17 octobre 1961, crime d’Etat ou crime de Maurice Papon ?

Publié le 22 octobre 2021

Un Etat a toujours beaucoup de mal à reconnaitre qu’il a couvert un crime d’Etat. Les différents Présidents de la République ont toujours minimisé ce qui s’est passé à Paris le 17 octobre 1961. E. Macron est allé un peu plus loin que ses prédécesseurs en se rendant au pont de Bezons, près de Nanterre d’où sont partis, le 17 octobre 1961, de nombreux manifestants algériens et où des corps ont été repêchés dans la Seine. Il a observé une minute de silence en mémoire des victimes de la répression sanglante du 17 octobre 1961. 

Il a fait un communiqué qui rappelle que « La répression fut brutale, violente, sanglante. Près de 12.000 Algériens furent arrêtés et transférés dans des centres de tri au Stade de Coubertin, au Palais des sports et dans d’autres lieux. Outre de nombreux blessés, plusieurs dizaines furent tués, leurs corps jetés dans la Seine… Les historiens ont établi de longue date ces faits et les ont inscrits dans un engrenage de violence durant plusieurs semaines. Cette tragédie fut longtemps tue, déniée ou occultée… 

Aujourd’hui, soixante ans après, le Président de la République… a reconnu les faits : les crimes commis cette nuit-là sous l’autorité de Maurice Papon sont inexcusables pour la République. »

Donc il y a bien eu de nombreux crimes et le Président reconnait que les historiens ont établi les faits, mais pour lui, le responsable des crimes est le seul Maurice Papon. Le Président omet de dire que c’était en tant que préfet que Maurice Papon a commis ces crimes, afin de ne pas mêler l’Etat à ces crimes. Mais évidemment cela ne tient pas puisque c’est bien en tant que préfet donc représentant de l’Etat que Papon a agi et a indiqué aux policiers qu’il les couvrirait, ouvrant ainsi toutes les violences possibles contre les manifestants pacifiques.

Il faudra donc continuer encore et encore de rappeler qu’il y a eu un crime d’Etat le 17 octobre 1961 et que Grenoble et sa population s’honorent de porter ce combat pour la vérité.

Ci-dessous, les deux discours prononcés lors du rassemblement du 17 octobre Place Edmond Arnaud, par le collectif puis par le maire de Grenoble.

Intervention du collectif grenoblois du 17 octobre 1961, par Mariano Bona

Je vous remercie pour votre présence nombreuse en ce moment très particulier qui marque le 60eme anniversaire du massacre commis le 17 octobre 1961 à Paris.

Je tiens à remercier les nombreux élu.es ici présents.

Depuis plus de trente ans, le souvenir du 17 octobre 1961 est honoré chaque année à Grenoble par des rassemblements. Il y eut un premier rassemblement dès le 18 octobre 1961, où notre ami Jo Briant participait, avec déjà des jets de fleurs dans l’Isère pour rendre hommage aux victimes.

Depuis 2016, nous tenons cet hommage à côté de la plaque commémorative posée par la ville de Grenoble, qu’il faut chaleureusement remercier car c’est un geste d’engagement et de solidarité que trop peu de villes ont fait. Cette question des plaques n’est pas anecdotique. Il est important que les murs des rues et les murs des places portent d’autres traces que celles des massacreurs de la Commune de Paris ou des Généraux qui « s’illustrèrent » de façon sanglante lors de la colonisation.

Lorsqu’on évoque la tragédie du 17 octobre 1961, on se heurte bien souvent à l’incrédulité : « comment est-ce possible ? Un tel massacre en plein Paris sous la République ? Nous le saurions quand même … ».

Il faut dire et redire les faits. En octobre 1961, le préfet de police de Paris Maurice Papon, condamné en 1998 à dix ans de réclusion pour son implication dans la déportation des juifs de la région bordelaise entre 1942 et 1944, décide du couvre-feu pour les « Français musulmans d’Algérie », terme utilisé à l’époque pour désigner les Algériens travaillant en métropole. Il leur est interdit de circuler dans les rues de Paris et de la banlieue entre 20h30 et 5h30 du matin. Cela se passe dans le contexte de l’état d’urgence qui permet aux préfets « d’interdire la circulation des personnes ou des véhicules dans les lieux et aux heures fixés par arrêté ».

