
Alors que plus de 40% des logements sont en tôle, en bois ou en végétal et que la moitié des occupants des bidonvilles sont des personnes étrangères sans papiers, personne ne s’y est rendu avant le passage du cyclone pour prévenir la population. Ce Chido, c’est son nom, a fait un véritable carnage.
Alors que l’acheminent des secours et des denrées vers Mayotte se met en place progressivement, le gouvernement vient de prononcer l’état de « calamité naturelle exceptionnelle » sur l’île, pour une durée d’un mois, ce qui permet notamment d’accélérer les procédures de passation de marchés. Un décret instaure le blocage des prix des produits de grande consommation à Mayotte, pour éviter la spéculation. Sont notamment concernés l’eau minérale, les produits alimentaires, les piles, les produits d’hygiène et les outils.
Voici un message d’une habitante des Caraïbes, zone habituée aux cyclones :
« Les mahorais découvrent à leur tour les jours d’après cyclone.
D’autres départements français connaissent très bien ces jours-là, ils connaissent surtout la gradation couleur des alertes :
Début de saison cyclonique on fait le double de ses papiers, on prépare son sac avec les choses essentielles.
Orange on vérifie les réserves eau, nourriture, les médicaments, la radio, les bougies.
On fait le plein d’argent liquide et le plein d’essence dans les voitures.
Rouge, on renforce les fenêtres, on se barricade chez ceux qui ont la maison la plus solide.
Violet, on se serre tous très fort et on prie très fort tous les forces des esprits.
Pourquoi n’a-t-on pas appliqué à Mayotte ce que les caribéens connaissent par cœur ?
Pourquoi même les habitats en dur (hôpital, aéroport…) ont été autant « cyclonés » ? Alors que l’on connaît maintenant les normes anticycloniques ! »
Les ravages causés à Mayotte par le cyclone Chido auraient pu être largement réduits, selon le géographe Fahad Idaroussi Tsimanda habitant de Mayotte depuis un an.
« Les conséquences du cyclone Chido étaient prévisibles. Mayotte est une zone à risque même si elle bénéficie de la protection naturelle de Madagascar qui réduit d’ordinaire l’intensité des phénomènes climatiques en provenance de l’est de l’océan indien. Le dernier cyclone de cette ampleur remonte aux années 1930, donc la conscience du risque s’est peu à peu endormie. Ce type de catastrophe n’est donc pas envisagé dans la conscience collective.
La France doit prendre ses responsabilités vis-à-vis de l’île.
Cependant, les autorités mahoraises savaient qu’un tel phénomène allait toucher l’île. Elles auraient dû mettre en place un diagnostic et un dialogue avec les populations, mais rien n’a été fait. Et à l’approche du cyclone, personne ne s’est déplacé dans les bidonvilles pour prévenir la population. Seules des alarmes téléphoniques bruyantes écrites en français ont alerté les populations provenant des bidonvilles. Or, beaucoup d’habitants ne comprennent pas cette langue.
Au nord de l’île, des élagages auraient pu être faits pour éviter des chutes d’arbres, et des coupures de courant. Mais il n’y a pas assez de moyens. L’État se désolidarise et Mayotte ne peut affronter une telle crise. Nous ne devrions pas avoir à quémander de l’aide. La France connaît les risques, elle doit prendre ses responsabilités vis-à-vis de l’île. Ces comportements dangereux contribuent à ce terrible spectacle qui aurait pu être en partie évité.
Les récits des évènements rapportent que dans les bidonvilles, zones les plus durement touchées par le cyclone, des habitants, pour bon nombre sans papiers, n’ont pas trouvé refuge dans les lieux en dur. Comment l’expliquer ?
« Les zones anthropisées sur lesquelles se trouvent ces bidonvilles sont fortement exposées. Les constructions y sont très précaires, bâties sur des pentes sujettes au mouvement de terrain. Avec le vent du cyclone Chido, quasiment toutes les maisons en tôles ont volé.
Il existe plusieurs raisons pour lesquelles certains refusent de quitter leur domicile. Certains ont peur des vols, d’autres sous-estiment les dégâts d’un cyclone. Mais dans la majorité des cas, la population a peur des autorités. Selon les quelques témoignages que j’ai pu recueillir, certains ont cru à un stratagème pour les renvoyer chez eux. » La solidarité nationale doit être exemplaire face à cette catastrophe d’une ampleur inédite. Rappelons au nouveau Premier ministre que Mayotte n’est pas à l’étranger, comme il a osé le dire le 17 décembre à l’Assemblée nationale !!!
Mots-clefs : climat, gouvernement, Sécurité