L’inflation atteint négativement les revenus d’un quart des ménages

Publié le 6 mai 2022

L’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) publie le 28 avril une note de R. Samponaro intitulée : « Hausse de prix à la consommation : au mois de mars près d’un quart des ménages ont perdu du pouvoir d’achat malgré les dispositifs mis en place ».

En effet, la hausse des prix à la consommation observée n’affecte pas tous les ménages de façon homogène.

Par exemple, les ménages résidant en milieu rural souffrent d’une inflation plus forte (6,3 %) que ceux habitant en agglomération urbaine (5,1%) notamment à cause d’une dépendance plus forte aux mobilités en voiture individuelle. Les ménages dont la personne de référence est à la retraite souffrent d’un choc inflationniste plus fort (5,6 % en moyenne) que les actifs occupés (5,1 %) et les étudiants (3,0 %).

Voici des extraits de cette note :

« Un choc inflationniste qui n’affecte pas tous les ménages de façon homogène

La hausse des prix à la consommation observée n’affecte pas tous les ménages de façon homogène. Selon nos calculs, réalisés sur la base des données de l’enquête Budget des Familles 2017 (BDF 2017, plus de détails sur la méthodologie mobilisée dans l’encadré), en moyenne, un ménage aurait subi une inflation de 5,1 % (en glissement annuel) en mars. Mais ceci masque des hétérogénéités marquées : 10 % des ménages ont vu le prix de leur panier de consommation augmenter de moins de 2,5 % (ce qui reste supérieur à la cible de la BCE) et 10 % des ménages ont subi un renchérissement de leur panier de consommation de plus de 8,4 %.

Les ménages résidant en milieu rural souffrent d’une inflation plus forte (6,3 %) que ceux habitant en agglomération urbaine (5,1%) – notamment dans la zone métropolitaine parisienne (4,1 %), suggérant une plus forte dépendance aux mobilités en voiture individuelle. De la même façon, les ménages dont la personne de référence est à la retraite souffrent d’un choc inflationniste plus fort (5,6 % en moyenne) que les actifs occupés (5,1 %) et les étudiants (3,0 %). Si l’on classe les ménages suivant leur position dans l’échelle des niveaux de vie, on constate que l’inflation moyenne subie suit une courbe de U inversée. Les ménages plus pauvres connaissent moins d’inflation (5,0 % en moyenne pour le premier décile), l’effet monte jusqu’au quatrième dixième (inflation moyenne de 5,3 %) et puis l’inflation subie recule pour les trois dixièmes supérieurs (4,8 % en moyenne pour le décile supérieur).

Mais ces chiffres masquent des disparités à l’intérieur même de chaque catégorie. Par exemple, à l’intérieur des ménages où la personne de référence est en emploi, le choc de prix subi dépend du mode de transport privilégié pour réaliser le trajet domicile-lieu de travail. Si celui-ci est fait en voiture les ménages subissent une hausse de prix de 7,4 % alors que s’ils réalisent le trajet à pied ou en transport en commun la hausse de prix à la consommation moyenne est de 6,4 %. De même, l’hétérogénéité d’inflation entre déciles faible par rapport à l’hétérogénéité observée à l’intérieur même des déciles. Cette hétérogénéité dépendant de nombreux facteurs, mais dont le type d’unité urbaine de résidence semble capitale pour comprendre les dynamiques à l’œuvre… 

Le difficile ciblage des dispositifs publics mis en œuvre

Face à la flambée des prix, le gouvernement a mis en place deux dispositifs pour répondre aux difficultés de pouvoir d’achat. Une indemnité inflation ponctuelle de 100 euros (dont la distribution a commencé en décembre) a été décidée pour tout individu gagnant moins de 2000 euros nets par mois. En outre, un renforcement exceptionnel du chèque énergie de 100 euros a été décidé en septembre 2021. Nous cherchons à étudier ici si ces dispositifs ont permis de compenser les effets des hausses de prix sur le niveau de vie des ménages en 2021 et au début de l’année 2022.

Le choc subi par un ménage est donné par le surcoût exceptionnel de son panier de consommation. Celui-ci est calculé comme l’écart entre l’indice de prix du ménage et l’indice de prix qui aurait prévalu si les tendances antérieures à la crise sanitaire s’étaient poursuivies depuis le début 2020…

Compte tenu de la temporalité des chocs sur les prix, l’ensemble des dixièmes de niveau de vie aurait gagné du pouvoir d’achat en 2021 et le 1e trimestre 2022 (0,6 % en moyenne, Tableau 2) en lien avec les évolutions exceptionnelles des prix à la consommation observées depuis le début de la crise sanitaire (0,3 % hors dispositifs). Ce résultat peut paraitre paradoxal mais il s’explique de façon aisée. Au cours de la plus grande partie de l’année 2021, de très nombreux ménages ont fait face à des prix plus bas que dans le scénario contrefactuel sans crise sanitaire (55 % des ménages selon nos calculs). A contrario, au cours des 15 mois allant de janvier 2021 à mars 2022, 45 % des ménages auraient vu le prix de leur panier de consommation grimper du fait des évolutions spécifiques des prix observées depuis le début de la crise sanitaire.  

Lorsqu’on tient compte des dispositifs mis en place par le gouvernement au cours de la période, quasiment la moitié des ménages ayant vu le prix de leur panier des biens se renchérir auraient été compensées à hauteur du choc subi. Dans ce contexte, sur l’ensemble de la population 23 % des ménages auraient subi des pertes de pouvoir d’achat en lien avec les évolutions exceptionnelles des prix à la consommation. Cette grandeur est de 11 % parmi les 10 % des ménages à plus faible niveau de vie, pourtant mieux ciblés par le chèque énergie. Bien évidemment ceci reflète le fait qu’un nombre significatif de ménages ont une forte exposition à certaines dépenses dont le prix a évolué de façon conséquente… »

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