Il est important de rappeler à propos de l’État d’Urgence, au vu de son utilisation régulière ces dernières années, qu’il s’agit d’une loi coloniale votée en 1955 comme outil de répression. Déclaré sur le sol de la métropole lors de la tentative de putsch en avril 1961, l’état d’urgence resta en vigueur jusqu’en mai 1963 – un an après les accords de cessez-le-feu d’Evian du 19 mars 1962 et la déclaration de l’indépendance de l’Algérie le 5 juillet 1962.

Le soir du 17 octobre 1961, des dizaines de milliers d’Algériennes et d’Algériens, de toutes générations, jeunes et moins jeunes, ont manifesté pacifiquement à Paris pour le droit à l’indépendance de l’Algérie et pour leur droit à l’égalité et à la dignité, contre un couvre-feu raciste qui leur était imposé. Les manifestantes et les manifestants étaient essentiellement des travailleurs de la région parisienne, venus endimanchés avec leurs familles, issus des quartiers populaires et des bidonvilles, notamment celui de Nanterre. Les consignes de la fédération de France du FLN étaient très claires : pas d’armes, même pas un canif.

Pour exprimer le refus du couvre-feu, les Algériennes et les Algériens défilèrent sur les boulevards à 20h30, au moment même de la journée où il leur était interdit de quitter leurs domiciles. Le ministre de l’Intérieur, Roger Frey, et son préfet de Police Maurice Papon soutiendront qu’il s’agissait là d’un « acte de guerre « . Drôle de guerre que celle menée par une manifestation pacifique !

La répression qui s’est abattue sur les manifestants fut d’une grande violence : 11.000 arrestations, 300 victimes, frappées à mort, jetées à la Seine, tuées par balles, massacrés dans l’enceinte même de la préfecture ou du Palais des sports. On a inventé cette expression terrible : « noyés par balles ». On pouvait lire le lendemain dans France Soir : « Ray Charles pourra chanter ce soir. Après le passage du service de désinfection, le Palais des sports a retrouvé son aspect habituel « .

Maurice Papon a une responsabilité écrasante dans ce massacre, lui qui quelques jours auparavant avait dit aux policiers parisiens : « Vous serez couverts, je vous en donne ma parole. ».  Le massacre n’empêcha pas Maurice Papon de devenir député gaulliste et ministre.

Mais il n’est pas le seul à porter la responsabilité de ce massacre. Qui peut croire qu’il ait agi sans l’accord du Ministre de l’intérieur, Roger Frey, et du premier ministre, Michel Debré, opposé aux discussions en cours en vue de l’indépendance de l’Algérie ? Quant au Général de Gaulle, alors Président de la République, il connaissait forcément le passé vichyssois de Maurice Papon lorsqu’il le nomma préfet. C’est lui qui déclara en 1967 lors de la passation de pouvoir au nouveau préfet Maurice Grimaud, « Vous avez là un poste très important et exposé. Il y faut beaucoup de sang-froid et d’autorité. Vous succédez à un homme [c’est à dire Maurice Papon] qui l’a occupé de façon considérable. ». Lorsque Maurice Papon fut pressenti pour devenir trésorier de l’UDR, le général de Gaulle consulté dira à cette occasion « Papon, c’est tout à fait convenable ».

Les rapports officiels ne font état que de deux morts. Le livre « Ratonnades à Paris » de Pierre et Paulette Péju, publié chez Maspéro quelques semaines après le massacre, fut saisi chez l’imprimeur par la police judiciaire. Le film de Jacques Panijel « Octobre 1961 » fut saisi dès sa première projection. Les diverses lois d’amnistie achevèrent d’installer le silence sur ce massacre.

Tous les acteurs étatiques se savaient totalement couverts, voire encouragés à réprimer avec violence, du policier de base jusqu’au préfet. Avec le 17 octobre 1961, nous avons affaire à un crime d’État. Il est plus que temps que le Président de la République le reconnaisse publiquement.

Face à la volonté d’occultation de ce massacre, c’est l’action de citoyens, historiens, écrivains, associations, grâce au foisonnement d’initiatives militantes, qui permit que l’essentiel de la vérité sur ce massacre soit aujourd’hui connu.

En ce 60eme anniversaire du 17 octobre 1961, il est nécessaire de rappeler le rôle très important de Jean-Luc Einaudi, sa bataille pendant 30 ans pour faire connaître et reconnaître le crime d’État. Éducateur pour la jeunesse, attentif aux laissés pour compte et aux oubliés, ce citoyen, se fit historien pour mettre au grand jour ce que fut le 17 octobre 1961. Ne pouvant pas accéder aux archives,.Jean-Luc Einaudi recueilli les témoignages des témoins, des survivants, des familles. En évoquant sa figure, Pierre Vidal Naquet déclara « on ne naît pas historien, on le devient ». A sa mort le 22 mars 2014, Mohamed Harbi, figure considérable de l’Histoire de l’Algérie, qualifia Jean-Luc Einaudi de « héros moral ».

