
Le 28 février 2025, le Conseil départemental a débattu de son rapport d’orientation budgétaire (ROB) qui précède obligatoirement (moins de deux mois avant) le vote du budget primitif du département de l’Isère.
Pour avoir une vue synthétique rapide sur le budget d’une collectivité territoriale, une comparaison avec les départements de même strate, permet une analyse rapide en comparant les recettes et les dépenses en euros par habitants entre le département de l’Isère et la moyenne des départements de plus d’un million d’habitants, ces dernières années.
Ce qui saute aux yeux immédiatement c’est que la situation financière du CD38 est très confortable par rapport à celle de la moyenne des autres départements :
- Les recettes de fonctionnement sont à peu près dans la moyenne grâce à une dotation de l’Etat nettement supérieure à la moyenne (plus de 40 M€) qui compense des impôts locaux moins importants.
- Les dépenses de fonctionnement sont très inférieures à la moyenne de plus de 100 M€ car les dépenses sociales sont nettement inférieures : 45 M€ de moins pour les aides à la personne et 55 M€ de moins pour les frais de séjour et d’hébergement.
Ces caractéristiques sont celles d’un département géré par la droite, avec un endettement faible et une très forte épargne, mais au détriment des politiques sociales.
Le Conseil départemental de l’Isère n’a donc pas de difficultés particulières pour affronter la politique d’austérité du gouvernement pour 2025.
Ce qui est surprenant dans le ROB c’est l’annonce que les recettes de fonctionnement en 2025 vont augmenter plus fortement que les dépenses et donc que l’épargne brute va encore augmenter.
Rien dans le DOB sur les économies en fonctionnement alors que les augmentations des dépenses en personnel devraient évoluer fortement à cause de l’augmentation imposée par l’Etat de la cotisation pour les retraites des fonctionnaires. Ce défaut d’information n’est pas conforme au contenu exigé d’un ROB dans le CGCT (article D.2312-3).
Toutes les associations d’élus crient à l’austérité mais curieusement le département de l’Isère semble pouvoir échapper à cette purge. C’est assez déconcertant et peu crédible et comme le disent les élu-es écologistes et solidaires par la voix de Thierry Badouard : « Le rapport d’orientation budgétaire indique une augmentation des recettes de fonctionnement de 2,4% pour 2025, suivie d’une hausse annuelle de 2% jusqu’en 2028. C’est la perspective pluriannuelle la plus favorable de tous les débats d’orientations budgétaires que nous ayons eu depuis le début du mandat. Et pourtant, la majorité départementale continue de crier au loup, en demandant des efforts sur les compétences sociales et environnementales sous prétexte que l’année 2026 serait plus difficile. »
Voir dans le tableau suivant les évolutions budgétaires du CD38 entre 2021 et 2028

Le groupe Ecologie et Solidarité a fait des propositions précises qui n’ont pas été prises en compte :
« Tout d’abord, plutôt qu’une vision restreinte à une politique d’accès aux droits, nous appelons de nos vœux le déploiement d’une politique de « l’aller-vers » ambitieuse qui permette à tous les bénéficiaires potentiels des politiques départementales d’exercer pleinement leurs droits. Une politique proactive, qui va chercher les citoyens là où ils se trouvent, sans attendre qu’ils viennent frapper aux portes de notre collectivité.
La mise en œuvre d’un plan de soutien aux familles monoparentales nous semble également prioritaire. Ces foyers, qui constituent aujourd’hui un quart des familles, sont les plus exposés à la précarité. Ce sont bien souvent des femmes célibataires, qui vivent dans des conditions de plus en plus difficiles pour élever décemment leurs enfants. Nous pensons qu’elles méritent une attention particulière et pour cela un grand programme de soutien d’ici la fin du mandat.
Enfin, le retour à la légalité de la collectivité quant au respect des délais de traitement des dossiers MDPH nous paraît essentiel. Le temps moyen de traitement en Isère est actuellement de 7 mois au lieu des 4 mois prévus par la loi, autant de mois durant lesquels les trés nombreuses familles concernées sont inquiètes, parfois paralysées. La réduction des temps de traitement des dossiers MDPH devrait être une priorité forte de l’année 2025…
Pour déployer ces politiques sociales de manière efficace, nous savons trois leviers incontournables :
La modernisation de l’action publique pour rendre un meilleur service aux usagers représente un chantier permanent dans toutes les organisations. Des évolutions, parfois des transformations, de l’organisation du travail sont nécessaires. Toutefois, leurs mises en œuvre doivent être concertées et ne pas se faire au détriment du personnel de la collectivité et des partenaires, notamment celles et ceux qui sont au contact des populations les plus vulnérables.
Nous savons également que la sécurisation des budgets de fonctionnement est une des clés de politiques publiques efficaces. Comme évoqué précédemment, notre Département dispose de recettes suffisantes pour sécuriser l’action sociale en 2025 et pour les années à venir.
Mais le haut niveau d’épargne brute affiché dans le ROB, de l’ordre de 230 M€ annuels jusqu’en 2028, qui sont autant de moyens prélevés sur le budget de fonctionnement, témoigne de la priorité que vous donnez au budget d’investissement. Vous vous félicitez de sanctuariser, au motif du respect de la parole donnée, les 35 M€ annuels d’aide aux communes et le communiquez à grand renfort auprès d’elles. Mais avec de telles orientations budgétaires, ce sont les CCAS des communes qui trinqueront. Pas au sens propre avec des petits fours lors des inaugurations de nouveaux bâtiments financés grâce à l’aide à l’investissement des communes mais bien au sens figuré parce qu’ils devront financer en fonctionnement là où le département n’est pas assez présent : l’aller vers les populations fragiles, le financement des SAAD, le financement des EHPAD et des résidences autonomie lorsqu’ils sont communaux ou intercommunaux.
Enfin, l’investissement, vecteur essentiel pour préparer l’avenir. Dans la continuité de nos votes précédents, nous saluons les investissements importants consacrés à la rénovation des collèges, ainsi que le déploiement à l’échelle départementale de notre proposition de campagne de végétalisation des cours de nos collèges. Aussi, nous serons vigilants à ce que les 326 M€ d’emprunt que vous vous apprêtez à réaliser d’ici 2028 soient bien orientés vers des infrastructures d’avenir comme les collèges et non en direction d’investissements inutiles et parfois même hasardeux. Votre entêtement à maintenir à tout prix des projets de contournements routiers ou d’élargissement de routes départementales décidés il y a des décennies est anachronique. Pire, votre décision de retirer les 16 M€ de financement à l’hôpital public de La Tronche, établissement ô combien essentiel pour l’Isère et sa région, et au mépris du “respect de la parole donnée”, toute en accordant simultanément 4 M€ à un club de football professionnel témoigne de votre manque de discernement sur les priorités du territoire.
Au final, votre orientation politique visant à financer certains investissements qui ne répondent pas au besoin de la population, en rognant sur les budgets de l’action sociale, ne nous convainc évidemment pas. Nous serons donc au rendez-vous de fin mars pour démontrer qu’une autre orientation budgétaire est possible. »
Pour suivre les travaux du groupe Isère Ecologie et Solidarité cliquer ici.
Mots-clefs : budget, conseil départemental, FInances