Congrès des maires : pour une relance de la décentralisation

Publié le 1 décembre 2023

Nous ne partageons pas toutes les positions politiques de l’Association des maires de France (AMF) dont parfois le corporatisme communal est un peu lourd. Lors de son 105ème congrès, l’AMF a adopté une résolution générale qui comporte un plaidoyer pour une relance de la décentralisation. En revanche elle oublie de se pencher sur l’importance de la crise sociale et climatique. En ce qui concerne la fiscalité locale, elle prône l’instauration d’une contribution territoriale universelle, afin que tous les habitants – ménages et entreprises – puissent participer à hauteur de leurs moyens au financement des services publics locaux dont ils bénéficient. Elle estime à juste titre que le lien fiscal est consubstantiel au pacte démocratique. A noter que parmi les 100 membres du comité directeur de l’association on trouve deux maires de l’Isère : les maires de Pont de Claix et de Saint Martin d’Hères.

Voici des extraits de la résolution générale du congrès concernant la décentralisation et les questions financières.

« L’ambition que porte l’AMF pour une relance de la décentralisation et un approfondissement des libertés locales suppose l’abandon du mouvement de recentralisation en cours et la reconquête des libertés affaiblies, préalables à tout rétablissement de la confiance…

Les recentralisations que nous dénonçons sont multiples et étouffantes ; ce sont :

La succession de plans annoncés par le Gouvernement et dont l’application repose en tout ou partie sur l’action des communes et des intercommunalités, sans qu’elles aient été véritablement associées en amont : plan eau, vélo, écoles, chaleur, petite enfance…La logique est toujours la même : celle de politiques publiques qui suscitent des attentes légitimes de la part de nos concitoyens et dont la mise en œuvre est déléguée à nos collectivités sans moyens correspondants, au risque d’alimenter toujours plus la défiance populaire.

Les transferts rampants, comme les digues ou le recul du trait de côte, qui échappent au principe constitutionnel de compensation car le législateur depuis 2003 a pris soin d’éviter de les qualifier de transferts de compétences. Transfert de gestion, transfert de responsabilité, autorité organisatrice : l’imagination des juristes est au pouvoir lorsqu’il permet à l’Etat d’échapper à l’obligation des compensations…

Citons enfin, l’étouffement financier, imposé aux communes : sans même attendre l’encadrement des dépenses prévu par la loi de programmation des finances publiques qui prévoit une baisse de 0,5 sous l’inflation, le gouvernement a fait le choix de restreindre l’autonomie financière et fiscale des collectivités : nationalisation de la taxe d’habitation et de la CVAE et dont la compensation n’est pas à la hauteur du manque à gagner ; refus d’indexer la DGF sur l’inflation entrainant une perte sèche tous les ans pour toutes les collectivités malgré pour certaines d’entre elles des apparences trompeuses en euros courants, suppression des dispositifs de soutien contre la crise de l’énergie alors même que celle-ci dure encore notamment pour les territoires liés par des contrats pluriannuels, obligation d’établir des budgets dits verts, sans parler du fléchage toujours plus dirigiste des dotations d’investissement. Toutes ces mesures, s’ajoutant à l’augmentation tendancielle des charges, resserrent massivement le garrot budgétaire imposé aux communes et intercommunalités de France. Et demain, s’annonce la suppression de l’octroi de mer pour nos communes ultramarines, suppression dont l’effet serait aussi dévastateur que celle de la taxe d’habitation.

Quelle liberté nous reste-t-il lorsque nous ne maitrisons plus ni les recettes, ni progressivement l’affectation de nos dépenses ?…

Conformément à ces positions constantes, l’AMF appelle par la présente résolution au rétablissement d’une véritable autonomie financière et fiscale.

Nous proposons

La réécriture du principe de compensation et la définition des ressources propres tel qu’ils sont prévus par la Constitution et la loi organique. A ce titre, des clauses d’indexation du montant des compensations des transferts de compétences aux collectivités doivent être prévues, ainsi que, suivant les cas, des clauses de revoyure lorsque les conditions d’exercice de la compétence transférée sont bouleversées.

L’instauration d’une contribution territoriale universelle, afin que tous les habitants – ménages et entreprises – puissent participer à hauteur de leurs moyens au financement des services publics locaux dont ils bénéficient. Au-delà de restaurer une autonomie fiscale qui assoit une responsabilité vis-à-vis de nos mandants, nous considérons que le lien fiscal est consubstantiel au pacte démocratique.

L’engagement d’une réforme structurelle des dotations, tant en investissement qu’en fonctionnement. Il faut redonner de la lisibilité à un système à bout de souffle, rétablir la péréquation verticale aujourd’hui disparue et garantir le principe de liberté d’affectation des recettes. En outre, le partage de la fiscalité écologique, par la création d’une dotation climat, doit donner au bloc communal les moyens d’accélérer sa politique de transition écologique. Toutes les études récentes tendent à démontrer que l’adaptation au changement climatique impose une refonte du modèle financier des collectivités.

Dans le cadre de la révision à mi-parcours du cadre financier pluriannuel de l’Union Européenne, l’AMF plaide pour un maintien du budget de la cohésion territoriale et des fonds du Pacte vert pour toutes les communes de France.

L’instauration d’un pacte financier sur la durée de la législature et d’un débat dédié au parlement chaque année lors de l’examen du projet de loi de finances retraçant l’ensemble des relations financières entre l’Etat et les collectivités locales. Il s’agit de clarifier enfin les intentions de l’exécutif et mesurer l’impact global des décisions budgétaires.

La consécration du Conseil National d’Evaluation des Normes (CNEN) et du Comité des Finances Locales (CFL), instances chargées de contrôler le respect de la libre administration des collectivités, comme Autorités Administratives Indépendantes de rang constitutionnel. Malgré la qualité du travail produit par ces organismes indispensables, force est de constater qu’ils sont encore trop dépendants de l’administration, tant dans leurs moyens que dans le choix des personnels qui y sont affectées. En cohérence avec nos propositions, ces organismes doivent évoluer vers un statut qui garantisse leur indépendance. »

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