Jean-Luc Einaudi ne fut pas le seul ni le premier à vouloir faire sortir de l’oubli cette « journée portée disparue ». Mais son combat est emblématique de l’action de toutes ces personnes qui agissent au quotidien pour dire l’Histoire, pour rendre justice. A sa mesure, votre présence ici, année après année, est partie intégrante de ce combat.

C’est un combat qu’il faut encore mener à l’heure où la République s’obstine à refuser de regarder en face l’héritage de la colonisation.

C’est un combat qu’il faut encore mener pour que le crime d’État que constitue la répression du 17 octobre 1961 soit officiellement reconnu.

Un combat qu’il faut encore mener au moment où les tenants de l’Algérie française, du racisme, de la xénophobie tiennent au grand jour leurs discours fétides.

Comment ne pas voir le danger alors que des militaires de haut rang peuvent publier une tribune menaçant la République le 21 avril 2021, jour anniversaire de la tentative de Putsch à Alger ? Comment accepter que, sans être contestées, des Mairies puissent honorer la figure du général Salan, putschiste d’avril 1961 et chef de l’OAS, ou la figure du général Bigeard qui qualifia la torture de « mal nécessaire » ?  Comment accepter qu’un Eric Zermmour puisse sans encombre déclarer publiquement qu’il se situe “aujourd’hui du côté du général Bugeaud » ? Le même Bugeaud, grand massacreur, qui à la tête d’une armée de 100 000 hommes a massacré, pratiqué les enfumades, mis en œuvre la politique de la terre brûlée pour affamer les populations.

Le 17 octobre 1961 ce fut aussi la répression d’une lutte menée par les immigrés, pour leur dignité. Cette lutte est loin d’être finie, surtout au moment où les discours xénophobes et islamophobes se répandent, impulsés depuis le sommet de l’État. Ce dont nous avons besoin c’est de vérité et de justice, pas de répression.

Il faut refuser la banalisation des violences policières, dont sont notamment victimes les jeunes des populations issues de l’immigration. La violence utilisée contre les mouvements sociaux, contre les jeunes lycéens et étudiants, provoquant des blessés graves et même des morts doit nous interpeller.  Le 17 octobre 1961 nous alerte sur ce qui peut se produire lorsque l’État est prêt à utiliser tous les moyens au nom de la raison d’État.

Nous manifesterons tout à l’heure pour :

  • exiger de l’État français qu’il reconnaisse officiellement sa responsabilité dans les massacres liés à la colonisation;
  • exiger la reconnaissance des massacres du 17 octobre comme crime d’Etat;
  • réclamer l’ouverture des archives de la Guerre d’Algérie et de la colonisation aux chercheurs français et étrangers, sans restrictions, ni exclusives;
  • – refuser les discours xénophobes, racistes, colonialistes.

Ces revendications sont portées depuis des années, et nous espérions que le 60ème anniversaire verrait une réponse concrète apportée à certaines d’entre elles. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Les archives sont toujours fermées, la responsabilité de l’État n’est toujours pas reconnue, les discours xénophobes, racistes et colonialistes sont tolérés. Alors que le Pouvoir s’obstine à ne pas regarder en face toute son Histoire, il se lance dans une polémique inutile et blessante vis à vis de l’Algérie. Ce n’est pas à la hauteur du moment.

2022, c’est le 60ème anniversaire de la fin du système colonial en Algérie, d’une guerre cruelle, 60ème anniversaire de l’indépendance de l’Algérie. C’est une date qu’il ne faut pas prendre avec frilosité. Bien au contraire. Nous appelons à prendre des initiatives pour rendre compte de ce qui fut une bonne nouvelles pour les peuples algérien et français, pour tous les peuples.

Les associations du collectif « 17 octobre 1961 » prendront toute leur part dans l’organisation d’initiatives allant dans ce sens. Notre objectif est de faire que les questions liées à la colonisation et à la guerre d’Algérie soient largement portée dans l’agglomération. Nous appelons les pouvoirs publics et les collectivités locales à prendre toute leur part dans cette commémoration, pour combattre des démons toujours présents, mais aussi pour mettre en partage une histoire commune entre la France et l’Algérie, construire des liens de solidarité entre les deux rives de la Méditerranée.

