Un rapport de la cour des Comptes du 6 février 2024 se montre très critique sur les politiques suivies par 42 stations de montagne réparties sur les Alpes, les Pyrénées, le Massif central et le Jura.
Ces politiques sont fortement poussées par la Région Auvergne-Rhône-Alpes et son président qui feraient mieux d’arrêter d’emmener des territoires dans des impasses avec un gaspillage d’argent public coupable et qui met parfois en danger les ressources en eau.
La Cour constate que « le changement climatique a déjà un impact croissant sur les finances publiques locales. La gestion des remontées mécaniques nécessite d’importants investissements et un niveau de fréquentation suffisant pour générer les recettes nécessaires au renouvellement des immobilisations. Fragilisées par le manque d’enneigement et l’érosion de leur clientèle de skieurs, de plus en plus de stations ne sont déjà plus en capacité d’atteindre l’équilibre d’exploitation. Elles doivent, dès lors, faire preuve de la plus grande prudence en matière d’investissement.
La Cour dénonce : « Ces politiques, menées par les acteurs de la montagne, reposent essentiellement sur la production de neige qui permet de fiabiliser l’enneigement à court terme. Mais elle ne constitue qu’une protection relative et transitoire contre les effets du changement climatique. Son coût est important et son efficacité tend à se réduire avec la hausse des températures. De plus, l’impact de la production de neige sur les ressources hydriques apparaît sous-estimé dans de nombreux territoires. »
Voici le résumé du rapport et les 6 recommandations :
« Avec 53,9 millions de journées-skieur, la France se classe au 2e rang mondial du tourisme hivernal, juste derrière les États-Unis. Dans les années 1960 et 1970, le tourisme hivernal de montagne s’est en effet fortement développé en France, avec la construction de stations de sports d’hiver dans le cadre des plans neige initiés par l’État. L’une des conséquences de cette politique de développement des stations a été de rendre les espaces de montagne fortement dépendants du ski. Le rapport publié ce jour analyse les effets du changement climatique sur les stations de montagne en particulier, et examine dans quelle mesure celles-ci s’y sont adaptées. Au total, 42 stations – réparties sur les Alpes, les Pyrénées, le Massif central et le Jura – ont été contrôlées par une formation inter-juridictions (FIJ) associant la Cour et les chambres régionales des comptes (CRC) Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie et Provence-Alpes-Côte d’Azur. En outre, la constitution d’une base de données comprenant 200 stations a permis de procéder à une analyse statistique plus exhaustive. Si l’enquête dresse le constat d’un déclin du modèle économique du ski français, elle souligne également que les politiques publiques d’adaptation ne sont pas à la hauteur des enjeux et livre six recommandations qui permettraient de trouver des voies pertinentes de diversification.
Un modèle économique qui s’essouffle
Depuis le début du XXle siècle, l’économie des stations de ski se trouve durablement affectée par le changement climatique. Les projections climatiques des scientifiques font état d’une perte de fiabilité de l’enneigement et d’une remontée de la limite pluie-neige.
Face à ce phénomène, les stations de ski sont inégalement vulnérables en fonction de leur exposition au risque climatique, de l’impact économique et social, et de la capacité financière des collectivités à s’adapter. À l’horizon 2050, toutes ces stations seront plus ou moins atteintes, certaines d’entre elles pouvant espérer poursuivre une exploitation au-delà de cette échéance.
Le changement climatique a déjà un impact croissant sur les finances publiques locales. La gestion des remontées mécaniques nécessite d’importants investissements et un niveau de fréquentation suffisant pour générer les recettes nécessaires au renouvellement des immobilisations. Fragilisées par le manque d’enneigement et l’érosion de leur clientèle de skieurs, de plus en plus de stations ne sont déjà plus en capacité d’atteindre l’équilibre d’exploitation. Elles doivent, dès lors, faire preuve de la plus grande prudence en matière d’investissement.
Des politiques d’adaptation en deçà des enjeux
Ces politiques, menées par les acteurs de la montagne, reposent essentiellement sur la production de neige qui permet de fiabiliser l’enneigement à court terme. Mais elle ne constitue qu’une protection relative et transitoire contre les effets du changement climatique. Son coût est important et son efficacité tend à se réduire avec la hausse des températures. De plus, l’impact de la production de neige sur les ressources hydriques apparaît sous-estimé dans de nombreux territoires.
Les actions de diversification mises en œuvre par les stations sont rarement adossées à un véritable projet. Réalisées au fil de l’eau, elles tendent souvent à reproduire le modèle du ski, fondé sur des investissements importants et une forte fréquentation.
Les politiques d’adaptation sont insuffisamment accompagnées par l’État dont la planification écologique est peu opérationnelle pour le secteur touristique en montagne. De même, les régions ne souhaitent pas orienter les choix locaux en dépit de leurs compétences en matière de planification touristique. Leur intervention a de fait renforcé les stratégies de production de neige sans tenir compte des perspectives du changement climatique.
Les conditions d’adaptation des stations de montagne aux évolutions climatiques
Pour mieux prendre en compte le changement climatique, la Cour préconise l’élaboration de plan d’adaptation par chaque station de montagne. Les financements publics devraient être conditionnés à l’existence de ces plans et à leur respect.
De plus, la Cour considère que la France aurait tout intérêt à promouvoir une organisation fédérant l’ensemble des acteurs concernés, avec une gouvernance élargie au-delà des seules communes, associant acteurs publics et privés.
Enfin, la Cour constate que la mise en place d’un tourisme « quatre saisons » et le démantèlement des installations de remontées mécaniques obsolètes nécessiteront d’importants investissements que les stations les plus affectées par le changement climatique auront du mal à financer. C’est pourquoi, la Cour préconise la création d’un mécanisme de solidarité financière entre les stations.
Recommandations
1. Mettre en place un observatoire national regroupant toutes les données de vulnérabilité en montagne accessibles à tous les acteurs locaux (ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires).
2. Faire évoluer le cadre normatif afin que les autorisations de prélèvements d’eau destinés à la production de neige tiennent compte des prospectives climatiques (ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires).
3. Formaliser des plans d’adaptation au changement climatique, déclinant les plans de massifs prévus par la loi Climat et résilience (autorités organisatrices, ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires).
4. Conditionner tout soutien public à l’investissement dans les stations au contenu des plans d’adaptation au changement climatique (ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, régions, départements).
5. Mettre en place une gouvernance des stations de montagne ne relevant plus du seul échelon communal (ministère de l’intérieur et des outre-mer, collectivités territoriales).
6. Mettre en place un fonds d’adaptation au changement climatique destiné à financer les actions de diversification et de déconstruction des installations obsolètes, alimenté par le produit de la taxe sur les remontées mécaniques (ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, ministère de l’économie et des finances et de la souveraineté industrielle et numérique). »