à Ampère 2 et Porte de France « Grenoble en Commun » dépasse les 60% !

Pour voir graphiquement ces zones de force et de faiblesse cliquer ici.

Il est intéressant d’examiner comment se répartissent les votes dans les bureaux où la liste a dépassé les 50% (25 bureaux forts), ceux où la liste a atteint moins de 43% (27 bureaux faibles) et ceux où la liste a fait entre 43 et 50% (34 bureaux moyens). Les bureaux faibles donnent un résultat nettement plus fort pour Carignon (6 points de plus) et un peu plus pour Noblecourt (3 points de plus). Ce sont des bureaux où l’extrême droite faisait de très bons scores aux européennes, ce qui indique que Carignon a bien surfé sur l’électorat d’extrême droite.

Dans les bureaux forts, Carignon fait 5 points de moins. Par contre le vote Chalas est assez constant dans ces trois zones.

   D’ORNANO  DE LESCURE  CARIGNON  NOBLECOURT  CHALAS  BRUN  PIOLLE
25 bureaux forts 1,5% 4,0% 15,2% 10,8% 13,0% 1,0% 54,6%
27 bureaux faibles 2,6% 2,5% 26,1% 16,2% 14,5% 1,5% 36,6%
34 bureaux moyens 2,1% 3,1% 19,5% 13,5% 13,9% 1,2% 46,6%
Tous bureaux 2,0% 3,2% 19,8% 13,3% 13,8% 1,2% 46,7%

L’autre fait vraiment important c’est le plafond de verre atteint par l’ancien maire corrompu. Il n’arrive même pas à atteindre les 20% alors qu’il n’avait pas de vrai concurrent à droite ni à l’extrême droite. Pourtant il était parti très en avance et n’avait pas hésité à utiliser des méthodes douteuses pour faire valoir sa candidature. La dernière en date c’est l’envoi d’une lettre quelques jours avant le vote à de nombreux électeurs qui ont été choisis pour leur âge, sans qu’il soit indiqué comment leurs adresses avaient été collectées, ce qui est irrégulier. L’échec est magistral, mais l’expert en manipulations de toutes sortes veut continuer à y croire.

La candidate officielle « en marche » n’atteint pas 14 % alors que Macron avait atteint les 30 % en 2017 et qu’aux européennes LREM avait dépassé les 24 %. La candidature Noblecourt, Macron-compatible, lui a fait perdre une partie des voix, mais son arrogance et le rejet de la politique nationale, qui est générale dans le pays, lui ont été fatal.

M. Noblecourt essuie un échec d’autant plus cuisant (13%) qu’il avait un discours qui laissait à croire qu’il pouvait devenir maire de Grenoble ; Le résultat obtenu par la liste Grenoble en Commun confirme (si besoin était), contrairement à ce que le PS avait affiché en 2014, que l’élection d’Eric Piolle n’était pas un accident. Le PS grenoblois n’a toujours pas compris ce qui c’était passé en 2014. Certains de ses militants et élu-e-s l’ont compris et rejoint le combat de la majorité municipale bravant les oukases de l’appareil du PS, dont l’isolement est confirmé par ces résultats. La dynamique d’union de la gauche était effective chez « Grenoble en commun ». Même des soutiens de la candidature de Noblecourt se sont vite empressés de féliciter le maire sortant et lui offrir leurs services. La stratégie, qui consistait à essayer de faire croire qu’un grand nombre de quartiers auraient été abandonnés, a échoué.

« La Commune est à Nous » n’atteint pas les 5% alors que la tradition de la gauche radicale à Grenoble est de dépasser largement les 5% à Grenoble. Se voulant les représentants des luttes sociales, la liste essuie un échec patent. Prenons l’exemple du Référendum d’Initiative Citoyenne (RIC) de l’Arlequin qui avait mobilisé 526 habitants qui avaient à 70% contesté la politique municipale concernant les démolitions : à peine 6 mois après, cette liste qui portait ces revendications n’obtient que 36 voix sur 662 votants à l’Arlequin soit à peine plus de 5%, alors que la liste d’Eric Piolle atteint 40 % des votants.

La principale leçon de ce premier tour c’est que pour une fois les sondages ne se sont pas trop trompés et que les stratégies des listes d’opposition de critiquer systématiquement le bilan du maire sortant en oubliant que l’élection se fait principalement sur les projets, étaient inefficaces. De plus elles se sont lancées dans des courses à la surenchère écologique et sociale totalement non crédibles face à un maire particulièrement crédible à ce sujet. L’électeur préfère toujours l’original à la copie surtout quand cette dernière est de mauvaise qualité. Le deuxième tour est pour l’instant reporté en juin si à la mi-mai la situation de l’épidémie le permet. Si le 2ème tour est confirmé en juin, seules 4 listes du premier tour pourront se maintenir ou fusionner (celles qui ont dépassé les 10% des votes exprimés. Il y aurait alors au moins une triangulaire au cas où la liste Noblecourt ne rejoindrait pas la liste Chalas et se retirerait.

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