Cet hommage ne serait pas complet sans exprimer notre solidarité avec le peuple algérien.

Depuis le 22 février 2019, sur l’ensemble du territoire algérien, le peuple s’est levé en masse et pacifiquement, pour obtenir des changements politiques et sociaux.

C’est le Hirak.

Jeunes, femmes, étudiants… progressistes et démocrates, manifestent pour une nouvelle société plus libre, plus démocratique et plus juste, débarrassée de la corruption. Nous devons être solidaires de ce combat, le faire connaître largement.

La jeunesse algérienne n’est pas oublieuse de son Histoire : elle s’en est emparée et elle inscrit son combat actuel dans la continuité du combat pour la libération de l’Algérie.

Des dizaines d’Algériennes et d’Algériens sont actuellement en prison pour délit d’opinion ou avoir voulu informer. Des partis politiques sont menacés d’interdiction, des journalistes sont emprisonnés. Nous venons d’apprendre avec stupeur la dissolution du RAJ, Rassemblement Actions Jeunesse, né en 1992 en pleine décennie noire, contribuant depuis 28 ans aux combats pour les droits et la démocratie.

Nous demandons la libération immédiate de tous les prisonniers politiques, et le respect des droits des organisations démocratiques algériennes. Les questions soulevées par ce mouvement ne se résoudront pas par la répression, mais par la pleine prise en compte des demandes du peuple algérien. 

Bien sûr, c’est au peuple algérien et à lui seul de déterminer le chemin qu’il souhaite suivre. Mais cela ne doit pas nous empêcher d’agir pour amplifier la solidarité avec le peuple algérien dans son combat démocratique.

Le discours d’Eric Piolle, maire de Grenoble

Mesdames et Messieurs les élu.es

Mesdames et Messieurs les membres des associations et du collectif « 17 octobre 1961 »

Chères Grenobloises, Grenoblois, habitantes et habitants du territoire métropolitain

Que s’est-il passé à Paris ce jour du 17 octobre 1961 ?

Une trahison. Une trahison vis-à-vis de ce qui nous est le plus cher : notre attachement à la justice, à la dignité, à nos valeurs républicaines.

Ce jour-là, la police du préfet Maurice Papon s’est rendue coupable d’un crime d’Etat. Ce jour-là, elle a massacré des humains au seul motif qu’ils résistaient pacifiquement à l’oppression en manifestant pour l’indépendance de l’Algérie, et contre le couvre-feu inique imposé aux Algériens de Paris. Il est difficile de se représenter le degré de violence de la répression : les manifestants pacifistes ont été pourchassés, frappés, massacrés, des centaines d’entre eux ont été tués, jetés dans la Seine.

Sur les deux rives de la méditerranée, ce sont deux facettes de l’horreur qui se déploient : en Algérie au cœur de la guerre, les exactions, les tueries, la torture. Et dans la capitale française, ce crime qui s’inscrit dans la droite ligne de pratiques arbitraires déjà bien ancrées, avec des interpellations au faciès, des tabassages, et même de la torture en plein Paris par la police française, comme l’ont montré les travaux de plusieurs historiens et journalistes. D’une rive à l’autre, les crimes se font écho.

Que s’est-il passé en France après le 17 octobre 1961 ?

Une série de rendez-vous ratés avec l’Histoire. Alors que la France aurait pu regarder son crime en face, elle n’a pas été à la hauteur.

Pourtant, au lendemain de cette journée, des journaux ont osé défier la censure et la version officielle du pouvoir en place. L’Humanité, Libération, l’Express, L’Observateur, Témoignage chrétien, ont fait le récit de cette tuerie et dénoncé les exactions meurtrières de la police. Des élus, des syndicats, des militants, ont élevé la voix eux aussi, mais très vite l’Etat a mis en place une mécanique implacable pour imposer le silence, en imposant des non-lieux suite aux plaintes, en verrouillant les archives, en enterrant les commissions d’enquête parlementaire. Aucun policier, aucun responsable de cette répression sanglante n’a eu à répondre de ses agissements.

Il a fallu attendre de nombreuses années pour que les militants de la mémoire réussissent à remettre le 17 octobre 1961 en pleine lumière.

Malgré cela, 60 ans après, nous voyons que la réponse institutionnelle de l’Etat français n’est toujours pas au niveau.

