La Banque des Territoires vient de publier une étude intitulée : « Mobilités du quotidien. Comment les autorités organisatrices de la mobilité peuvent-elles s’adapter aux changements d’usages post-Covid ? »
C’est effectivement une très bonne question puisque la crise sanitaire a porté des coups financiers très importants aux AOM (autorité organisatrice de la mobilité) et a fait changer les comportements des usagers, d’où des déséquilibres financiers inquiétants que malheureusement le gouvernement n’a pas voulu prendre en compte, sauf en Ile-de-France. L’étude présente les leviers qui ont été actionnés par 8 métropoles : à court terme (réduction des capacités et des fréquences, aide à l’achat de vélos à assistance électrique, gratuité partielle), à moyen terme (pérenniser les « coronapistes« , infrastructures liées au vélo comme les parkings sécurisés, développement de vélos en libre-service, véhicules partagés à la demande, subvention au covoiturage, dématérialisation des titres de transport, tarification modulable en heure de pointe…) et à long terme – extension/augmentation capacitaire du réseau lourd (tramway/métro), développement/renouvellement des grandes lignes de bus dans une optique de transition écologique.
Voici le résumé de l’étude :
« Cette étude réalisée par un groupe d’étudiants de la Chaire d’économie urbaine de l’ESSEC Business School dans le cadre d’un partenariat avec la Banque des Territoires (Groupe Caisse des Dépôts) vise à fournir aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM) un outil d’analyse pour les guider dans leurs initiatives en matière d’évolution de l’offre de mobilité du quotidien dans le contexte de financement contraint depuis le déclenchement de la crise sanitaire et le premier confinement en mars 2020. En effet, la pandémie a bouleversé les équilibres économiques et financiers des AOM avec la chute des recettes perçues des usagers, mais également la réduction du versement mobilité.
Mais la crise sanitaire a également modifié de façon notable les usages de mobilité des résidents et actifs des agglomérations et métropoles au-delà des seules périodes de confinement.
La méthodologie utilisée pour cette étude a consisté à :
- Mener des entretiens avec des dirigeants d’un échantillon de plusieurs AOM [1] (métropoles et agglomérations de tailles et régions variées), afin de dégager des profils-types et identifier les leviers d’action activés par celles-ci, ainsi qu’avec opérateurs de services de mobilité, des associations d’élus (UTP, le Groupement des Autorités Responsables des Transports – GART) ou professionnels, mais aussi des experts de la mobilité, France Stratégie, 6-T etc.).
- À l’issue de ces échanges, dégager les principales problématiques selon les spécificités propres à chaque AOM. En croisant les retours, certaines AOM ressortent avec des caractéristiques, enjeux et leviers d’actions similaires ce qui démontre la capacité de généraliser ces éléments à l’ensemble des AOM de la catégorie. Les profils-types des AOM ont ainsi été dégagés en fonction d’intervalles de taille de population. Nota bene : L’Ile-de-France a été volontairement exclue du champ de cette étude compte tenu de la taille de la population concernée, des enjeux de densité urbaine et d’un mode d’organisation territorial unique en France.
- Pour chacun des profils-types d’AOM, tirer des enseignements sur la manière dont les AOM peuvent tenter de s’adapter aux conséquences opérationnelles et budgétaires de la crise sanitaire à court terme (marquée par une forte baisse de la fréquentation des transports publics), et de façon plus prospective à moyen et long terme, avec un impact sur la stratégie d’offre et la trajectoire budgétaire de l’AOM.
Les conclusions de cette étude sont synthétisées sous la forme de matrices qui visent à :
- Fournir des clefs de lecture et d’arbitrage parmi les leviers d’action aux décideurs des AOM, selon la taille de la population de leur ressort géographique, ou, pour certains d’entre eux, quelle que soit sa taille,
- Mais également mettre en exergue les conséquences budgétaires potentielles de certains leviers d’actions.
Ainsi, si l’ensemble des agglomérations et des métropoles vont probablement devoir continuer de densifier leur réseau de lignes de bus à grande capacité et à haut niveau de service, en lien avec la nécessaire transition énergétique des transports publics routiers, la gratuité fait fortement débat entre les spécialistes et s’inscrit plutôt dans une logique de choix politique.
Si les AOM doivent faire face à des investissements lourds avec l’extension et le renforcement des réseaux de transports en commun en site propre pour les métropoles et les plus grandes agglomération, des adaptations techniques et technologiques moins coûteuses en investissement ou en dépenses de fonctionnement peuvent renforcer fortement l’expérience utilisateur, la fluidité du réseau et faciliter les trajets intermodaux pour les usagers, dans une logique de plus grande agilité des usagers dans leurs déplacements du quotidien.. Ces évolutions technologiques comprennent la mise en en place d’une procédure de récolte de données pour adapter le réseau et l’offre de transports collectifs ou encore une modulation des tarifs d’abonnement et de déplacement ponctuel aux heures de pointes. Ces évolutions passent notamment par le développement de services numériques à destination des usagers, dont l’expression la plus développée consiste en une plateforme de mobilité servicielle (mobility as a service ou « MaaS »).
L’impératif de la transition énergétique dans la mobilité, qui constitue le poste n°1 d’émissions directes de gaz à effets de serre en France, qui fait l’objet aujourd’hui de diverses prescriptions légales et réglementaires, et les enjeux de santé publique liés à la pollution atmosphérique locale, incitent les AOM à amplifier leurs efforts pour promouvoir, outre l’utilisation des transports publics, différentes formes de mobilité douce et parvenir à réduire la part modale de l’automobile dans les déplacements du quotidien et en particulier l’autosolisme. Les leviers identifiés par la présente étude pour y parvenir comprennent par exemple les aides à l’achat de vélos et la pérennisation des « coronapistes ».
L’ensemble de ces leviers d’action pour les AOM font écho aux recommandations n°10 à 14 et n°18 à 20 du rapport Duron [2] récemment remis au Gouvernement.
[1] Saint-Brieuc Armor Agglomération, Nantes Métropole, Châteauroux Métropole, Métropole du Grand Nancy, Colmar Agglomération, Le Grand Chalon, Toulouse Métropole et Sète Agglopôle Méditerranée
[2] Rapport sur le modèle économique des transports collectifs établi par Philippe Duron, juillet 2021 »
Mots-clefs : Déplacements, santé