Oui, l’État français doit reconnaitre les massacres du 17 octobre comme crime d’État.

Oui, la France doit reconnaitre pleinement sa responsabilité dans les massacres liés à la colonisation.

Et oui, les archives de la guerre d’Algérie et de la colonisation doivent être ouvertes, sans restriction.

Et à ceux, au plus haut sommet de l’Etat, qui voudraient nous faire croire que le silence effacerait les crimes et laverait les mains des bourreaux, à ceux qui voudraient nous faire croire que les victimes « dérangent » à demander le droit de parler, à demander la justice.

A ceux-là, je veux dire que non, ce n’est pas aux victimes de se taire, jamais. C’est aux responsables de sortir enfin du silence, et c’est à la justice de les y contraindre s’ils refusent de rendre des comptes. C’est vrai pour le 17 octobre 1961. Et c’est vrai tous les jours, en tout lieu, et sous toutes les latitudes.

Car oui, le silence, lorsqu’il est organisé, planifié agit comme un acide sur nos mémoires, sur nos blessures et nos traumatismes. Il n’y a pas de « rente mémorielle », il y a un « business de la discorde », et je le dénonce au nom des valeurs qui font la force de la France. Nous sommes en 2021 et nos familles, nos amis, nos voisins, nos ainés, ont le droit à la paix des mémoires. A la paix des histoires. La France doit sortir de l’impunité mémorielle. Cela passe par la reconnaissance de la vérité, y compris par l’Etat, car on ne bâti rien de durable dans le silence et dans le mensonge.

Mesdames, Messieurs, aujourd’hui, ce qui remplit mon cœur de révolte, c’est aussi d’entendre de nouveau des discours de haine et de racisme se répandre dans l’espace public et médiatique. Des discours que l’on espérait ne plus jamais entendre. Des discours nauséabonds qui crachent leur venin, distillent la violence, désignent l’ennemi, l’étranger, celui qui n’aurait pas la bonne couleur, la bonne religion, le bon prénom. Des discours nostalgiques des colonies et de l’asservissement de peuples entiers. Des discours qui salissent notre République.

Nous ne les acceptons pas. Non, en France il n’y a de place pour aucune forme de racisme, aucune forme de discrimination, de stigmatisation.

Aujourd’hui, ce qui remplit mon cœur de tristesse, c’est de songer aux manifestants traqués comme des bêtes, jetés dans la Seine. C’est de songer à ces vies brisées, et à celles et ceux qui ont attendu en vain le retour d’un père, d’un camarade, d’un ami, d’un amour.

Heureusement, aujourd’hui il y a aussi des choses qui remplissent mon cœur d’espoir.

Quand je vois qu’ici, sur notre territoire, nous continuons à lutter ensemble pour faire surgir la justice et la vérité. Associations, collectif, citoyennes et citoyens, élu.es, tous rassemblés.

Aujourd’hui, ce qui remplit mon cœur de joie enfin, ce sont les liens que nous tissons avec l’Algérie, et notamment avec Constantine, notre ville jumelle, avec qui les échanges culturels se poursuivent dans les deux sens.

A Grenoble, nous venons de présenter l’exposition « Visages d’Algérie » pendant tout le mois de septembre à la Maison de l’international. Ces photographies superbes ont rencontré un très beau succès.

Et bien sûr, nous célébrerons ensemble tout au long de l’année prochaine le 60ème anniversaire de l’Indépendance de l’Algérie. Cette date revêt une dimension symbolique forte, et je suis heureux que nous placions cet anniversaire sous le signe de l’amitié entre les 2 peuples.

Cette année se prépare avec le concours inestimable des associations locales, fortement mobilisées. La Ville de Grenoble s’associera notamment avec ASALI, qui prévoit un très gros programme de conférences, débats, expositions, temps culturels… Les sujets liés à l’Histoire seront mis en lumière bien sûr, mais aussi le sport, les sciences, la place des femmes, et bien d’autres encore.

Des deux côtés de la méditerranée, le passé qui nous lie est marqué par le traumatisme de la colonisation, de la guerre, des exactions, du silence. Un traumatisme ne s’oublie pas. Mais il peut se résoudre, à condition d’inventer ensemble un chemin de réconciliation des histoires et des mémoires, un chemin de respect et de fraternité, un chemin digne et juste.

Devant cette plaque que nous avons posée ensemble en 2016, je vous le dis : vous pouvez compter sur moi.

Je vous remercie. »

Pour lire le communiqué de l’Elysée voir ici.

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